L’APC valide le renforcement de la concurrence dans la téléphonie mobile


Tahiti, le 20 décembre 2023 - La Direction générale de l’économie numérique vient de proposer les tarifs d’interconnexion sur les réseaux mobiles pour les années 2024 et 2025. Des tarifications qui plaisent à l’APC qui y voient un renforcement de l’équité entre les opérateurs et un gain dans la concurrence sur le marché.
 
Le 28 novembre dernier, conformément aux engagements pris, le président de la Polynésie française, Moetai Brotherson, a saisi l’Autorité polynésienne de la concurrence pour qu’elle apport son expertise sur les tarifs de référence d’interconnexion de téléphonie mobile entre Viti, Vini et Vodafone, proposés par la Direction générale de l’économie numérique (DGEN). Cet avis devrait servir de base de travail à une harmonisation des tarifs pratiqués par les opérateurs sur les prestations d’acheminement d’appels (voix ou SMS) fournie par un opérateur vers un autre auquel il est interconnecté pour les deux prochaines années.

“Concrètement, explique l’Autorité polynésienne de la concurrence, l’opérateur facture les appels ou SMS entrants (passés par le client d’un autre opérateur vers l’un de ses clients), pour compenser le coût de cette terminaison d’appel qui est acheminée sur son réseau mais pour laquelle il ne perçoit aucun revenu, ni de son client (qui reçoit l’appel), ni du client de l’autre opérateur.” Une méthodologie mise en place afin d’éviter que l’opérateur historique soit tenté de surfacturer le service à ses concurrents, avec des effets préjudiciables sur le niveau des tarifs et une évolution des parts de marché ne résultant pas des seuls mérites commerciaux des opérateurs.

L’APC s’était déjà saisi pour partie du dossier concernant les facturations de SMS entre les opérateurs en juin 2023, là encore à la demande du Pays, et avait critiqué la proposition du gouvernement de mettre en place des tarifs d'interconnexion sur les SMS à 0 franc pour Onati et Vodafone, et 0,18 franc pour Viti. Une solution qui pénalisait Vodafone et le privait d’une recette potentielle de 2,7 millions de francs par an.

Des tarifs dégressifs

Dans le cadre de la fixation des tarifs d’interconnexion pour les deux prochaines années, le gouvernement relaie la proposition de la DGEN d’une tarification d’appel à la minute, d’un opérateur à un autre, à hauteur de 0,49 franc pour Onati, 2,38 francs pour Vodafone et 16,13 francs pour Viti en 2024 et de 0,46 franc pour Onati, 2,12 francs pour Vodafone et 10,18 francs pour Viti. Une tarification bien moindre est proposée pour les SMS à raison de 0,00013 franc pour Onati, 0,02590 franc pour Vodafone et 0,3204 franc pour Viti en 2024 et 0,00013 franc pour Onati, 0,02943 pour Vodafone et 0,19015 franc pour Viti en 2025.

C’est sur ces propositions de tarifs d’interconnexion que l’APC a été invitée à donner son avis. Un avis qui s’arrête d’ailleurs uniquement sur l’effet libre-concurrentiel des tarifs proposés puisque n’appartient pas à l’Autorité – qui n’est pas le régulateur du secteur et dont ce n’est pas la mission – de se prononcer sur les propositions tarifaires chiffrées.

Aussi, sur les prestations d’itinérance, l’APC se félicite de la réintégration des prestations d’itinérance aux coûts des opérateurs alternatifs qui apparait “favorable à l’exercice d’une concurrence non faussée” entre l’opérateur historique et les autres opérateurs “dont la couverture du réseau est faible”, et “dont les obligations de déploiement sont progressives”.

En effet, moins le réseau d’un opérateur est étendu, plus il a besoin de recourir à l’itinérance afin de pouvoir offrir des prestations à ses clients sur la totalité du territoire polynésien.

De fait, la proposition tarifaire de la DGEN apparaît aux yeux de l’Autorité polynésienne de la concurrence comme un renforcement de “l’exercice d’une concurrence non faussée entre les opérateurs”.

Les dix recommandations de l'APC

En marge de son avis sur les tarifs d’interconnexion, l’Autorité polynésienne de la concurrence a formulé 10 préconisations afin d’aider le service de téléphonie mobile à se développer, dans un cadre naturellement concurrentiel, que l’on soit jeune ou ancien opérateur.
1. Le régulateur polynésien doit procéder à un examen régulier (au moins sur une base annuelle) de la pertinence des outils utilisés, ainsi que leur possible assouplissement dans le temps, pour tenir compte des marchés récemment ouverts à la concurrence.

2. Il est recommandé que la fixation des TRI TAM “Voix” et SMS soit revue de manière annuelle plutôt que bisannuelle.

3. S’écarter davantage du tarif “théorique” issu du modèle pour établir des tarifs asymétriques, mais plus bas, afin de ne pas pénaliser de manière excessive les opérateurs présentant un solde déficitaire et de favoriser des offres d’abondance.

4. Opter pour un modèle permettant des coûts plus bas.

5. Sortir du modèle de coût et opter pour une approche explicite de réduction progressive des tarifs, en s’inspirant des tarifs pratiqués sur des marchés équivalents.

6. Effectuer des simulations de rentabilité en distinguant – en fonction des parts de marché des opérateurs – trois zones : peu denses nécessitant un soutien public ; peu denses, rentables pour un ou deux opérateurs, mais pas les trois, et nécessitant la mise en commun d’infrastructures ; concurrentielles, avec trois opérateurs.

7. Mise en œuvre d’un dispositif de transmission d’informations régulières (au moins sur une base annuelle) et précises de la part des opérateurs sur les flux, les usages et leur position sur le marché.

8. Opter pour un modèle de coût permettant d’obtenir des tarifs plus bas.

9. Mettre en place un dispositif de transmission d’informations régulières et précises de la part des opérateurs sur les flux, les usages et leur position sur le marché et assurer la mise en œuvre effective d’un observatoire pour assurer leur traitement.

10. Envisager la mise en place d’une régulation indépendante des télécommunications.

Rédigé par Bertrand PREVOST le Mercredi 20 Décembre 2023 à 18:46 | Lu 3907 fois