« La Polynésie française au sein de la famille européenne »


NDLR: ce communiqué est antérieure à l'éviction de Monsieur Rohfritsch du Gouvernement par Monsieur Tong Sang:

A la demande du Président du Pays, le ministre de la reconversion économique, Teva Rohfritsch, conduit la délégation polynésienne, composée du ministre des affaires foncières, Tearii Alpha, et du sénateur, Richard Tuheiava, au IXième forum UE-PTOM (Union Européenne - Pays et Territoires d'Outre-Mer), qui se déroule cette semaine à Nouméa.
A l'occasion de la première journée de ce forum, le chef de la délégation polynésienne, Teva Rohfritsch a signé, en présence de la Ministre de l'Outre-mer, Madame Marie-Luce Penchard, le projet de position commune des PTOM en vue du futur accord UE-PTOM.
Le ministre, Teva Rohfritsch, a, par ailleurs, prononcé un discours introductif en présence de l'ensemble des 21 membres de l'OCTA (Overseas Countries and Territories Association / Association des Pays et Territoires d'Outre-Mer) présents au forum, insistant notamment sur l'importance de l'instrument financier afin d'accéder à des financements européens plus importants.
Le chef de la délégation est également intervenu de manière décisive pour maintenir la présence de la Polynésie française au sein du comité exécutif de l'OCTA , permettant ainsi de renforcer encore l'influence de notre Pays dans la préparation des futurs accords européens.
Les prochaines journées seront consacrées à des échanges entre PTOM, en présence du Commissaire Européen, M. Pibals, ainsi qu'à des réunions techniques dans les domaines de la santé et de l'environnement.

Allocution de Monsieur Teva Rohfritsch

Allocution de Monsieur Teva Rohfritsch, ministre de la reconversion économique de la Polynésie française, chef de la délégation de la Polynésie française
à la Conférence ministérielle de l’OCTA
Nouméa 28 février 2011

Monsieur le Président de la Conférence ministérielle,
Madame la Présidente du bureau exécutif de l’OCTA,
Messieurs les Présidents Premiers Ministres et Ministres des PTOM,
Mesdames et Messieurs les chefs de délégation,
Chers amis entrant dans la famille de l’OCTA,
Messieurs les sénateurs,
Mesdames, Messieurs,

Je souhaiterais, en tout premier lieu vous présenter les salutations du Président de la Polynésie française, Monsieur Gaston Tong Sang, retenu en Polynésie française et qui regrette sincèrement de ne pouvoir être parmi nous aujourd’hui.
En son nom, et au nom de toute notre délégation, je remercie nos hôtes, voisins et frères du Pacifique, les Néo-Calédoniens non seulement pour l’organisation de cette conférence ministérielle à Nouméa, non seulement pour leur accueil mais aussi pour avoir piloté, au sein de l’OCTA, la réflexion sur la « position commune » et conduit le « comité technique France » qui nous a permis d’échanger nos avis et jeter les bases du nouveau partenariat entre l’UE et les PTOM. Je souhaite, à ce titre, remercier le Président Gomes et ses équipes.
En effet tout ce travail nous aura à tous permis de faire émerger de tant de diversité les points qui nous rassemblent, sur lesquels nous avons pu dégager un consensus afin de parler d’une seule voix, unie et plus forte, cette voix des PTOM aujourd’hui à nouveau rassemblés en terre océanienne. Aussi permettez moi aussi de vous souhaiter la bienvenue à tous dans notre grand océan pacifique. Iaorana et manava i to tatou fareireiraa.
Avec ce document, nous franchissons une nouvelle étape de la construction de notre relation avec l’Union européenne. Le livre vert, en 2008 puis la communication de la Commission européenne, en 2009, nous ont ouvert une réelle opportunité de changement dans nos relations avec l’Europe. Cette déclaration commune constitue une avancée certaine dans notre dialogue avec les instances européennes.
L’affirmation des atouts que peuvent représenter les PTOM pour l’Europe et l’expression du caractère mutuellement bénéfique que doit revêtir ce partenariat rénové représente, pour la Polynésie française, une étape essentielle de nos discussions.
La place particulière que nous occupons, en tant que PTOM, au sein de l’Union européenne doit être comprise, acceptée et intégrée dans tout le processus de dialogue. Au-delà de nos spécificités, c’est sur notre identité que ces propos s’appuient. Une identité qui fonde les relations que nous entretenons avec nos Etats-membres respectifs, la citoyenneté européenne de nos ressortissants, les valeurs européennes que nous partageons avec les Etats de l’Union sont autant de raisons de revendiquer notre appartenance à la grande « famille européenne ».
Appartenir à cette grande famille européenne ne signifie pas pour autant pour nous PTOM, renier nos identités respectives. Notre identité amène chacun d’entre nous à définir cette notion de « famille européenne ». Elle peut revêtir, suivant nos situations respectives, des sens très différents. C’est probablement la raison pour laquelle le concept n’a pu être davantage précisé dans notre projet de « position commune ». Cette diversité, qui enrichit la famille européenne, justifie à elle seule notre souhait commun d’introduire de la souplesse dans la nouvelle DAO, afin de permettre l’adoption de décisions traitant de cas spécifiques. On ne peut que se féliciter de cette proposition qui mériterait, à notre avis, d’être mentionnée dans les propos conclusifs.
En ce qui concerne la Polynésie française, nous partageons, bien sûr, ce sentiment d’appartenance à la famille de l’UE mais nous resterons vigilants quant à la préservation de nos compétences et de notre identité propre au sein de la République française et, a fortiori, au sein de l’Europe.
Au centre du Pacifique Sud, la Polynésie française est sans doute, avec Pitcairn, le PTOM le plus éloigné de tout continent et, notamment, du continent européen. Cet éloignement est un handicap certain qui nous conduit à considérer l’intégration régionale non plus comme un potentiel supplémentaire de développement mais bien comme une nécessité impérative. Aussi, nous ne pouvons que soutenir l’accent mis sur la promotion de la coopération et de l’intégration régionale.
Encore faut-il que nos intérêts économiques dans l’espace régional qui nous concernent soient préservés. Aussi, nous saluons l’expression, tant dans la déclaration commune que dans le projet de déclaration politique, de notre besoin d’information, voire (pourquoi pas ?) de consultation lors de la négociation par l’UE d’accords internationaux susceptibles de produire des effets sur notre économie, et notre revendication d’être considérés comme des acteurs majeurs dans les programmes régionaux.
S’agissant des instruments financiers, il nous apparait tout à fait essentiel que les PTOM disposent d’un fonds d’intervention dédié, mieux adapté à nos problématiques de développement. Il nous semble tout aussi essentiel que les relations privilégiées que nous entretenons avec l’UE par l’intermédiaire des Pays Membres auxquels nous sommes rattachés se traduisent par un engagement financier plus en rapport avec ce lien.
Nous prenons note des termes de la déclaration commune selon lesquels « les préférences commerciales octroyées aux PTOM dans le cadre de l’actuelle DAO se sont avérées bénéfiques. », c’est probablement le cas pour certains PTOM. Cela ne l’est pas pour la Polynésie française. Notre éloignement du marché européen et les coûts de transport qui en résultent, nos handicaps structurels font que nos produits vendus sur le marché européen, en dépit des préférences commerciales évoquées, sont peu compétitifs. Ainsi, nos exportations vers les pays de l’UE ne représentent que 13% de notre chiffre d’affaires à l’export.
En revanche, les produits européens disposent, sur notre marché, d’un avantage concurrentiel certain résultant de ces préférences commerciales. Les importations en provenance de l’UE représentent 42% de nos achats à l’extérieur. Les exonérations douanières dont ces produits bénéficient correspondent à un manque à gagner de 8 milliards F CFP (67 millions €) PAR AN pour la Polynésie française ! Ce chiffre est à rapprocher du montant du FED : 20 millions € pour la période 2008-2013, soit cinq années !
La réduction de l’écart existant entre les PTOM et les RUP est, de toute évidence, un objectif à privilégier. L’ouverture aux PTOM de nouveaux programmes européens, l’éligibilité aux programmes horizontaux sont autant de pistes permettant d’élargir le potentiel d’intervention de l’UE vers les PTOM.
Encore faut-il que nos vœux de simplification radicale des procédures, sous-tendant un régime préférentiel pour les membres de la « famille européenne » que nous sommes, se concrétisent dans la future décision d’association. Mal armés face à la complexe administration, nous nous sentons souvent impuissants et désorientés par manque d’information. Une assistance technique renforcée nous semble indispensable pour améliorer notre connaissance en matière de gestion et d’accès aux fonds.
Une meilleure prise en compte de notre spécificité au sein même de la Commission par un renforcement des ressources humaines à Bruxelles, voire l’identification d’un correspondant au sein de chaque Direction, nous semble être la meilleure manière d’améliorer notre accès aux instances européennes.
Dans le même esprit, l’établissement du bureau de l’OCTA constitue une étape essentielle dans l’organisation de nos échanges avec l’UE et la Polynésie française soutient fermement la réaffirmation de ce besoin exprimée dans notre projet de déclaration politique.
Enfin, pour terminer, la Polynésie française souscrit au souhait de conserver l’impulsion dans le dialogue politique par l’organisation d’un Forum avant la fin de cette année. Cette position commune fixe un cadre à l’intérieur du quel nous devons préciser à la Commission nos attentes. Nous devons donc poursuivre, à un niveau plus technique, les échanges relatifs à la construction d’un nouveau partenariat et nous proposons, si vous en êtes d’accord, la mise en place, sous l’égide de l’OCTA, de groupes de travail thématiques associant les PTOM et l’UE sur les questions évoquées dans notre déclaration commune.
Merci de votre attention. Mauruuru.

TEVA ROHFRITSCH





Rédigé par communiqué MRE le Lundi 28 Février 2011 à 11:22 | Lu 964 fois