Journal de Maximo Rodriguez : le nouveau bulletin de la SEO


La présidente de la Société des études océaniennes Sylvia Tuheiava-Richaud (à gauche) et Liou Tumahai (à droite) présentent le Journal de Maximo Rodriguez, dernier bulletin publié par la SEO. crédit photo Stéphanie Delorme
Tahiti, le 29 août 2023 - Le dernier bulletin publié par la Société des études océaniennes est une traduction d'un jeune Espagnol, Maximo Rodriguez, qui a partagé le quotidien des Tahitiens pendant un an entre 1774 et 1775, en communiquant dans leur langue. C'est Liou Tumahai, maître de conférences en espagnol, qui a profité de sa retraite pour s'atteler à cet énorme travail de vérifications et de traduction.
 
Maximo Rodriguez n'est qu'un simple soldat de 20 ans quand il arrive à Tahiti en 1774 avec des rudiments de tahitien. Et pour cause : il était déjà venu une première fois deux ans auparavant mais sans que l'on sache vraiment dans quelles circonstances. Mais à son retour au Pérou en 1773, il avait embarqué avec lui quatre Tahitiens ce qui lui a permis de se perfectionner dans la pratique de la langue.

C'est pourquoi le vice-roi du Pérou de l'époque le mandate pour une mission d'exploration et d'évangélisation avec deux Franciscains.
Si ces derniers resteront cloîtrés pendant tout le séjour, Maximo a, de son côté, tissé un lien tel avec la famille royale qu'elle décide même de l'adopter officiellement, ce qui lui ouvrira toutes les portes. Grâce à ce journal, on peut ainsi toucher du doigt l'épopée de cette famille. Il y raconte même la cérémonie d'obsèques du très jeune roi Vehiatua qui n'avait, comme lui, que 20 ans.

Son récit est précieux en ce sens que c'est le seul véritable témoin oculaire de l'époque à avoir tutoyé des personnages de haut rang, à s'être frotté aux us et coutumes, et à avoir assisté aux Heiva et aux pratiques traditionnelles comme la fabrication du Tapa ou des 'umete. D'ailleurs, le ‘umete géant en pierre noire taillée à Maurua – qui est exposé aujourd'hui au Musée ethnographique de Madrid –, a été rapporté par Maximo Rodriguez. La présidente de la SEO, Sylvia Tuheiava-Richaud caresse même l'espoir de voir un jour revenir cette pièce archéologique au fenua, au Musée de Tahiti et ses îles.

Le manuscrit “le plus ancien et le plus fiable”

Ce journal a donc été traduit par une enfant du fenua, Liou Tumahai qui était enseignante, et même maître de conférences, en espagnol. “J'ai travaillé à partir de plusieurs traductions existantes du journal de Maximo Rodriguez jusqu'à découvrir un jour la présence d'un manuscrit de son journal datant de 1788. C'est le plus ancien et le plus fiable”, a-t-elle expliqué à Tahiti Infos, notamment parce que le manuscrit est signé de la main de Maximo Rodriguez ce qui permet d'authentifier le document. Liou Tumahai précise que ce travail lui a pris “des années”, car “il faut tout vérifier au niveau linguistique, historique et au niveau des 'américanismes' car il y a beaucoup de termes hispano-américains de la fin du XVIIIe siècle”. Elle a également réalisé un énorme travail de toponymie que l'on retrouve à la fin de l'ouvrage.

Si on connait finalement assez peu d'anecdotes personnelles sur la vie de Maximo Rodriguez pendant ces 360 jours sur Tahiti, c'est certainement parce que la version qui a été traduite provenait du rapport officiel qu'il a rendu à la fin de cette mission qui fut un succès sur le plan de l'exploration, mais un échec au niveau de l'évangélisation.

Rédigé par Stéphanie Delorme le Mardi 29 Aout 2023 à 17:58 | Lu 2410 fois