Juillet 2018 dans le rétro : affaire d'ice, procès de Pouvana'a a O'opa, défiscalisation nationale pour Natitua


Chers lecteurs et lectrices,

Avant de se lancer vers une nouvelle année, Tahiti Infos profite de la trêve des confiseurs pour faire le point sur celle qui vient de s’écouler. Posons nous quelques jours sur les événements qui ont marqué notre quotidien durant cette année 2017.

En juillet, des affaires judiciaires ont animé le mois, avec notamment l'affaire Mai - Marlier, un réseau de trafic d'ice. On retrouve également un rebondissement sur l'affaire Pouvana'a a O'opa, où l'avocate générale de la Cour de Cassation à Paris, a demandé l'annulation de la condamnation du défunt metua. Le mois de juillet a également été marqué par la venue du ministre de l'action et des comptes publics, Gérald Darmanin.


 

4 juillet : Affaire Mai - Marlier, les dessous d’un trafic mafieux

Le procureur de la République a rendu son réquisitoire définitif dans le cadre du trafic d’ice organisé par le guide touristique Yannick Mai et Moerani Marlier. Le magistrat a demandé le renvoi devant le tribunal correctionnel de 12 individus. L’audience a eu lieu fin août.

Après l’affaire « Kikilove », la filière d’importation d’ice dirigée par Yannick Mai et Moerani Marlier est l’une des plus importantes démantelées ces dernières années en Polynésie française. Pour avoir importé et écoulé plus de cinq kilos d’ice, les deux hommes ainsi que dix autres mis en examen ont comparu devant le tribunal correctionnel dans la dernière quinzaine du mois d’août.

Au mois de mai 2017, les enquêteurs de la Section de recherches interpellent un individu en possession de cinq grammes d’ice, de 0.95 gramme de cocaïne et de 442 000 francs en espèces. L’homme indique qu’il se fournit auprès d’un individu qui travaille pour le compte d’un certain Moerani Marlier. Les enquêteurs découvrent que ce dernier, surnommé le « boss » ou « el Chapo », apparaît comme étant à la tête d’un conséquent trafic d’ice à Tahiti et Moorea. A l’image de Kikilove, l’homme, grand consommateur de méthamphétamines, mène grand train dans des hôtels étoilés. Entouré d’une dizaine de personnes, il vit dans trois habitations dont deux à Tahiti et une à Moorea et roule en Porsche Cayenne. Si Moerani Marlier se chargeait d’écouler la drogue sur le fenua, il apparaît que Yannick Mai, guide touristique, s’occupait quant à lui de la partie importation. L’homme, surnommé « le parrain », profitait de voyages aux Etats-Unis dans le cadre de sa société de charter pour importer de la drogue.

Le 10 juin 2017, Yannick Mai, détenteur de la double nationalité franco-américaine, est arrêté à l’aéroport de Los Angeles en possession de 3,7 kilos d’ice, puis incarcéré. Sa fille et son assistante sont également appréhendées. Malgré ce coup d’arrêt, Moerani Marlier poursuit le trafic en utilisant des mules. L’une d’entre elles est interpellée le 4 septembre à son arrivée de Los Angeles en possession d’1,2 kilo d’ice. Celui que l’on surnomme « El Chapo » est arrêté dans la foulée alors qu’il se trouve dans un luxueux établissement de la côte ouest. Dans sa chambre, les enquêteurs découvrent une arme chargée. A son domicile sont découverts des produits, des gants et des masques de protection pouvant laisser à penser l’existence d’un laboratoire. Entendu, Moerani Marlier déclare qu’il a connu Yannick Mai à sa sortie de prison et que ce dernier lui a proposé de l’ice. Suite à cette première transaction, le guide touristique était devenu le fournisseur de Marlier qui employait lui-même plusieurs revendeurs. Il indiquait que le trafic lui avait rapporté 20 millions de francs. Après l’arrestation de Yannick Mai à Los Angeles, Marlier et ses hommes avaient rejoint le domicile du guide afin de procéder à un « nettoyage. »

Selon les déclarations de plusieurs mis en cause, Yannick Mai se fournissait aux Etats-Unis mais également au Mexique. Lors de l’achat de 400 grammes d’ice à Los Angeles, un proche du guide affirme que la drogue avait été livrée à l’hôtel dans une enveloppe déposée sur une « machine à limonade. »

Dans ce dossier, on retrouve également l’ex-huissier Patrick Rey qui a été condamné le 24 octobre 2017 à trois ans de prison dont 18 mois avec sursis pour abus de confiance, ainsi que sa femme. L’homme aurait apporté son concours au trafic en achetant des billets d’avion, en accompagnant les mules et en assistant à plusieurs rendez-vous avec Moerani Marlier.

Rappelons que toute personne est présumée innocente tant que sa culpabilité n'a pas été établie par un tribunal et que tous les recours devant les juridictions compétentes n'ont pas été épuisés.

6 juillet : l'avocate générale demande l'annulation de la condamnation

À Paris, la chambre criminelle de la Cour de cassation a examiné la condamnation de Pouvana'a a Oopa en 1959 à huit ans de prison et 15 ans d’exil. L’avocate générale a constaté l’existence de faits nouveaux et s’est prononcé pour l’annulation de la condamnation. Fin octobre, Pouvana'a a été réhabilité

La salle d’audience de la Cour de cassation, située dans l’ancien palais de justice de Paris, a vécu un moment historique. 58 ans après son procès, la cour de révision s'est penchée sur la condamnation de Pouvanaa a Oopa, alors député de la Polynésie française. Le 11 octobre 1958, Pouvana'a est arrêté à son domicile. On l’accuse d’avoir incité ses partisans à brûler la ville de Papeete et de détenir des armes et des munitions chez lui sans autorisation. Après une amnistie en 1969, la famille du metua avait engagé une première tentative de révision dans les années 1990, mais qui n’avait pas abouti. En 2014, c’est Christiane Taubira, alors garde des Sceaux, qui a lancé une nouvelle procédure. L’enjeu de la matinée était de déterminer si cette nouvelle instruction a permis de révéler des « faits nouveaux » qui n’étaient pas connus à l’époque et qui auraient été susceptibles de modifier le jugement.

Emmanuel Piwnica, avocat près la Cour de cassation, défend brillamment le cas de Pouvana'a a Oopa. « La République s’est installée en Polynésie, elle s’y trouvait bien », commence-t-il. Il a retracé l’histoire entre Tahiti et la France, les « comportements de colon arrogant, méprisant, condescendant » et ce « stéréotype insupportable de l’exotisme traditionnel ». Puis il défend Pouvana'a, « dont j’ai l’honneur aujourd’hui de représenter la mémoire ». Pour lui, c’était un homme « qui représentait une autonomie légitime et le faisait selon les voies légales ».

Rudy Bambridge, adversaire politique de Pouvana'a était aussi l’avocat qui représentait les parties civiles lors du procès de Pouvana'a a Oopa. Maître Piwnica le qualifie comme « l’homme à tout faire de la République ». Lors du référendum pour approuver la Constitution de la Ve République en 1958, Pouvanaa appelle à voter non. Le climat est tendu. « Pour Paris, ces troubles, c’est une bénédiction pour éliminer un adversaire sérieux, convenable et qui risque d’emporter la conviction ».

Puis l’avocat met en pièces l’instruction de ce dossier judiciaire : la procédure était « à ce point inéquitable », le procès a eu lieu « selon des modalités bien étranges », des gendarmes n’ont « pas faire preuve de loyauté, c’est une évidence ». En résumé, c’était « une parodie de justice, une caricature de procès détestable, honteuse pour la justice, en un mot, indigne ».

Les procès qui remontent jusqu’à la cour de révision sont très rares. Mais là, il est « rare de trouver autant de faits nouveaux dans un procès en révision », constate-t-il. D’autant que ces éléments nouveaux ne sont « pas seulement de nature à créer un doute, mais bien au contraire la preuve de son innocence ».

Pour maître Piwnica, c’est clair : « Pouvana'a n’a jamais donné l’ordre de mettre le feu à la ville », son arrestation « était organisée par l’autorité avant même la date des faits qui lui sont reprochés », les pressions du gouverneur étaient « continuelles » et la partialité du président de la cour d’assises était « totale ». Bref, « cette condamnation n’est rien d’autres que le fruit d’une basse condamnation politique exécutée de manière servile. » Logiquement, il demande l’annulation de la condamnation de Pouvana'a « au nom de l’intérêt supérieur de la justice ».

C’était ensuite au tour de l’avocate générale de s’exprimer. Elle aussi constate que le procès ne s’est pas déroulé correctement, c’est une « évidence juridique ». Mais elle insiste : « Nous devons nous en tenir aux faits. » Elle relève les légèretés de l’instruction, par exemple à propos de la possession d’armes, de leur nombre, de leur catégorie : « Je ne sais objectivement pas répondre à ces questions. »

Si Pouvana'a s’est peu exprimé durant l’instruction à l’époque, l’avocate générale constate que « même si ses réponses sont souvent contradictoires sinon incompréhensibles », « on ne saurait raisonnablement dire qu’il a reconnu les faits ». A propos des « possibles intimidations » et des pressions policières, « en soi nous ne pouvons pas accepter qu’une justice soit rendue alors que le principe de violence est admis : ce seul fait crée le doute sur la culpabilité. »

Pour elle, le dossier révèle des éléments « de nature à permettre le doute sur la culpabilité de Pouvana'a a Oopa, à mon sens ». En conclusion, elle estime qu’il « existe des faits nouveaux » et conclut à l’annulation de la condamnation de 1959. Fin octobre, la Cour de révision a annulé sa condamnation.

18 juillet : le visage du centre culturel de Paofai

L’agence PARC Architectes a réalisé les esquisses du futur centre culturel de Paofai. Ce lieu, qui sera installé sur l'actuel parking de TNAD, derrière le temple protestant, accueillera une médiathèque et un centre d'art contemporain.

Le futur centre culturel de Paofai sera situé à quelques mètres des jardins de Paofai. Il sera situé là où il y a actuellement le parking de TNAD. Pour être plus précis entre la rue du chef Teriierooiterai, l'avenue des Poilus tahitiens et l'avenue du commandant Destremau.
Un concours d’architecte a été initié le 14 octobre 2016. Les trois candidatures sélectionnées ont remis leur esquisse en avril 2017. Le jury du concours s’est déroulé le 23 mai 2017 et, après l’audition des trois candidats, a été sélectionnée à l’unanimité l’esquisse du groupement 05 - Parc architecture (mandataire) – A maramarama - Polynésie ingénierie – Néonergie –Bureau Michel Forgue et Peutz et associés – Fréderic Casanova. L'arrêté validant ce choix a été pris en novembre dernier. Mais jusqu'ici les esquisses étaient restées plutôt confidentielles. Le cabinet Parc Architecture a finalement décidé de présenter les images de son projet. "Tel l'habitat traditionnel, appelé fare, les espaces sont délimités par des alignements de troncs formant une structure primaire sur laquelle est tressée une vêture de feuilles", explique l’agence PARC Architectes, fondée par Brice Chapon et Emeric Lambert en 2009. "Ces espaces peuvent être intérieurs ou extérieurs, à l'ombre ou à la lumière. Ils constituent ainsi une variété de modulations climatiques propices aux différentes activités du site."

Aujourd'hui, le projet est en phase de consolidation de l'esquisse par un groupe de travail. Le gouvernement souhaite notamment définir comment ce centre culturel viendra compléter l'offre du Village tahitien.

Le permis de construire aurait dû être déposé en décembre pour une consultation des entreprises en 2019. Les travaux de construction du centre culturel, qui devraient commencer l'an prochain, sont prévus pour durer au moins quinze mois.

30 juillet : la défiscalisation nationale accordée pour Natitua

L'annonce a été faite par le ministre de l'action et des comptes publics, Gérald Darmanin, aux membres du gouvernement et aux responsables de l'Opt. Une nouvelle qui a bien été accueillie par l'Office. D'ailleurs, la pose de ce deuxième câble a démarré par l'atoll de Hao.

La direction générale de l'Opt attendait cette réponse depuis des mois. "Sur le financement, l'Etat avait déjà confirmé sa participation à travers le Fonds exceptionnel de l'investissement, puis l'Agence du numérique (10 millions d'euros) et il restait la défiscalisation nationale", déclare Jean-François Martin, directeur général de l'Office des postes et télécommunications.

Lors d'une visite officielle à bord du câblier français "Île de Batz", le ministre de l'action et des comptes publics, Gérald Darmanin a confirmé que le deuxième câble polynésien bénéficiera de la défiscalisation. "Je suis venu avec le responsable des affaires juridiques de mon ministère pour pouvoir interpréter les questions sur la défiscalisation, puisque la pose de ce câble est très importante pour la Polynésie, pour la télémédecine, pour le développement économique, pour le lien éducatif", indique le ministre de l'action et des comptes publics, Gérald Darmanin.

"Les demandes d'Emmanuel Macron sont d'être particulièrement à l'écoute de l'aménagement des territoires. Et en Polynésie, on voit bien qu'il y a des enjeux énormes. Donc, le président Emmanuel Macron m'a demandé de pouvoir aider au mieux la Polynésie et les projets du président Fritch", poursuit le ministre Gérald Darmanin.

"Nous sommes très heureux et satisfait de l'annonce du ministre puisque comme vous le savez, le financement de ce câble va se faire en partie, avec le soutien du Pays et le reste en emprunt. Le fait que la défiscalisation soit accordée va faire que l'investissement sera moins lourd et la répercussion sur les prix que supporteront les consommateurs sera allégée. Je remercie le ministre parce que ce n'était pas évident puisque le câble n'était pas éligible", souligne le président Edouard Fritch.

En effet, au départ, rien ne laissait présager une telle décision, puisque, "dans la loi, il y a une petite difficulté qui prévoyait la défiscalisation à partir du moment, où on prenait le premier contact avec un archipel. Et normalement, si on était dans une lecture très rigide dans la partie défiscalisée, eh bien, vous ne pouvez pas défiscaliser pour les autres bouts des archipels de la Polynésie", annonçait le ministre de l'action et des comptes publics. Cependant, "la loi ne prévoyait sans doute pas la difficulté particulière du grand territoire de la Polynésie française et son nécessaire accompagnement pour que la vie des écoliers, la vie de ceux de la médecine, enfin tout ce qui touche le développement économique de votre pays, puisse être accompagné", terminait-il.

Pour l'heure, aucune idée sur le montant de l'aide fiscale. Selon l'OPT, cette aide pourrait représenter 1,2 milliard de francs.

Parallèlement, la pose du câble Natitua a démarré à partir de l'atoll de Hao.

Les dates

2 juillet : Assises - Macron vante « l’archipel de France »
Lors de la restitution des Assises des Outre-mer, le président de la République a appelé à placer les Outre-mer « au cœur de la République ». Il a confirmé sa visite en Polynésie l’an prochain pour le sommet France-Océanie.

2 juillet : Le 2-juillet doit être férié pour Moruroa e Tatou
L’association Moruroa e Tatou plaide en faveur de l’instauration d’un jour férié le 2 juillet en commémoration du premier essai nucléaire français du Pacifique, en 1966 à Moruroa.

4 juillet : Gaston Flosse visé par une enquête pour "incitation à la violence"
Le parquet de Papeete a ordonné l’ouverture d’une enquête préliminaire visant Gaston Flosse à la suite d’une plainte déposée le 2 mai dernier par le Pays, pour incitation à la violence.

5 juillet : La lutte contre les runs renforcée
L'Assemblée nationale a voté mercredi une proposition de loi La République en marche, qui vise à sanctionner davantage les rodéos motorisés, et prévoit notamment la confiscation des véhicules concernés. La loi sera applicable en Polynésie française.

9 juillet : Le Paul Gauguin fait escale à Vairao pour la première fois
Vendredi matin, le Paul Gauguin et ses 300 passagers ont fait escale à Vairao pour la première fois. La commune et ses environs ont accueillis les touristes en grande pompe.

13 juillet : Déchets - une unité de pyrolyse en projet à la décharge de Faa'a
Le maire de Faa'a évoque l'installation prochaine d'une unité de transformation des déchets par pyrolyse à la décharge municipale de Saint-Hilaire. Le projet serait porté par une entreprise hawaiienne. Une unité d'essai pourrait être mise en service dès septembre.

19 juillet : Protection des baleines - OCEANIA lance son projet « Vigie sanctuaire »
L’association OCEANIA, créée en décembre 2017, a pour objectif d’augmenter les connaissances que nous possédons sur les cétacés afin de pouvoir développer des programmes de conservation concrets. Dès le 1er août prochain, l’association mettra en place le projet « vigie sanctuaire » qui, via un plan de surveillance organisé sur les navires des compagnies maritimes Terevau et Aremiti entre Moorea et Tahiti, aura notamment pour but de comprendre les phénomènes de collision et de les prévenir.

25 juillet : Airbnb - attention, la déclaration d’activité est obligatoire
Les exploitants de meublés de tourisme ont jusqu’au 29 juillet pour se déclarer conformément à la nouvelle réglementation applicable en Polynésie française. Passé ce délai, ils s’exposent à de lourdes amendes.
 

Les phrases du mois

- "Tous les ans, aux alentours du mois de juillet, des méduses et les galères portugaises arrivent sur les côtes." (Claude Serra, ingénieur à la Direction de l'environnement)

- "C'est avec un plaisir non dissimulé que je reviens en Polynésie." (Christophe Deschamps, directeur de cabinet du Haut-commissariat)

- "Il y a deux endroits dans le monde où la baleine est actuellement en danger : en Arabie Saoudite et en Polynésie." (Charlotte Esposito, biologiste marin, directrice et fondatrice d'OCEANIA)

Les chiffres clés du mois

- 1 483 : le nombre de bacheliers à avoir réussi en juillet 2018
- 14,9°C : la température à Rapa, dans la nuit du 8 au 9 juillet
- 30,7 millions : une jeune retraitée a remporté cette somme à l'Euro Millions
- 2 milliards : bénéfices d'Air Tahiti Nui en 2017

Vaimalama Chaves, Miss Tahiti 2018 a reçu sa Toyota Yaris hybride des mains de Lionel Foissac.

Le dessin de Munoz


Rédigé par TI le Lundi 31 Décembre 2018 à 03:00 | Lu 1233 fois