JEAN-PAUL BARBIER / AFP
Le Havre, France | AFP | vendredi 17/06/2022 - Après quelques années loin des projecteurs, les hydroliennes, qui utilisent les courants marins pour produire de l'électricité, font leur retour, portées par des développeurs convaincus et une promesse de baisse des coûts.
Au sud de l'Angleterre, au large de l'île d'Ouessant, ou bientôt dans le golfe du Morbihan, de lourds prototypes posés au fond de l'eau sont en train de faire leurs preuves, assurent ingénieurs et entrepreneurs, réunis au Havre pour le salon des énergies marines, Seanergy.
La France, avec deux courants surpuissants, le raz Blanchard à la pointe du Cotentin et le Fromveur dans le Finistère, a un potentiel de 4 gigawatts (GW) – un volume équivalent à quatre réacteurs nucléaires – et une ressource prédictible, contrairement au vent, plaident-ils. Le gisement mondial est évalué à 100 GW.
Mais pour passer à l'étape commerciale, les concepteurs doivent encore éprouver leurs modèles – matériaux, fabrication, profil des turbines, maintenance réduite... – puis les tester en fermes pilotes. Pour in fine réduire les coûts : l'hydrolien est encore à quelque 300 euros/MWh, quand l'éolien offshore est à 45-60.
"Le prix finira par baisser pour les mêmes raisons que dans l'éolien : effets d'échelle et puissance. On estime que dans le raz Blanchard on pourra être à 80-100 euros/MWh dès le premier gigawatt installé", dit Jérôme Le Moigne, directeur du développement de l'entreprise bretonne Sabella.
Au large d'Ouessant, Sabella fait tourner depuis deux ans par 35 m de fond une hydrolienne haute comme un immeuble (25 m), lestée par trois pieds en plomb, avec des pales plus courtes et plus lentes que celles d'une éolienne.
Elle s'apprête aussi à descendre deux machines, plus petites, dans les fonds agités du Golfe du Morbihan, site sensible et très fréquenté, où sont prévues des études d'impact sur l'environnement et la pêche.
Record mondial dans le Cotentin ?
Étape majeure pour la filière, deux fermes pilotes s'annoncent dans le raz Blanchard.
Le grenoblois HydroQuest, associé au producteur de renouvelables Qair, va y poser dès 2025 sept machines, pour 17,5 MW : "la plus puissante ferme pilote au monde", disent-ils.
Et au même endroit, quatre autres turbines seront installées dès 2024 par la société Simec Atlantis.
"Toutes ces turbines sont très différentes les unes des autres, il y a encore un foisonnement technologique", observe Nicolas Vaissière, d'EDF Hydro, qui accueille certains de ces pionniers sur son site d'essai de Paimpol-Bréhat. Un moyen aussi pour l'électricien d'"observer l'avancée de ces technologies, pour ensuite éventuellement se positionner", dit-il.
Car il y a un enjeu économique, et la compétition se profile, avec des Britanniques, des Coréens, des Canadiens particulièrement dynamiques.
Alors que l'Europe vise 1 GW d'hydrolien pour 2030, les opérateurs français voudraient retrouver le soutien de l'État, fortement réduit dans la foulée de la faillite en 2018 d'un acteur filiale de Naval Group.
Objectif : faire partie de la prochaine programmation énergétique de la France, et obtenir un prix garanti d'achat de l'électricité, comme les autres renouvelables en ont bénéficié à leur début, pour lancer la filière.
"La Grande-Bretagne est plus volontariste, on espère que la France va suivre", dit M. Le Moigne.
"On veut être plus autonome énergétiquement, l'hydrolien n'est pas la solution miracle mais fait partie du bouquet", dit le dirigeant, qui voit aussi des perspectives pour alimenter, et décarboner, des îles ou zones isolées du nord du Canada, des Philippines, Indonésie...
Les développeurs jurent des bienfaits environnementaux de leur technologie: pas de forage au sol, surface limitée (60 km2 pour l'ensemble du gisement français), pas de conflit d'usage ni d'impact paysager, oiseaux épargnés tout comme les mammifères marins du fait de la lenteur des rotors, disent-ils.
"Il faut absolument avancer sur l'hydrolien", estime pour sa part Élodie Martinie-Cousty, référente océans chez France nature environnement (FNE).
"Les gens imaginent un hachoir, mais pas du tout", poursuit-elle. "Là où il y a beaucoup de courant, les impacts sur l'environnement sont acceptables. Ils sont en tout cas moindres que ceux des chaluts qui raclent les fonds ou de centrales au fioul comme celle d'Ouessant".
Au sud de l'Angleterre, au large de l'île d'Ouessant, ou bientôt dans le golfe du Morbihan, de lourds prototypes posés au fond de l'eau sont en train de faire leurs preuves, assurent ingénieurs et entrepreneurs, réunis au Havre pour le salon des énergies marines, Seanergy.
La France, avec deux courants surpuissants, le raz Blanchard à la pointe du Cotentin et le Fromveur dans le Finistère, a un potentiel de 4 gigawatts (GW) – un volume équivalent à quatre réacteurs nucléaires – et une ressource prédictible, contrairement au vent, plaident-ils. Le gisement mondial est évalué à 100 GW.
Mais pour passer à l'étape commerciale, les concepteurs doivent encore éprouver leurs modèles – matériaux, fabrication, profil des turbines, maintenance réduite... – puis les tester en fermes pilotes. Pour in fine réduire les coûts : l'hydrolien est encore à quelque 300 euros/MWh, quand l'éolien offshore est à 45-60.
"Le prix finira par baisser pour les mêmes raisons que dans l'éolien : effets d'échelle et puissance. On estime que dans le raz Blanchard on pourra être à 80-100 euros/MWh dès le premier gigawatt installé", dit Jérôme Le Moigne, directeur du développement de l'entreprise bretonne Sabella.
Au large d'Ouessant, Sabella fait tourner depuis deux ans par 35 m de fond une hydrolienne haute comme un immeuble (25 m), lestée par trois pieds en plomb, avec des pales plus courtes et plus lentes que celles d'une éolienne.
Elle s'apprête aussi à descendre deux machines, plus petites, dans les fonds agités du Golfe du Morbihan, site sensible et très fréquenté, où sont prévues des études d'impact sur l'environnement et la pêche.
Record mondial dans le Cotentin ?
Étape majeure pour la filière, deux fermes pilotes s'annoncent dans le raz Blanchard.
Le grenoblois HydroQuest, associé au producteur de renouvelables Qair, va y poser dès 2025 sept machines, pour 17,5 MW : "la plus puissante ferme pilote au monde", disent-ils.
Et au même endroit, quatre autres turbines seront installées dès 2024 par la société Simec Atlantis.
"Toutes ces turbines sont très différentes les unes des autres, il y a encore un foisonnement technologique", observe Nicolas Vaissière, d'EDF Hydro, qui accueille certains de ces pionniers sur son site d'essai de Paimpol-Bréhat. Un moyen aussi pour l'électricien d'"observer l'avancée de ces technologies, pour ensuite éventuellement se positionner", dit-il.
Car il y a un enjeu économique, et la compétition se profile, avec des Britanniques, des Coréens, des Canadiens particulièrement dynamiques.
Alors que l'Europe vise 1 GW d'hydrolien pour 2030, les opérateurs français voudraient retrouver le soutien de l'État, fortement réduit dans la foulée de la faillite en 2018 d'un acteur filiale de Naval Group.
Objectif : faire partie de la prochaine programmation énergétique de la France, et obtenir un prix garanti d'achat de l'électricité, comme les autres renouvelables en ont bénéficié à leur début, pour lancer la filière.
"La Grande-Bretagne est plus volontariste, on espère que la France va suivre", dit M. Le Moigne.
"On veut être plus autonome énergétiquement, l'hydrolien n'est pas la solution miracle mais fait partie du bouquet", dit le dirigeant, qui voit aussi des perspectives pour alimenter, et décarboner, des îles ou zones isolées du nord du Canada, des Philippines, Indonésie...
Les développeurs jurent des bienfaits environnementaux de leur technologie: pas de forage au sol, surface limitée (60 km2 pour l'ensemble du gisement français), pas de conflit d'usage ni d'impact paysager, oiseaux épargnés tout comme les mammifères marins du fait de la lenteur des rotors, disent-ils.
"Il faut absolument avancer sur l'hydrolien", estime pour sa part Élodie Martinie-Cousty, référente océans chez France nature environnement (FNE).
"Les gens imaginent un hachoir, mais pas du tout", poursuit-elle. "Là où il y a beaucoup de courant, les impacts sur l'environnement sont acceptables. Ils sont en tout cas moindres que ceux des chaluts qui raclent les fonds ou de centrales au fioul comme celle d'Ouessant".