L'Ademe au front pour la réduction des déchets


La réduction de l'utilisation du plastique est au coeur de tous les débats. (Photo : Fenua Ma)
Tahiti, le 4 septembre 2023 - L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) organisait, lundi dans les locaux de la CCISM, une visio-conférence réunissant différents acteurs du Pacifique œuvrant pour la protection de l'environnement, spécialisés dans la problématique des déchets liés aux emballages. L'occasion pour les différents protagonistes d'échanger leurs expériences, mais surtout de préparer la semaine européenne de la réduction des déchets (Serd) du 18 au 26 novembre prochains.
 
Le tri et le recyclage, aussi bénéfiques et nécessaires soient-ils, ne présentent plus une solution suffisante à la surconsommation d'emballages divers. Aujourd'hui, en Polynésie française, un tiers du volume des déchets récoltés dans nos bacs gris provient de ces emballages, bien souvent à usage unique. Enfouis ou exportés, la gestion de ces déchets reste une réelle problématique pour les différentes autorités compétentes. Pour l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), l'heure est plus que jamais à la prise de conscience.
 
Et pour ce faire, chaque année, au mois de novembre, l'organisme coordonne la semaine européenne de la réduction des déchets (Serd) sur les différents territoires français. Un “temps fort” de mobilisation au cours de l'année qui a pour vocation de mettre en lumière et encourager les “bonnes” pratiques de production et de consommation. Concrètement, l'événement rassemble différents porteurs de projet qui mettent en place des animations afin de sensibiliser à la prévention des déchets les cibles choisies. En 2022, la Serd a proposé à travers le monde plus de 16 000 animations, dans 30 pays différents, dont près de la moitié dans les territoires français. La Serd est également l'occasion pour ces derniers de décrocher des labels français, ou européens, dans le secteur de l'environnement.
 
L'Ademe prépare ses porteurs de projet
 
Et ce lundi, dans les locaux de la CCISM, l'Ademe a rassemblé ces porteurs de projet autour de tables rondes afin de discuter, en amont de la Serd et des problématiques liées aux déchets issus des emballages. Le but étant de trouver des solutions et d'engager des actions concrètes dans un futur proche, si possible durant la Semaine européenne de réduction des déchets, fin novembre prochain. “Le changement, il doit venir de tout le monde. Hélas ce n'est pas évident de faire prendre conscience à la population de l'ampleur des enjeux. C'est pourquoi nous nous attaquons dans un premier temps aux différents acteurs économiques, ou socio-économiques, pour qu'ils impulsent cette prise de conscience dans le cadre d'actions concrètes”, déclarait l'Ademe.
 
Collectivités territoriales, entreprises, associations ou particuliers, étaient donc invités à débattre autour de trois thématiques, à commencer par “réduire et refuser les emballages”. L'Ademe insiste sur la sensibilisation au refus des produits jetables, tels que les couches ou la vaisselle en plastique par exemple, mais également sur le suremballage. Puis il a été question “d'éco-concevoir les emballages”. Une incitation pure et simple à la production vertueuse d'emballages fabriqués localement, réutilisables, biodégradables, ou comestibles. Et enfin, il a été question de “réutiliser et réemployer les emballages”, en incitant à la mise en place de consigne, ou encore à la sensibilisation au surcyclage des emballages. Et les porteurs de projet ont pu s'inspirer fortement des diverses interventions des acteurs du développement durable dans le Pacifique, lors d'une séance de visio-conférence avec Wallis-et-Futuna, la Nouvelle Calédonie et la Métropole.
 
Tahiti leader potentiel de l'éco-conception
 
Face à la problématique de la gestion des déchets issus des emballages, les différents territoires français du Pacifique sont soumis aux mêmes contraintes : enfouir ou exporter. Toutefois, chacun y apporte des solutions différentes. À l'exemple de Wallis-et-Futuna, qui privilégie une logique participative, en sensibilisant notamment la population locale sur le lien étroit entre les déchets et les enjeux de santé publique. En effet, la collectivité met en avant l'interdiction des sodas et l'utilisation de carafes d'eau lors des événements publics afin de limiter les déchets, ainsi que le sucre, et donc le diabète, qui représente un véritable fléau dans la région.
 
En Nouvelle Calédonie, les autorités locales en matière de protection de l'environnement se rapprochent directement des différents acteurs économiques, et notamment les grosses sociétés, afin d'établir une réglementation sur les différents types d'emballages utilisés. Il est notamment question d'établir une taxe d'écocontribution, afin de dissuader l'achat de certains produits aux emballages nocifs. Le Caillou mise également sur l'importance de la revalorisation de certains déchets et la création de nouvelles filières économiques. Une économie circulaire, par définition, profitable à tous.
 
En Polynésie française, l'éco-conception a trouvé ses adeptes. Spécialisées dans la fabrication de contenants biodégradables, les sociétés Biobase Tahiti et Āu'a Tahiti forcent le respect de nos voisins du Pacifique, ainsi que de la métropole. Kihi Tuiho, gérante de l'entreprise Āu'a Tahiti, spécialisée dans la conception de vaisselles en coco, témoigne : “Il n'y a pas de chemin établi, ou de méthode clé en main, dans ce genre d'activité. On a dû faire face à nombreux problèmes de logistiques, d'approvisionnement etc. Mais nous avons réussi à trouver des machines adéquates, des fournisseurs, des artisans, et aujourd'hui nous avons à cœur de mettre en avant chaque maillon de la chaîne de production. C'est une valeur que nous défendons.” En tant que précurseurs, le plus dur est de ne pas se décourager et continuer malgré tout : “Dans ce genre de projets, il y a beaucoup d'échecs. Si le chemin emprunté n'est pas le bon, il faut malgré tout garder en tête l'objectif et s'adapter”, explique Ayana Champot, co-gérante de la société Biobase Tahiti, spécialisée dans la conception de sac en fibre de bananier. De plus, ces structures restent limitées, dans l'état actuel des choses, et une industrialisation de masse de ces processus n'est pas à l'ordre du jour.
 
Pourtant, Benoît Layrle, directeur de Fenua ma, l’a rappelé lors de son intervention : “Aujourd'hui nous recevons à l'année, 8 500 tonnes de déchets à trier. Nous en exportons 7 000, et donc 1 500 tonnes restent sur le territoire. L'enfouissement, restant la méthode la moins onéreuse pour l'entreprise par rapport à l'exportation de ces déchets… le choix est vite fait.” Un casse-tête qui attend toujours de meilleures solutions. Autant dire que les porteurs de projet sont très attendus pour cette édition 2023 de la semaine européenne de la réduction des déchets, qui se tiendra du 18 au 26 novembre prochain.   
 

Rédigé par Wendy Cowan le Lundi 4 Septembre 2023 à 20:16 | Lu 1511 fois