La chambre territoriale des comptes pousse la Maison de la culture à moderniser sa gestion


PAPEETE, le 23 juillet 2018 – La chambre territoriale des comptes a publié ce lundi son rapport sur la gestion de la Maison de la Culture – Te Fare Tauhiti Nui (TFTN). La juridiction souligne l’importance pour l'institution culturelle de moderniser ses outils de gestion et de définir une organisation de travail respectueuse de la réglementation.
La chambre territoriale des comptes a examiné la gestion de la Maison de la Culture – Te Fare Tauhiti Nui (TFTN) de 2012 à 2017. Sur 52 pages, elle fait le bilan des services qui fonctionnent et de ceux qui doivent être améliorés.

Depuis 2012, la Maison de la culture a subi une "mutation d'envergure" qui accompagnée d'un "statut inadapté à ses missions" mettent l'établissement "sous tension" forçant le personnel à faire exploser les heures supplémentaires. Tous ces éléments sont à l'origine des dysfonctionnements que rencontre TFTN, sans oublier que l'établissement culturel est aujourd'hui un "établissement confronté à de nouveaux enjeux"

DES PROBLEMES DE REGIE

"Depuis la dissolution de l’EPIC Heiva Nui, TFTN est également chargé de l’organisation de tous les spectacles et manifestations organisés place To’ata, au premier rang desquels le Heiva I Tahiti. L’extension de l’éventail de ses missions en 2013 a conduit au doublement de la fréquentation. Si l’établissement est parvenu à faire face à ce bouleversement, force est de constater qu’il a davantage subi que maîtrisé cette mutation, faute d’analyse des risques et d’un accompagnement adéquat de la part de son ministère de tutelle : ni les outils de gestion, ni les procédures de travail n’ont été modernisés en dépit d’un changement de format indéniable. Les dysfonctionnements majeurs survenus par la suite ne sont donc que la conséquence de ces défaillances procédurales : un détournement de fonds de plus de 2,9 MF CFP à la régie de recettes apparu en 2014, suivi en 2015 par la découverte d’un détournement de biens publics."

En effet, "la direction ne dispose pas, à ce jour, d'outils de pilotage de son activité et de ses moyens, notamment de tableaux de bord." Indique le rapport de la chambre territoriale. La juridiction évoque notamment un manque d'accompagnement du ministère de tutelle "Les modalités de gestion de TFTN dans son nouveau format n'ont pas été abordées sous l'angle administratif et financier par la tutelle."

Néanmoins, la CTC note que l'établissement "s'apprête à acquérir un progiciel de gestion intégré des ressources humaines […] Il permettra à l'établissement de se doter à terme d'une véritable comptabilité analytique et de mettre un terme à la gestion de la paie sur tableur. […] cette démarche constitue un progrès indéniable". Ainsi, le renforcement de la direction, la mise en place d'outils de gestion adéquate et la formalisation des procédures de travail qui ont été initiées en fin d'année 2016 sont encourageants. Néanmoins, leur "poursuite sur le long terme est indispensable", précise le rapport de la CTC.

UN STATUT INADAPTÉ

La chambre reproche au conseil d'administration de la maison de la culture de ne pas avoir analysé "l’origine des dysfonctionnements financiers cet EPIC" et ainsi d'avoir "doté TFTN d’un statut inadapté à l’exécution de l’ensemble de ses missions."

Ainsi, le statut de TFTN lui impose d’organiser le temps de travail et le recrutement de son personnel conformément aux dispositions du statut de la fonction publique du Territoire. Or ce fonctionnement n'est pas adapté aux "exigences du spectacle vivant, qui impliquent une grande flexibilité des horaires de travail et des compétences techniques spécifiques peu représentées dans l’administration." De ce fait, TFTN rencontre des difficultés de recrutement. La Maison de la culture se retrouve donc en sous-effectif chronique. Pour répondre à ses besoins, "la direction de l’établissement n’a d’autre choix que de multiplier le recours aux agents sous contrat, et même de s’affranchir des dispositions légales relatives au temps de travail. Ainsi, depuis 2012, les agents de l’établissement effectuent en moyenne 14 000 heures supplémentaires par an, en dépassement des quotas autorisés et des dérogations accordées. " Selon le rapport, une réforme du statut est nécessaire.

La CTC note que si l'établissement a engagé un "assainissement du fonctionnement", l’établissement est d'ores et déjà confronté à de nouveaux enjeux, notamment "avec l’engagement du projet de création du Centre culturel de la Polynésie française, comme prévu dans la convention relative à la culture signée par l’État et la Collectivité le 17 mars 2017." Ce nouveau centre culturel est prévu pour 2021, or "les procédures d’affectation des emprises foncières actuellement utilisées par TFTN n’ont pas été finalisées depuis 2012 ; les besoins en terme de capacité d’accueil du pôle « spectacle vivant » n’ont pas été évalués ; la réflexion sur le projet culturel du futur Centre prévu en 2021 n’a toujours pas été initiée, alors qu’elle conditionne la détermination de l’effectif cible et de la cartographique des compétences, éléments indispensables à tout plan de recrutement et de formation des agents. Enfin, les études sur les modalités de gestion des deux pôles n’ont toujours pas été engagées."

L'établissement enjoint au conseil d'administration de la Maison de la culture d'arrêter au plus vite des lignes directives fiables afin d'élaborer et de finaliser un projet en accord avec les attentes du public et acteurs privés.

Les recommandations de la CTC

Recommandation 1 : Établir un organigramme fonctionnel et rédiger un nouveau règlement intérieur.
Recommandation n° 2 : Reconsidérer la composition du conseil d’administration en vue de garantir à la fois l’autonomie de gestion de l’établissement public et la réalité de l’exercice de la tutelle de la part du gouvernement.
Recommandation n° 3 : Moderniser les outils de gestion et formaliser l’ensemble des procédures de travail des différents départements.
Recommandation n° 4 : Soumettre à la validation du conseil d’administration un plan pluriannuel d’investissement.
Recommandation n° 5 : Mettre à jour le périmètre patrimonial afin de fiabiliser l’inventaire des biens et actualiser l’ensemble des polices d’assurance.
Recommandation n° 6 : Définir une nouvelle organisation du travail respectueuse des dispositions légales et réglementaires.
Recommandation n° 7 : Clarifier les modalités d’indemnisation des heures supplémentaires dans le respect du droit.
Recommandation n° 8 : Mettre en place une comptabilité analytique.

Rédigé par Marie Caroline Carrère le Lundi 23 Juillet 2018 à 15:35 | Lu 2157 fois