crédit : direction Ressources Marines et Minières
Tahiti, le 6 février 2020 - Au moins deux espèces d'oursins meurent en masse à travers la Polynésie, pour des causes mystérieuses. Les scientifiques qui ont relevé ce phénomène s'inquiète de la disparition de cette espèce importante pour la survie du corail.
Lors d'une passionnante conférence publique à l'UPF le 23 janvier dernier sur le thème de la biodiversité dans nos lagons, René Galzin (directeur d'études à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes et chercheur au Criobe) a dévoilé un fait inquiétant, encore inconnu du grand public : la disparition de nos oursins (vana en tahitien) ces dix dernières années. Aucune étude d'envergure n'a encore été lancée sur le sujet, mais diverses théories tentent d'expliquer le phénomène.
Nous avons contacté sa source, son collègue Yannick Chancerelle (ingénieur d'études à l'EPHE, en poste au Criobe). C'est lui qui a étudié la question plus en détails avec le docteur Maggy Nugues.
Yannick Chancerelle nous précise que "ce sont principalement les espèces du genre diadema, les oursins diadème aux très longs piquants, et du genre échinothrix, des gros oursins avec des piquants moins longs, qui sont concernés. Sur le lagon de Moorea où on a un très long suivi, on voit que sur les sites où ils existaient par centaines, il n'en reste presque plus. Donc ce sont des observations rigoureuses. Dans les autres lagons, nous avons des témoignages, mais sans comptage scientifique, c'est plus difficile à vérifier. Mais il y a des observations en ce sens qui ont été faites de Tahiti jusqu'aux Marquises. On s'interroge sur l'étendue géographique du phénomène. En tous cas, les chiffres montrent que depuis 10-15 ans on voit une nette diminution des populations. Nous n'en connaissons pas les raisons, mais normalement ces espèces se reproduisent vite et les populations rebondissent rapidement en général, ce qui n'est pas le cas actuellement."
Il pourrait s'agir d'un des premiers effets des changements climatiques. Une autre théorie est que nos vana seraient victimes d'un virus, une maladie qui décimerait les populations. C'est ce qui était arrivé aux oursins de la mer des Caraïbes en 1983, quand ils sont morts en masse du fait d'une maladie jamais identifiée.
Quelle que soit la cause de la disparition de nos oursins, elle ne sera pas sans conséquences. Une étude publiée par le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) et l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) attribue la mauvaise santé des coraux caribéens en partie à la disparition de leurs oursins. Avec la surpêche des poissons-perroquets et la mort des oursins, les deux principaux mangeurs d'algue des Caraïbes ont disparu, ce qui crée des champs d'algues au fond du lagon, qui empêchent les coraux de pousser... Au final, depuis les années 1970, plus de 50 % de la surface occupée par les coraux a été perdue dans les lagons des Caraïbes.
Premiers signaux d'alarme
La découverte de ces étranges disparitions est très récente, même pour les autorités, comme le confirme cette interview accordée à Tahiti Infos en 2018 par un responsable de la direction des Ressources Marines et Minière : "la pêche, et en particulier la pêche des vana, est une activité libre. Il n'y pas de mesure spécifique au vana. C'est plutôt des mesures générales sur la pêche, comme le respect de leur environnement naturel, des zones de pêches réglementées, qui s'appliquent aussi à cet espèce marine."
Ce manque juridique entraînait selon lui "de la surpêche dans certaines zones de Tahiti. Et quand on voit des pêcheurs s'attaquer au ina la plus petite espèce d'oursin ça veut vraiment dire que l'on a du mal à trouver du tara poto ou du tara roa qui sont les espèces les plus recherchées (…) Et plutôt que de changer de lagon ils préfèrent s'attaquer à d'autres espèces de la même zone. Mais sur ce point-là on ne veut pas trop s'avancer parce que pour le moment nous n'avons toujours pas réalisé d'étude complète sur les vana." Il ignorait alors que les tara poto et les tara roa étaient plus probablement victimes d'une maladie ou de changements de leur environnement.
Maintenant que les scientifiques ont découvert l'existence du problème, c'est au tour des pouvoirs publics de prendre des mesures de protection des espèces de vana affectées, en parallèle des programmes de recherche pour déterminer la cause exacte de leur problème.
Lors d'une passionnante conférence publique à l'UPF le 23 janvier dernier sur le thème de la biodiversité dans nos lagons, René Galzin (directeur d'études à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes et chercheur au Criobe) a dévoilé un fait inquiétant, encore inconnu du grand public : la disparition de nos oursins (vana en tahitien) ces dix dernières années. Aucune étude d'envergure n'a encore été lancée sur le sujet, mais diverses théories tentent d'expliquer le phénomène.
Nous avons contacté sa source, son collègue Yannick Chancerelle (ingénieur d'études à l'EPHE, en poste au Criobe). C'est lui qui a étudié la question plus en détails avec le docteur Maggy Nugues.
Yannick Chancerelle nous précise que "ce sont principalement les espèces du genre diadema, les oursins diadème aux très longs piquants, et du genre échinothrix, des gros oursins avec des piquants moins longs, qui sont concernés. Sur le lagon de Moorea où on a un très long suivi, on voit que sur les sites où ils existaient par centaines, il n'en reste presque plus. Donc ce sont des observations rigoureuses. Dans les autres lagons, nous avons des témoignages, mais sans comptage scientifique, c'est plus difficile à vérifier. Mais il y a des observations en ce sens qui ont été faites de Tahiti jusqu'aux Marquises. On s'interroge sur l'étendue géographique du phénomène. En tous cas, les chiffres montrent que depuis 10-15 ans on voit une nette diminution des populations. Nous n'en connaissons pas les raisons, mais normalement ces espèces se reproduisent vite et les populations rebondissent rapidement en général, ce qui n'est pas le cas actuellement."
Il pourrait s'agir d'un des premiers effets des changements climatiques. Une autre théorie est que nos vana seraient victimes d'un virus, une maladie qui décimerait les populations. C'est ce qui était arrivé aux oursins de la mer des Caraïbes en 1983, quand ils sont morts en masse du fait d'une maladie jamais identifiée.
Quelle que soit la cause de la disparition de nos oursins, elle ne sera pas sans conséquences. Une étude publiée par le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) et l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) attribue la mauvaise santé des coraux caribéens en partie à la disparition de leurs oursins. Avec la surpêche des poissons-perroquets et la mort des oursins, les deux principaux mangeurs d'algue des Caraïbes ont disparu, ce qui crée des champs d'algues au fond du lagon, qui empêchent les coraux de pousser... Au final, depuis les années 1970, plus de 50 % de la surface occupée par les coraux a été perdue dans les lagons des Caraïbes.
Premiers signaux d'alarme
La découverte de ces étranges disparitions est très récente, même pour les autorités, comme le confirme cette interview accordée à Tahiti Infos en 2018 par un responsable de la direction des Ressources Marines et Minière : "la pêche, et en particulier la pêche des vana, est une activité libre. Il n'y pas de mesure spécifique au vana. C'est plutôt des mesures générales sur la pêche, comme le respect de leur environnement naturel, des zones de pêches réglementées, qui s'appliquent aussi à cet espèce marine."
Ce manque juridique entraînait selon lui "de la surpêche dans certaines zones de Tahiti. Et quand on voit des pêcheurs s'attaquer au ina la plus petite espèce d'oursin ça veut vraiment dire que l'on a du mal à trouver du tara poto ou du tara roa qui sont les espèces les plus recherchées (…) Et plutôt que de changer de lagon ils préfèrent s'attaquer à d'autres espèces de la même zone. Mais sur ce point-là on ne veut pas trop s'avancer parce que pour le moment nous n'avons toujours pas réalisé d'étude complète sur les vana." Il ignorait alors que les tara poto et les tara roa étaient plus probablement victimes d'une maladie ou de changements de leur environnement.
Maintenant que les scientifiques ont découvert l'existence du problème, c'est au tour des pouvoirs publics de prendre des mesures de protection des espèces de vana affectées, en parallèle des programmes de recherche pour déterminer la cause exacte de leur problème.