La CTC pointe "l'ampleur du travail dissimulé" dans la perliculture


Salarié dans une ferme perlière à Taha'a.
Tahiti, le 6 décembre 2021 – Le dernier rapport de la chambre territoriale des comptes sur le secteur de la perle en Polynésie française pointe du doigt "l'ampleur du travail dissimulé" dans la filière et demande un "plan de lutte" en urgence.
 
Le dernier rapport de la chambre territoriale des comptes (CTC) sur la politique sectorielle de la perliculture, dévoilé lundi dans ses grandes lignes par Tahiti Infos, s'est penché sur le sujet de l'emploi dans le secteur de la perle au fenua. Une partie spécifique du rapport qui débouche sur la première recommandation de la juridiction financière à l'égard de la collectivité : "Dès 2021, mettre en place un plan de lutte contre le travail dissimulé dans le secteur de la perliculture".
 
Perliculture : combien d'emplois ?
 
"Des emplois certains mais en partie dissimulés", titre la partie du rapport consacrée à cet épineux sujet. La chambre a tenté le comptage complexe du nombre de salariés dans le secteur de la perle. Elle explique que, selon la nomenclature de l'Institut de la statistique en Polynésie française (ISPF), les salariés de la filière perlicole n'ont pas de code permettant de les distinguer et sont comptabilisés avec les salariés de "l'aquaculture en mer". La chambre a donc retranché les effectifs des salariés de la crevetticulture et de la pisciculture –recensés par l'ISPF en 2019– pour dresser une estimation des postes salariés de la seule perliculture. En moyenne, ce chiffre tourne autour de 894 salariés par an sur la période 2015-2019. Il était auparavant bien supérieur et dépassait la barre des 1 000 entre 1997 et 2014, flirtant même avec les 2 000 salariés en 2000 et 2001.
 
Mais la juridiction précise que pour appréhender réellement les emplois générés par la perle, il convient d'ajouter à ce nombre de "salariés" celui des producteurs disposant de cartes professionnelles. Ils étaient au total 648 en 2020, qu'il s'agisse de titulaires de cartes de producteur d'huîtres perlières ou de cartes de producteurs de produits perliers.
 
Une situation "assumée par la collectivité"
 
Le chiffre global obtenu apparaît pourtant "particulièrement faible" au regard du nombre d'exploitations perlicoles en activités, des surfaces exploitées et du processus de production. Le rapport s'appuie sur les déclarations de la profession estimant nécessaire d'employer trois salariés pour un greffeur, sur un avis du Cesec de 2016 évoquant le chiffre de 3 000 emplois et sur les déclarations du président Édouard Fritch fin 2020 évoquant "peu ou prou 2 500 à 3 000 emplois". À mettre en balance avec le nombre de salariés déclarés pendant l'année Covid catastrophique de 2020 : 445 salariés déclarés dans le secteur aquaculture et perliculture…
 
"La chambre souligne l'ampleur du travail dissimulé au sein de la filière, dont il n'est pas possible en l'état de mesurer les effets économiques et sociaux", indique le rapport. Au minimum, plus de la moitié des travailleurs de la perle n'ont donc pas de contrat de travail, ni de protection sociale. "Sauf à être inscrit au régime de solidarité", précise la chambre, "et à contribuer au déséquilibre de la CPS". "Cette situation de fait est désormais assumée par la collectivité", conclut le rapport, citant les déclarations du président Édouard Fritch et de son ministre de l'Économie bleue Tearii Alpha fin 2020, et "dénoncée par une partie des perliculteurs". D'où l'urgence d'un plan de lutte contre le travail dissimulé dans la perliculture.
 

Rédigé par Antoine Samoyeau le Lundi 6 Décembre 2021 à 20:20 | Lu 2620 fois