L’appel de l’affaire Haddad-Flosse jugé au fond en avril


Gaston Flosse et Hubert Haddad, au palais de justice de Papeete en septembre 2012, lors du procès en correctionnelle de l'affaire dite des annuaires de l'OPT
PAPEETE, 8 janvier 2015 – L’affaire Haddad-Flosse dite des annuaires de l’OPT est renvoyée d’office pour être évoquée en appel au fond le 15 avril prochain. L’avocat de Gaston Flosse, lourdement condamné en première instance, évoque une "procédure abracadabrantesque".

L’affaire Flosse-Haddad devait être évoquée en appel sur citation directe du parquet général de Papeete jeudi prochain, 15 janvier. Mais l’audience est renvoyée d’office du 15 au 17 avril prochains, pour une évocation au fond. La cour sera présidée par le juge Robert Blaser, président de chambre de la cour d’appel de Papeete.

Dans cette affaire de corruption Gaston Flosse, Hubert Haddad, Geffry Salmon, Melbas Ortas, Alphonse Teriierooiterai, Noa Tetuanui, Emile Vernaudon et Simon Benichou avaient sévèrement été sanctionnés en correctionnelle, au mois de janvier 2013. Puis en appel, le 24 juin 2014, ce jugement avait été annulé pour une question de procédure en même temps que l'ordonnance renvoyant tous les prévenus en justice.

Mais le parquet général de Papeete, après avis de la direction des affaires criminelles et des grâces a, le 18 septembre dernier, adressé une citation directe aux appelants pour "permettre à la chambre des appels correctionnels de vider sa saisine en évoquant et statuant au fond, conformément aux dispositions de l’article 520 du code de procédure pénale".

Me François Quinquis
Dans cette procédure Gaston Flosse joue son avenir politique. Condamné en première instance, le 15 janvier 2013, à 5 ans d’inéligibilité pour trafic d’influence passif et corruption active, le leader autonomiste polynésien est exposé au risque d’avoir à purger une nouvelle peine d’inéligibilité avant même d’avoir accompli celle de trois ans qui le pénalise jusqu’en juillet 2017. Et une nouvelle condamnation à de l’inéligibilité avant 2018, le contraindrait à ne plus participer à un scrutin électoral avant l’âge de 91 ans, en 2023.

L’avocat de Gaston Flosse parle d'"une procédure abracadabrantesque" et conteste la validité même de la citation directe qui vaut à cette affaire de revenir prématurément dans le calendrier judiciaire du Vieux Lion. Interview :

Ne pas évoquer cette affaire en appel sur le fond, n’est pas cependant se rendre coupable pour la justice d’un déni de justice ?

Me Quinquis : En juin dernier la cour d’appel a répondu aux moyens soulevés par la défense. Ils consistaient à dire que l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel était entachée de nullité. Le tribunal correctionnel n’ayant pas cru devoir faire droit à cette demande, la cour d’appel s’est contentée de rendre une décision conforme au code de procédure pénal. Il prévoit que, d’une part, tout justiciable a le droit de connaitre les raisons pour lesquelles il est jugé – ce qui n’était pas le cas dans l’ordonnance de renvoi, au moins pour M. Gaston Flosse –, et que d’autre part, toute personne renvoyée devant un tribunal correctionnel, à l’issue d’une procédure pénale, doit avoir été mis en examen au préalable et avoir eu la possibilité de s’expliquer sur ses chefs de mise en examen – ce qui, pour partie, n’avait pas non plus été le cas en ce qui concerne M. Gaston Flosse.
De sorte qu’aujourd’hui je suis amené à vous dire que la cour ayant renvoyé la connaissance de l’affaire au ministère public pour que celui-ci saisisse de nouveau le juge d’instruction, le parquet ne pouvait pas refaire une citation directe devant la cour en traficotant les chefs de renvoi de M. Gaston Flosse devant les juridictions pénales. Son office était d’exécuter l’arrêt de la cour d’appel et de renvoyer la totalité de l’affaire à la connaissance du juge d’instruction.
En ne procédant pas comme cela, le parquet a selon moi entaché sa prise de position d’une double erreur de droit. La première lorsqu’il estime qu’il appartient à la cour d’appel de vider sa saisine (…). La deuxième erreur, c’est que si le parquet estime que la cour devait évoquer le fond de l’affaire en juin 2014 et qu’elle ne l’a pas fait, c’est que la cour elle-même a commis une erreur de droit. Dans ce cas, le parquet général disposait alors d’un délai pour former un pourvoi en cassation. Ne l’ayant pas fait, cet arrêt est définitif
.

D’où vient dans ce contexte que l’affaire soit finalement renvoyée pour être évoquée au fond le 15 avril prochain, sur décision de la cour d’appel de Papeete ?

Me Quinquis : Je ne lis pas dans une boule de cristal. Mais si la cour évoque le fond, je pense qu’elle fera une erreur puisqu’elle n’est pas valablement saisie. A mon sens, au mois d’avril prochain la cour devrait constater que sa nouvelle saisine est irrégulière et par voie de conséquence rejeter les demandes du parquet.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Jeudi 8 Janvier 2015 à 16:48 | Lu 3824 fois