L’inflation en question à Hao


Le café des créateurs organisé par l'Adie avait pour thème l'inflation qui touche aussi les îles éloignées. ©Teraumihi Tane
Hao, le 8 février 2023 – L'Adie organisait la semaine dernière une réunion à Hao sur le thème de l'inflation. Cette rencontre intitulée “café des créateurs” a réuni une trentaine d'entrepreneurs et consommateurs de l’atoll afin qu'ils échangent sur leurs préoccupations liées à leur éloignement. À l'issue des discussions, deux axes majeurs ont émergé pour faire face aux difficultés et préparer l'avenir : changer les modes de consommation et s'adapter à la digitalisation.
 
Avec la flambée des prix et un panier moyen qui ne cesse d’augmenter, les îles et atolls éloignés subissent à cause de leur isolement une inflation sans précédent. C’est à ce titre que l’antenne de l'Association pour le droit à l’initiative économique (Adie) via son agent Renaud Fleury, a mis en place une matinée "café des créateurs" jeudi à Hao, afin d’aborder la problématique de l’inflation avec les habitants de l’atoll. Une trentaine de particuliers, de commerçants, de patentés du secteur primaire, de coprahculteurs ont pris part aux débats.
 
La réunion s’est tenue à l’ancienne mairie. La matinée a débuté par un débat sur l’inflation suivie d'une formation sur la fixation des prix. Au cours des débats les commerçants étaient invités à expliquer pourquoi les prix dans leur magasin étaient si élevés. Ils ont ainsi détaillé comment les produits sont acheminés jusqu’à l’atoll, comment sont déterminés les prix ou encore à combien se montent leurs charges. Ces questions ont permis d’expliquer aux consommateurs que le commerçant ne peut pas absorber à lui seul toutes les augmentations. Une commerçante a d’ailleurs témoigné : “Les PPN [Produits de première nécessité, NDLR] ont également augmentés. Nous, commerçants ça va nous tuer ! Nous allons être obligés de nous tourner vers les PGN [Produits de grande consommation, NDLR], nous devons changer notre façon de consommer ! Il faut dire adieu à ce que le Pays met devant nos yeux.” Il était aussi question de faire comprendre aux petits patentés tels que les vendeurs en bord de route qu’ils doivent également augmenter leurs prix sous peine de ne plus faire de profit.

Adapter ses modes de consommation

Une trentaine de personnes ont participé au café des créateurs de l'Adie, jeudi à Hao, sur le thème de l'inflation. ©Teraumihi tane
De leur côté, les consommateurs ont exprimé leurs ressentiments par rapport à cette inflation, certes mondiale, mais qui dans les territoires éloignés fait augmenter les prix des matières premières comme le sucre, la farine, la viande et tous les dérivés. “On entend souvent que c’est la faute au Covid, mais le Covid ne doit pas être une excuse à tout. Pourquoi ne pas augmenter certains produits pour baisser les autres ? Le sucre, la farine et l’huile par exemple, ce sont des produits qui nous permettent de survivre et de confectionner nos produits locaux comme le firifiri, le ‘iti‘iti, le ‘īpō et beaucoup de faraoa locaux”, s’est interrogé Tuhoa, l'un des participants.

L'assemblée s'est aussi accordée sur l'importance d'adapter nos modes de consommation, afin d’acheter moins, en faisant par exemple son propre potager ou en pratiquant la pêche raisonnée. C'est ce qu'explique Ginette, une habitante de l'atoll : “Nous n’avons pas les matières premières, mais il faut faire attention à nos maigres ressources. Nous devons à tout prix gérer ce que l’on a déjà et ne pas tarir la source : L’agriculture consomme de l’eau, même s’il y a des aides, nous n’avons pas d’accompagnement concret sur notre territoire dans le domaine de l’agriculture et de la pêche. Si nous voulons atteindre une certaine autosuffisance le Pays doit nous écouter réellement.”
 
À l’issue de ce débat qui a permis de riches échanges, une formation a été dispensée par des professionnels du secteur sur la façon de fixer le juste prix. Les participants ont également eu accès à des informations diverses sur les cartes délivrées par la Chambre d’agriculture et de la pêche lagonaire, les patentes ou encore les déclarations d’impôts. Autant de données particulièrement utiles aux futurs et actuels patentés et porteurs de projets. À force de formations de ce type, les habitants de Hao prennent peu à peu conscience qu’ils doivent adapter leur mode de vie. Combiner une consommation raisonnée à une bonne maîtrise de l'outil informatique paraît incontournable pour l'avenir des habitants des îles éloignées.

Renaud Fleury, agent de l’antenne Adie à Hao :
“ Il nous faut être un atoll dynamique ”
 
“Aujourdhui l'important c’était d’informer la population sur les changements à venir, que ce soit au niveau de la patente, des déclarations ou de l’officialisation d’une activité. Voilà il y a du changement dans le pays et on doit s’y préparer. Il y a eu pas mal de monde. Ça fait plaisir de voir que les gens sintéressent à ce qui va changer et notamment la digitalisation. Aujourd’hui tout se passe sur internet. L’ambiance était cordiale questions, réponsse, débat… je pense qu’on est sur de bons rails. Pour l'avenir de l'atoll, il faut plus de petits producteurs, de petits commerçants dans un circuit court. Dans la réglementation, plus de digitalisation, cest-à-dire bien apprendre et maîtriser ces outils car aujourd’hui on ne peut plus y échapper. Il nous faut être un atoll dynamique.”

Rédigé par Teraumihi Tane le Mercredi 8 Février 2023 à 16:21 | Lu 955 fois