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La Face va ouvrir la première banque alimentaire du Fenua


La Face va ouvrir d'ici septembre une banque alimentaire sur Tahiti. Crédit photo : AFP.
La Face va ouvrir d'ici septembre une banque alimentaire sur Tahiti. Crédit photo : AFP.
Tahiti, le 24 avril 2024 – La fondation Agir contre l'exclusion (Face) va lancer, d'ici septembre, la première banque alimentaire du Fenua. Cette nouvelle structure va fonctionner sur le principe de la solidarité, en récupérant les invendus des grandes surfaces et grossistes, pour les redistribuer aux associations, comme la Croix-Rouge, aux épiceries sociales et aux différents services sociaux des communes. L'objectif étant de répondre plus rapidement aux urgences alimentaires rencontrées par les populations les plus pauvres.
 
“C'est un projet né d'un diagnostic fait par deux élèves de l'école Polytechnique, qui étaient venus, en 2021, faire un diagnostic pour nous, sur le gaspillage alimentaire en Polynésie”, dévoile Sylvain Pauwels, le directeur de la branche polynésienne de la fondation Agir contre l'exclusion (Face), à propos de l'ouverture d'une banque alimentaire au Fenua, d'ici septembre prochain sur Tahiti. “Les membres de la fondation Face, c’est-à-dire les chefs d'entreprises partenaires, ont trouvé pertinente l'idée d'enfin monter une aide de ce type. Surtout qu'au vu de la conjoncture économique actuelle, c'est une vraie nécessité.”
 
La construction d'une banque alimentaire, un système de solidarité qui existe depuis longtemps en métropole et dans les autres territoires d’outre-mer, sera inédite en Polynésie, malgré de nombreuses tentatives passées non abouties. Elle aura pour objectif de proposer des denrées alimentaires à des associations, comme la Croix-Rouge, aux épiceries sociales ou encore aux différents services sociaux des communes et les antennes de la Direction des solidarités, de la famille et de l'égalité (DSFE). “On va opérer comme un grossiste, on va redistribuer nos denrées alimentaires, mais on ne sera pas un acteur qui va redonner directement aux personnes”, nous confie Sylvain Pauwels. “Au départ, on pensait que les associations allaient être contre, car on marchait sur leurs plates-bandes, mais elles sont ravies. Elles n'auront plus besoin de se déplacer pour aller chercher les marchandises, si elles ont besoin de 200 kg de pâtes, on les amènera.”
 
Récupérer les invendus
 
La Face va donc enfiler le costume de grossiste alimentaire pour les différents services sociaux et associatifs. Des denrées qui seront, pendant les deux premières années, uniquement sèches. “Pour les deux premières années, nous allons faire que des denrées sèches (pâtes, riz, conserves...). C'est plus facile à stocker et donc plus simple pour mettre en route le projet. Mais on espère par la suite proposer des denrées fraîches, mais ça demande des investissements pour acheter des chambres froides et des réfrigérateurs”, explique Sylvain Pauwels. Ces aliments seront donnés par les grossistes et grandes surfaces, selon la loi du Pays créée en 2022, visant à “promouvoir l'effort de solidarité par le don des invendus”. Une loi qui oblige donc les magasins, grandes surfaces, mareyeurs, coopératives agricoles ou encore les grossistes, avec un chiffre d'affaires annuel supérieur à 200 millions de francs, à céder gratuitement leurs invendus à des associations, comme la future banque alimentaire de la Face. “Cela évite le gaspillage, au lieu de jeter, on récupère.”

Sylvain Pauwels, à gauche, et les jeunes en insertion de la Face dans les locaux de l'association. Crédit photo : Thibault Segalard.
Sylvain Pauwels, à gauche, et les jeunes en insertion de la Face dans les locaux de l'association. Crédit photo : Thibault Segalard.
Deux années de bail
 
“On avait commencé à travailler sur cette loi avec l'ancien gouvernement”, confie également le directeur de la fondation. Gouvernement, qui avait promis de mettre à disposition de la Face un bâtiment, comme c'est notamment le cas en Nouvelle-Calédonie, où l'OPT calédonien octroie gracieusement un hangar à la banque alimentaire locale, mais aucune proposition n'est finalement arrivée jusqu'à la Face. Une attente qui poussa le conseil d'administration de la fondation à enfin démarrer le projet, sans l'aide du gouvernement, quelques années plus tard. “Sinon, on se disait qu'on n'allait jamais lancer cette banque alimentaire. Donc on a trouvé nous-mêmes un bâtiment, on a d'ailleurs signé notre bail il y a peu. Le hangar sera situé à Arue, non loin de la mairie.” La Face va donc disposer d'un bâtiment de 250 m², avec une grande hauteur sous plafond, afin de stocker ses denrées alimentaires. Cependant, la fondation ne dispose que d'un bail précaire de deux années. “La nouvelle ministre des Solidarités (Chantal Galenon, NDLR) nous soutient. Elle trouve l'initiative géniale. On espère qu'elle nous trouvera un nouveau local avant la fin du bail, elle s'est engagée à ça. On croise les doigts, on y croit cette fois”, s'enthousiasme Sylvain Pauwels.
 
Par ailleurs, à l'issue de ces deux ans, la Face souhaite transférer la banque alimentaire à une autre association. “L'idée, ce n'est pas que nous la gardions au sein de la Face. Nous voulons qu'elle soit reprise par le territoire ou par une autre structure associative”, confirme Sylvain Pauwels. En effet, la fondation souhaite jouer un rôle d'incubateur de projets, et comme avec les précédentes initiatives qu'elle a déjà menées, elle souhaite laisser les clés du train lorsque celui-ci sera sur les rails et fonctionnera correctement.
 

La Face, association pour l'inclusion des jeunes

La Face, ou la fondation Agir contre l'exclusion, est une association reconnue d'utilité publique. Elle a pour objectif de lutter contre les formes d'exclusion, de discrimination et de pauvreté, notamment chez les jeunes. Créée en métropole par treize grands groupes économiques français, l'antenne polynésienne a été lancée en 2016 sous l'impulsion de trois grosses entreprises de la place. Elle réunit désormais des acteurs publics et privés, au nombre de 47, tels que la Socredo, la Banque de Polynésie, Total, Technival, Enviropol ou encore l'OPT et Vini.
 
Elle propose de nombreux services civiques à des jeunes issus de milieux défavorisés, afin de les insérer dans le monde professionnel tout en les accompagnant dans leur projet personnel. “L'insertion sociale, c'est notre cœur de métier. L'idée, c'est vraiment de donner à des jeunes des opportunités”, souligne Sylvain Pauwels, le directeur de la Face. La fondation est financée à 80% par les entreprises membres, les 20% restants sont des donations publiques.

Rédigé par Thibault Segalard le Jeudi 25 Avril 2024 à 06:00 | Lu 4104 fois