L'appétit insatiable des Chinois pour le lait infantile et le miel australiens


Les consommateurs chinois en quête de qualité sont en train de faire la fortune des producteurs australiens de lait pour bébé, de vitamines ou de miel, une aubaine pour une économie australienne en mutation avec la fin de l'âge d'or minier.
Avec l'explosion de son pouvoir d'achat, la classe moyenne chinoise, refroidie par une série de scandales alimentaires, a désormais les moyens d'être exigeante. Conséquence: le cours des actions de certains groupes agroalimentaires australiens s'envole, comme leurs bénéfices.
"Le pouvoir d'achat des consommateurs chinois a explosé grâce à trois décennies de croissance exceptionnelle", explique à l'AFP Angus Nicholson, analyste chez IG Markets à Sydney.
"Et l'intérêt pour les marques étrangères, de qualité, a augmenté du fait des affaires qui ont pu éclater, notamment dans les domaines de l'alimentation, de la santé et des produits médicaux."
L'économie australienne est en train de s'adapter elle-même aux mutations de l'économie chinoise.
Pendant des décennies, l'Australie a profité à plein de l'appétit de la Chine -son premier partenaire commercial- pour son charbon ou son minerai de fer.
Mais la Chine cherche aujourd'hui une transition entre un modèle dépendant de l'industrie lourde et une croissance alimentée par les services comme par la consommation des ménages. Et les géants miniers australiens tirent la langue.

- La propolis repousse le koala -

L'agroalimentaire australien capitalise en revanche sur le pouvoir d'achat grandissant des Chinois, qui ne salivent pas que devant le boeuf et le lait UHT de l'île-continent.
En 2015, l'action de Bellamy's Australia, dont le lait infantile bio est surnommé "l'or blanc", a progressé de 700% tandis que le bénéfice net du groupe décollait de 325% au second semestre. Son concurrent a2 Milk Company connaît une trajectoire similaire.
Blackmores, un fabricant de suppléments vitaminiques, a vu son titre prendre plus de 534% en 2015. Capilano, premier producteur australien de miel, fait un malheur en Asie et ses bénéfices nets s'en ressentent: +52,9% au second semestre.
Les consommateurs chinois "se disent que si le lait en poudre est bu par les bébés australiens, il ne peut qu'être bon pour leurs bébés", explique Benjamin Sun, consultant chez ThinkChina.
Submergées par la demande, les deux premières chaînes de supermarchés en Australie, Coles et Woolworths, ont été obligées de limiter le nombre de boîtes de lait que chaque consommateur pouvait acheter.
Sur les étals des magasins de souvenirs, les peluches de koala ont même dû faire une place au lait pour bébé, au miel de manuka, à la gelée royale ou à la propolis, une résine produite par les abeilles pour protéger la ruche.
Pour se procurer ces trésors, les Chinois comptent notamment sur les "daigou", ces intermédiaires qui font les achats pour eux, moyennant une commission, et qui peuvent être des étudiants ou des hommes d'affaires. Ils seraient entre 5.000 et 10.000 en Australie.

- 'L'enfant à six poches' -

Utiliser les services d'un "daigou" peut doubler le prix du produit. Mais les consommateurs chinois ne semblent pas s'en soucier, ce qui s'explique en partie par trois décennies de politique de l'enfant unique.
"Les personnes nées dans les années 1980 ont aujourd'hui un bébé", explique M. Sun. "Aujourd'hui, ce n'est pas seulement un enfant unique, mais aussi un petit-enfant unique."
"Ce qui veut dire que la famille élargie aux grands-parents peut subvenir aux besoins d'un seul enfant. C'est pour cela que nous l'appelons l'enfant à six poches."
A la tête de "Mr Vitamins", une chaîne de compléments vitaminiques à Sydney, Peter Barraket explique qu'il envisage désormais d'assurer lui-même le transport maritime de ses produits vers la Chine.
Il réfléchit également à lancer ses produits sur Tmall Global, plateforme de vente directe aux consommateurs du géant chinois Alibaba. Mais, explique-t-il, il faut auparavant s'assurer que la production peut suivre.
"Pour l'instant, nous ne pouvons répondre qu'à notre demande actuelle", explique à l'AFP cet ancien cadre de Blackmores.
"Je suis en train de négocier avec les fabricants parce qu'il faudra être certains d'avoir des stocks quand nous lancerons les campagnes de publicité."

Rédigé par RB le Lundi 29 Février 2016 à 05:04 | Lu 1631 fois