La commune de Papara condamnée pour mise en danger de la vie d’autrui


Tahiti, le 12 août 2024 – Dans un arrêt rendu le 1er août, la cour d’appel de Papeete a condamné la commune de Papara pour mise en danger de la vie d’autrui à payer une amende de 500 000 francs. Alors qu’elle avait été relaxée en première instance, elle a cette fois été reconnue coupable d’avoir ordonné à plusieurs de ses agents de retirer des poteaux amiantés alors que lesdits agents n’étaient pas formés pour le faire.
 
La cour d’appel de Papeete a condamné, le 1er août dernier, la commune de Papara pour “mise en danger de la vie d’autrui par personne morale par violation manifestement délibérée d’une obligation réglementaire de sécurité ou de prudence”. Des faits survenus entre octobre et décembre 2016 pour lesquels elle a donc écopé d’une amende de 500 000 francs.
 
Cette affaire, dans le cadre de laquelle la commune avait été relaxée en première instance, avait démarré début 2017 lorsque l’inspection du travail avait signalé au parquet que trois agents municipaux avaient manipulé deux potelets – des petits poteaux destinés au flux de la circulation – amiantés sans protection réglementaire dans le cadre du marché portant sur le désamiantage avant la destruction de l’école Apatea. Un marché effectué par une société au terme duquel ces deux potelets avaient donc été laissés sur place.
 
Dans le cadre de l’enquête préliminaire et à la suite des plaintes déposées par les trois agents communaux, la société chargée du marché avait fait valoir que lors de la visite préalable du chantier, seuls quatre des six poteaux mentionnés dans l’étude préalable avaient été “repérés” et donc “retirés”. En mars 2023, le tribunal correctionnel avait relaxé la commune au motif que les éléments présents au dossier ne “permettent pas d’affirmer que les deux potelets étaient effectivement amiantés et que n’ayant pas été saisis, ils n’ont pu faire l’objet d’une analyse technique”. Le tribunal correctionnel avait également affirmé qu’il n’était pas “davantage établi” que les potelets “étaient détériorés de manière à libérer des fibres d’amiante exposant les personnels à un risque quelconque”.
 
Pressions sur les agents
 
Or, dans son arrêt rendu le 1er août, la cour d’appel de Papeete rappelle que l’adjoint au maire de Papara et responsable de l’environnement avait reconnu durant l’enquête qu’il avait effectivement donné des consignes au directeur des services techniques de la commune afin de faire retirer les potelets en “urgence”. Il avait également concédé que les agents n’étaient pas formés pour effectuer ce type de travail mais “comme il n’était pas possible de laisser ces objets amiantés près de la plage au risque que des personnes les manipulent”, il avait demandé à ses agents de porter des “masques et des gants”.
 
Lors de son audition, le directeur des services techniques avait quant à lui admis avoir demandé aux trois agents de “reformuler” leurs dépositions auprès de la gendarmerie car “c’était hyper dangereux” et qu’il avait donc préféré qu’ils “changent de version”.
 
“Risque d’atteinte corporelle”
 
Au regard de ces éléments, la cour d’appel a donc jugé que la commune avait “délibérément enfreint l’obligation de sécurité des travailleurs exerçant sur les ouvrages amiantés, en donnant pour instructions à des agents municipaux non formés aux risques d’exposition à l’amiante de procéder à l’enlèvement d’objets susceptibles d’en contenir pour préserver le reste de la population, et en ne s’assurant pas qu’ils étaient équipés de combinaison, gants et masque lors de la manipulation, la mise en sécurité dans le sac et du transport des potelets”.
 
Elle a donc conclu que le “risque d’atteinte corporelle” était alors avéré “en ce qui concerne l’exposition à l’amiante”, “ce qui explique d’ailleurs la multiplicité des dispositions légales applicables pour contraindre l’employeur à prendre toutes les précautions nécessaires pour assurer la protection de ses subordonnés qui manipulent cette matière dans le cadre de leur travail”.
 

Rédigé par Garance Colbert le Lundi 12 Aout 2024 à 17:31 | Lu 3885 fois