L'ONU célébrée sans le président du Pays


Tahiti, le 24 octobre 2023 – Pour la première fois, le drapeau de l'ONU a côtoyé ceux de la Polynésie française, de la France et de l'Europe ce mardi à Tarahoi pour célébrer la Journée des Nations Unies. Une journée marquante pour le président de l'assemblée Antony Géros qui a apprécié la présence du haut-commissaire mais regretté l'absence du président du Pays en déplacement à Raiatea.
 
 
“Depuis le 17 mai 2013, je m'étais promis qu'on allait lever les drapeaux de manière plus transparente et ouverte. C'est chargé d'émotion qu'on l'a fait ce matin puisque notre président était parmi nous, monsieur Temaru. Il est à l'origine de toute la démarche que nous avons entreprise pour arriver aujourd'hui à une reconnaissance multilatérale des actions des Nations Unies dans le monde, et notamment en faveur de la décolonisation”, a déclaré Antony Géros, la voix chargée d'émotion ce mardi matin.

À l'initiative de cet événement qui marque l'anniversaire de l'entrée en vigueur de la Charte des Nations Unies en 1945, le président de l'assemblée a “salué et remercié” la présence du haut-commissaire Éric Spitz, de la présidente du Cesec Voltina Dauphin, et du gouvernement représenté par Chantal Galenon.
 
“Je regrette un peu son absence”
 
Mais il y avait un grand absent : le président du Pays, Moetai Brotherson dont le discours était pourtant bel et bien prévu et inscrit au programme de cette journée. “Je regrette un peu son absence. Je pense qu'il avait d'autres urgences et priorités qui l'ont contraint à se faire remplacer pour cet événement”, a réagi Antony Géros, visiblement déçu. Le président Brotherson a en effet préféré se rendre à Raiatea, avec les autres ministres de son gouvernement pour un conseil des ministres délocalisé... qui ne doit pourtant se tenir que le lendemain, mercredi.
Interrogée sur cette absence et sur le choix de ce calendrier, la ministre du Logement Chantal Galenon semblait un peu gênée : “Oui je ne ferai pas de commentaire là-dessus... c'est le choix du président du gouvernement et moi je suis là pour le représenter. Cette date était prévue depuis longtemps et comme vous savez l'importance des tāvana à nos yeux, le président a préféré retenir et ne pas repousser.” C'est donc elle qui a prononcé un discours après ceux d'Antony Géros, de Voltina Dauphin et d'Éric Spitz.
 
Des discours en décalage avec les thématiques
 
Un discours qui tranchait avec les précédents qui étaient essentiellement axés sur les valeurs consignées dans la Charte des Nations Unies en matière de droit de l'Homme et de libertés fondamentales. Chantal Galenon qui était déjà à New York avant même la réinscription de la Polynésie française sur la liste onusienne des pays à décoloniser est en effet la seule à avoir abordé la position de la France à l'ONU. Estimant que “le dialogue” avait été “renoué”, elle a appelé de ses vœux la France à participer davantage aux travaux du comité des 24. “Mon appel c'était surtout de demander à la France d'éviter qu'on nous retire de la liste onusienne des pays à décoloniser comme ils le font à chaque fois”, a-t-elle expliqué.

“Un peu hors sujet” pour le haut-commissaire qui préfère mettre en avant les valeurs polynésiennes de “partage, d'amour, et d'entraide” que la France serait bien inspirée de “prendre comme exemple”. “C'est la Journée mondiale de l'Organisation des Nations unies il ne faut pas se tromper”, a abondé Antony Géros qui a néanmoins placé la décolonisation au centre des thèmes abordés pendant cette journée.

Si la décolonisation et l'accession à l'indépendance n'ont pas été évoquées dans ces trois discours, on aura en effet noté le décalage avec les thématiques abordées sur les panneaux affichés dans le hall de l'assemblée, et dans la conférence publique qui se tenait dans l'hémicycle avec par exemple : “Les Nations Unies et la décolonisation dans le Pacifique”, “Nations Unies et décolonisation : le rôle prophétique de l'Église”, “2013-2023 : Bilan d'étape de 10 années de réinscription de la PF à L'ONU” ou encore “L'approche de la décolonisation : vers un programme de travail”.

Éric Spitz : “On ne fait qu'un ici”

crédit photo SD
 
C'était important pour vous d'assister à cette journée ?
“Oui c'était la célébration de la journée de la paix et nous vivons des moments tellement cruels au Proche-Orient et en Europe… Je crois qu'il était important de réaffirmer un certain nombre de valeurs que la France partage et affirme haut et fort avec la Polynésie.”
 
C'est un moyen aussi de sensibiliser les Polynésiens aux conflits mondiaux qui peuvent nous paraître assez lointains ?
“On croyait être à l'abri en Europe depuis bien longtemps de tous ces conflits et il ne faut jamais s'endormir. On ne sait jamais ce qui peut se passer. Il est vrai que la société polynésienne est encore porteuse de valeurs de partage, d'amour, et d'entraide. On ne fait qu'un ici. Ce sont des valeurs qui se sont un peu perdues en Métropole et je crois que la Métropole pourrait bien prendre la Polynésie comme exemple.”
 
La ministre Chantal Galenon a appelé de ses vœux l'État à participer davantage aux travaux du comité des 24 à l'ONU.
“Vous l'avez noté, aussi bien le président de l'assemblée de la Polynésie française que la présidente du Cesec ont fait la même chose que moi. Nous avons parlé de paix dans le monde. Je pense qu'aujourd'hui, de parler de ce sujet était un peu hors sujet.”

Rédigé par Stéphanie Delorme le Mardi 24 Octobre 2023 à 14:22 | Lu 2546 fois