L’emploi au coeur d'un budget rigoureux de relance économique


Le vice-président de la Polynésie française, Nuihau Laurey, détaille les défis du budget 2014, jeudi 21 novembre 2013.
PAPEETE, jeudi 21 novembre 2013 - Le budget primitif 2014 sera le premier budget présenté par le gouvernement issu des élections du 5 mai dernier. Nuihau Laurey, vice-président et ministre du Budget répond aux questions de Tahiti infos au sujet d’un programme qui est désormais transmis aux représentants polynésiens.

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Le Président Flosse a parlé de "rigueur" pour évoquer la nature du projet de budget 2014. Quelle place y faites-vous à la relance ?

Nuihau Laurey : C’est un budget de rigueur et de relance. Rigueur, dans la continuité des mesures de réduction des dépenses publiques, engagées depuis le collectif budgétaire de juillet dernier. Relance, au travers d’investissements clairement identifiés qui vont nous permettre de redonner du souffle à l’activité économique et de créer des emplois. L’objectif principal est le retour de l’emploi.

Justement, 18,1 milliards pour financer ces investissements publics en 2014 suffiront-ils à insuffler la dynamique de relance souhaitée ?

Nuihau Laurey : C’est une étape, mais elle est essentielle. N’oublions pas qu’en 2012, nous étions à moins de 13 milliards de dépenses d’investissement. Nous prévoyons, pour ce budget 2014, de passer à 18 milliards. Cela constitue une importante augmentation de près de 40%. Nous voulons redonner du souffle aux entreprises qui vont nous accompagner dans ce retour à la croissance.

Ce programme est également qualifié de budget "d’urgence solidaire" avec l’affectation de près de 26 milliards au FELP en 2014 dont 22 destinés au RST et 3,25 milliards pour les actions en faveur de l’Emploi et la formation.

Nuihau Laurey : C’est un budget qui souhaite prendre en compte la détresse sociale d’une partie de la population, au travers de ce nouveau Fonds pour l’emploi et la lutte contre la pauvreté. Le FELP est destiné à donner plus de transparence dans l’affectation des moyens destinés au soutien solidaire et surtout dans l’utilisation de ces fonds.

Une participation "solidaire" est sollicitée de l’Etat : 1,2 milliard pour le Plan de départs volontaires dans l'administration et 3,6 milliards pour équilibrer le RST. Cette aide est-elle nécessaire à la réalisation du budget ?

Nuihau Laurey : Pour l’équilibre du RST, les 3,6 milliards qui sont sollicités ne sont pas intégrés dans le projet de budget, ni dans le FELP. C’est vrai qu’il s’agit d’un montant important ; mais il correspond au niveau d'intervention financière de l’Etat d’avant 2007 pour le financement du Régime de solidarité de Polynésie française. Cette contribution a été interrompue depuis, alors que les dépenses du Régime ont considérablement augmenté. Ce qui fait qu’aujourd’hui, la part relative de l’Etat serait beaucoup plus faible qu’en 2007. Ce retour au financement du RST est sollicité auprès de l’Etat. La mission de l’IGAS (Inspection générale des affaires sociales, NDLR) est attendue en Polynésie le 6 décembre. Elle durera deux semaines et devrait rendre ses résultats dans le courant de la fin janvier. Nous espérons qu’en 2014 l’Etat participe de nouveau au financement partiel du RST, dans le cadre de la solidarité nationale.
Quant à une contribution financière de l’Etat au Plan de départs, il s’agit d’un point en discussion depuis très longtemps. Nous avions déjà inscrit au collectif budgétaire de juillet 2013 une dotation de 800 millions pour dédommager les volontaires au départ dans l'administration. Celle-ci comprenait une participation de 50% de l’Etat à hauteur de 400 millions. Nous sommes donc dans la continuité de ce dispositif. Et l’Etat devra se prononcer au sujet de cela, sachant qu’il a toujours souhaité qu’une réduction de la masse salariale du Pays soit engagée au travers d’un Plan de départs. Nous sommes dans la cohérence avec le discours de l’Etat.


Concernant le montant de l’encours sur le budget général, vous avez annoncé qu’il serait "inférieur à 90 milliards" en fin d’exercice alors que le Pays prévoit d’emprunter 7,7 milliards en 2014 et que la dette de la collectivité devrait être de 89 milliards fin 2013.

Nuihau Laurey : Nous empruntons 7,7 milliards et dans le même temps nous avons prévu de rembourser 8,4 milliards. On nous a accusés de vouloir nous endetter par centaines de milliards auprès de tous les pays du monde. Nous montrons, au travers de ce budget primitif 2014, que nous souhaitons maîtriser notre niveau d’endettement. Sur l’exercice, nous ne dépasserons pas 90 milliards.
Mais si dans le courant de l’exercice nous avons des projets susceptibles de créer de l’activité et de l’emploi, nous n’excluons pas de revoir ces dispositions, au travers d’un collectif. Et exclusivement pour des projets productifs, dont la plupart peuvent être financés par le secteur privé dans le cadre de la loi sur les partenariats Public-Privé. Pour l’instant, dans le projet de budget 2014, nous sommes sous un plafond de 90 milliards.


8,4 milliards de remboursement en capital de la dette seront financés grâce à un excédent de 10,6 milliards de la section de fonctionnement. Comment réalisez-vous cet excédent ?

Nuihau Laurey : Dans l’équation budgétaire nous dégageons un autofinancement brut de 10,6 milliards dont 8,4 milliards sont destinés au remboursement de la dette et 2,2 milliards d’autofinancement net pour une partie de nos investissements. Cet équilibre – puisque c’est la première fois depuis longtemps que l’on retrouve du souffle pour payer normalement nos dettes et financer une partie de nos investissements – on le réalise grâce à deux éléments essentiels : la réforme fiscale, un élément important qui a demandé beaucoup de courage politique ; et toutes les économies réalisées au niveau de la réduction des dépenses publiques. Ces deux éléments nous permettent de dégager cet excédent. Il ne faut pas oublier que le budget 2012 a trouvé son équilibre grâce à une dotation exceptionnelle de l’Etat de près de 6 milliards renforcé par un emprunt auprès de l’AFD (Agence française de développement, ndlr).
En 2014, nous empruntons pour financer des investissements. Et l’avance de trésorerie de 5 milliards ne sert pas à payer des investissements mais à rembourser les dettes laissées par les gouvernements précédents : plus de 7 milliards de dettes envers les communes ; plus de 4 milliards auprès des entreprises ; et une situation de trésorerie qui n’était plus soutenable. Cette avance de trésorerie devra être faite avant la fin de l’exercice 2013 et fera l’objet d’un collectif modificatif de l’exercice en cours.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Jeudi 21 Novembre 2013 à 13:06 | Lu 886 fois