La Terre des Hommes du président


Une vue du village de Atuona, qui sera indubitablement la capitale des Marquises à l’occasion de la visite d’Emmanuel Macron.
Tahiti, le 23 juillet 2021 - Les 2 250 habitants de la petite île de Hiva Oa, dans l’archipel des Marquises, sont sur le pied de guerre ou presque depuis plusieurs semaines, car le 25 juillet, ils auront le privilège de recevoir sur leur île Emmanuel Macron, premier Président de la République française à se rendre aux Marquises. Ce dernier effectuera après son passage au Japon pour l’ouverture des JO un séjour du 24 au 28 juillet en Polynésie française ; il arrivera le 25 à Hiva Oa et en repartira le 26, si les dates de ce déplacement sont définitivement confirmées.
 
Bien évidemment, les sites archéologiques, comme Upeke, au fond de la vallée de Taaoa, ou même le petit cimetière abritant les tombes de Paul Gauguin et de Jacques Brel, sans parler du site cérémoniel au cœur de Atuona, ont été soigneusement désherbés et préparés pour accueillir le président français. Les nids de poule ont été bouchés et les bords de route nettoyés et élagués. Quant aux anciens “tiki” de pierre et de bois, pré européens pour beaucoup d’entre eux, véritables trésors archéologiques de cette île, ils seront bien entendu “au garde à vous” pour accueillir le président français.

Le bungalow N° 8 de l’hôtel Hanakee Lodge, face au mont Temetiu et à la baie des Traîtres (avec le motu Hanakee). C’est là que dormira M. Macron.
Les plus Français des Polynésiens
 
Pas question, pour les Marquisiens, qui ont toujours été les plus “Français” des Polynésiens (ils sont très attachés à la France et farouchement opposés dans leur très grande majorité à toute idée d’indépendance), de ne pas être à la hauteur de l’événement.
“L’autonomie, c’est le système idéal” nous a confié un habitant de Atuona : “Nous sommes libres de nous organiser comme nous le voulons, mais nous avons l’appui de la France qui répond toujours présent lorsque nous la sollicitons, et cela sans remettre en cause notre identité marquisienne que nous réaffirmons haut et fort et que nous réaffirmerons également au président Macron”.
Si tout le monde ou presque est prêt à recevoir le Président de la République, certains, ici et là, sont plus motivés encore que d’autres : ainsi le personnel de l’hôtel Hanakee Lodge est complètement mobilisé car c’est dans le bungalow N° 8, identique aux 14 autres, mais où la vue sur la baie des Traîtres et le mont Temetiu est la plus spectaculaire, que dormira le chef de l’État. “On ne se fait pas trop d’illusions sur le plan gastronomique car à part un petit-déjeuner, il est peu probable que le président déjeune ou dîne chez nous compte tenu de son programme officiel sur l'île. En revanche, nous ferons tout ce que nous pourrons pour qu’il passe une nuit reposante dans notre hôtel”, nous a confié un des employés.

La salle de restaurant du Hanakee Lodge ; M. Macron y prendra son petit-déjeuner le 26 juillet au matin, avant de se rendre à Taaoa puis à Manihi, aux Tuamotu (si le programme tel qu’il est prévu est maintenu).
Un accueil inoubliable
 
A la mairie, Joëlle Frébault, première édile depuis les dernières municipales, a elle aussi mobilisé tout son personnel, alors que sur le plan associatif, les danseurs de haka se préparent pour un accueil qu’ils espèrent inoubliable. “On ne va pas essayer de lui faire peur ou de faire peur à son épouse, bien sûr, mais on veut qu’il sente la puissance, le “mana” qui nous habite. On est fiers d’être Marquisiens, fiers d’être natifs de la Terre des Hommes, du Fenua Enana et fiers d’être Français. C’est un très grand honneur pour nous que le Président de la République vienne dans notre île et on ne le décevra pas”, explique un danseur.
Quant à certains artisans, ils peaufinent les cadeaux, des sculptures essentiellement, qui leur ont été commandés pour être offerts au Président et à son épouse, tandis qu’à la dernière minute les “mamas” de l’île s’affaireront, on s’en doute, à préparer les couronnes et colliers de fleurs qui seront réservés à Emmanuel Macron, mais aussi à sa nombreuse suite.

Le site de Upeke, au-dessus de Taaoa, avec son vaste espace où devraient se produire des artistes locaux pour la visite présidentielle.

Incontournables, les tombes du peintre Paul Gauguin et de Jacques Brel.

La reconstitution de la “Maison du Jouir” où Gauguin peignit parmi ses plus grands chefs-d’œuvre.
Deux dossiers culturels urgents
 
Inutile en revanche de chercher à se loger à Atuona et même ailleurs sur l’île de Hiva Oa, tous les hébergements sont complets et certains habitants logeront même probablement des membres de la délégation présidentielle. Les services de sécurité sont déjà venus il y a quelques semaines en masse pour reconnaître tous les lieux où passera (et séjournera) Emmanuel Macron. Et pour tout passer au peigne fin ; pas question de lui faire courir le moindre risque sur le plan de sa sécurité.
Certes le “folklore” sera au menu de ce séjour, mais les Marquisiens attendent M. Macron sur deux dossiers culturels précis et jugés urgents : l’inscription de leur archipel au patrimoine mondial de l’Humanité par l’Unesco (inscription qui ne peut se faire qu’avec l’appui de la France métropolitaine) et également l’inscription du matatiki (art graphique marquisien que l’on retrouve sur les tatouages, mais aussi sur les sculptures en bois ou en pierre) au patrimoine culturel immatériel français.

La superbe plage de Hanatekuua, sur la côte nord de Hiva Oa. Sauf à randonner deux heures (pour aller, autant pour revenir), Emmanuel Macron ne s’y rendra pas.
Gémir n’est pas de mise...
 
Il ne reste qu’une incertitude : juillet et août sont traditionnellement des mois plutôt arrosés aux îles Marquises et depuis quelques semaines, les pluies sont parfois abondantes ; c’est la météo qui décidera seule de la qualité de cette visite présidentielle hors normes. Mais comme le chantait Jacques Brel, qui repose sur les hauteurs de Atuona, “gémir n’est pas de mise aux Marquises”…

Rédigé par Daniel Pardon le Vendredi 23 Juillet 2021 à 17:04 | Lu 3502 fois