Crédit Theo Rouby / AFP
Nouméa, France | AFP | dimanche 17/09/2022 - Des statuettes réalisées il y a plus d'un siècle par un déporté de la Commune ont été restituées à la Nouvelle-Calédonie: le don d’un particulier qui doit permettre d’appuyer le dossier du classement du bagne calédonien au patrimoine mondial de l’Unesco.
Petit-fils d’un médecin du bagne, Philippe Collin, professeur à la retraite féru d'histoire, a fait don à la Nouvelle-Calédonie de 27 personnages en terre séchée, achetés par son grand-père à un détenu entre 1910 et 1914.
Les statuettes d’une dizaine de centimètres de haut, en parfait état de conservation, représentent des scènes de la vie traditionnelle Kanak, comme le pilou (danse rituelle), ou des moments du quotidien.
"C’est ce qu’on appelait de la camelote, ces petits objets que les bagnards vendaient aux gardiens, médecins et autres notables, pour améliorer l’ordinaire", explique le président de l’association Témoignage d’un passé, gestionnaire du site historique de l’île Nou, consacré au bagne, où 21.000 prisonniers ont séjourné entre 1864 et le début des années 1920, dans les pénitenciers de Nouméa et de Bourail, sur la Grande Terre, et de l'île des Pins.
Les forçats vivaient dans des conditions très précaires, où planait la violence, l'arbitraire et l'odeur de la mort. Les insurgés de la Commune de 1871 y furent déportés par milliers. Parmi eux, l'institutrice et militante Louise Michel, qui passa sept ans (1873-1880) en Nouvelle-Calédonie.
Les statuettes restituées prenaient la poussière sur des étagères familiales lorsque Philippe Collin a fait le lien avec le bagne et son grand-père, en relisant des lettres dans lesquelles un certain "Gérard", détenu en Calédonie, demandait du matériel de peinture.
Le passionné d’histoire met un point d’honneur à retrouver l’identité exacte de l’artiste. "Ça m’a pris un an, mais c’est comme ça que j’ai découvert qu’il s’appelait Alexandre Gérard, que c’était un communard déporté à 18 ans, et qu’il avait fini ses jours en Calédonie, raconte Philippe Collin. Pour moi, retrouver son identité et faire en sorte que son œuvre soit exposée, c’est lui redonner son humanité".
-"Faire émerger cette histoire commune"-
Ce don de statuettes vient appuyer le dossier qu’entend déposer le gouvernement pour le classement du bagne calédonien au patrimoine mondial de l’Unesco. "C’est un plus, car nous avons les bâtiments, mais nous manquons de ces objets qui racontent ce moment de l’histoire, or c’est aussi ce que demande l’Unesco", indique Christophe Sand, archéologue, missionné par le gouvernement pour préparer la demande d’inscription.
La Calédonie se réapproprie progressivement cette partie de son histoire dans un pays où Kanak et Calédoniens blancs, pour beaucoup descendants de bagnards, sont souvent opposés.
"Aujourd’hui, c’est notre responsabilité de faire émerger cette histoire commune, estime Mickaël Forest, membre du gouvernement indépendantiste. Car le bagne c’est aussi l’histoire des Kanak et des autres communautés, ces mondes n’étaient pas aussi imperméables qu’on veut le croire".
"Les bagnards ont principalement représenté le monde kanak, souligne l’historien Louis Lagarde. Pourtant beaucoup ne l’ont vu qu’en images ou à travers de ce que des camarades qui ont pu sortir leur ont raconté. Mais ce que l’on remarque, c’est que jamais ils n’en ont fait des représentations grotesques ou caricaturales. C’était toujours une représentation du beau",
L’inscription du bagne calédonien au Patrimoine mondial ne serait pas une première. Celui d’Australie est classé depuis 2010 et regroupe une dizaine de site. Mais la Nouvelle-Calédonie n’en est qu’au tout début du processus. Si tout va bien, le dossier pourrait être présenté d’ici quatre ou cinq ans.
Petit-fils d’un médecin du bagne, Philippe Collin, professeur à la retraite féru d'histoire, a fait don à la Nouvelle-Calédonie de 27 personnages en terre séchée, achetés par son grand-père à un détenu entre 1910 et 1914.
Les statuettes d’une dizaine de centimètres de haut, en parfait état de conservation, représentent des scènes de la vie traditionnelle Kanak, comme le pilou (danse rituelle), ou des moments du quotidien.
"C’est ce qu’on appelait de la camelote, ces petits objets que les bagnards vendaient aux gardiens, médecins et autres notables, pour améliorer l’ordinaire", explique le président de l’association Témoignage d’un passé, gestionnaire du site historique de l’île Nou, consacré au bagne, où 21.000 prisonniers ont séjourné entre 1864 et le début des années 1920, dans les pénitenciers de Nouméa et de Bourail, sur la Grande Terre, et de l'île des Pins.
Les forçats vivaient dans des conditions très précaires, où planait la violence, l'arbitraire et l'odeur de la mort. Les insurgés de la Commune de 1871 y furent déportés par milliers. Parmi eux, l'institutrice et militante Louise Michel, qui passa sept ans (1873-1880) en Nouvelle-Calédonie.
Les statuettes restituées prenaient la poussière sur des étagères familiales lorsque Philippe Collin a fait le lien avec le bagne et son grand-père, en relisant des lettres dans lesquelles un certain "Gérard", détenu en Calédonie, demandait du matériel de peinture.
Le passionné d’histoire met un point d’honneur à retrouver l’identité exacte de l’artiste. "Ça m’a pris un an, mais c’est comme ça que j’ai découvert qu’il s’appelait Alexandre Gérard, que c’était un communard déporté à 18 ans, et qu’il avait fini ses jours en Calédonie, raconte Philippe Collin. Pour moi, retrouver son identité et faire en sorte que son œuvre soit exposée, c’est lui redonner son humanité".
-"Faire émerger cette histoire commune"-
Ce don de statuettes vient appuyer le dossier qu’entend déposer le gouvernement pour le classement du bagne calédonien au patrimoine mondial de l’Unesco. "C’est un plus, car nous avons les bâtiments, mais nous manquons de ces objets qui racontent ce moment de l’histoire, or c’est aussi ce que demande l’Unesco", indique Christophe Sand, archéologue, missionné par le gouvernement pour préparer la demande d’inscription.
La Calédonie se réapproprie progressivement cette partie de son histoire dans un pays où Kanak et Calédoniens blancs, pour beaucoup descendants de bagnards, sont souvent opposés.
"Aujourd’hui, c’est notre responsabilité de faire émerger cette histoire commune, estime Mickaël Forest, membre du gouvernement indépendantiste. Car le bagne c’est aussi l’histoire des Kanak et des autres communautés, ces mondes n’étaient pas aussi imperméables qu’on veut le croire".
"Les bagnards ont principalement représenté le monde kanak, souligne l’historien Louis Lagarde. Pourtant beaucoup ne l’ont vu qu’en images ou à travers de ce que des camarades qui ont pu sortir leur ont raconté. Mais ce que l’on remarque, c’est que jamais ils n’en ont fait des représentations grotesques ou caricaturales. C’était toujours une représentation du beau",
L’inscription du bagne calédonien au Patrimoine mondial ne serait pas une première. Celui d’Australie est classé depuis 2010 et regroupe une dizaine de site. Mais la Nouvelle-Calédonie n’en est qu’au tout début du processus. Si tout va bien, le dossier pourrait être présenté d’ici quatre ou cinq ans.