Tahiti, le 10 octobre 2020 – Joinville Pomare a tenté samedi matin de fédérer à Hitia'a l'ensemble des propriétaires terriens de la côte Est afin de peser dans son projet qui consiste à demander des comptes à Marama Nui. Au nom de tous les propriétaires, l'association Pomare entend réclamer ni plus ni moins que 51% des parts de la société.
"Nous palabrons pour rassembler, demain nous amènerons 2 000 personnes devant les barrages". C'est du renfort que Joinville Pomare est venu chercher samedi matin à Hitia'a, pour peser dans les débats face à la société de production hydroélectrique, Marama Nui, filiale d'EDT-Engie. "Ça fait 40 ans que ça dure, les barrages dans les vallées ont permis à la société de se constituer un patrimoine foncier et pécuniaire. Nous voulons notre part du développement", assène le président de l'association Pomare.
Cette fois, il ne s'agit pas seulement d'échanger. Dans l'enceinte de l'église protestante, le propriétaire foncier tente de convaincre ses pairs d'envisager une action sur le terrain. "Il y a beaucoup de monde aux réunions et plus personne sur le terrain quand il faut passer à l'action, déplore ce dernier. Nous ne pouvons plus continuer à subir. Il faut que Marama nui arrête de se moquer des propriétaires que nous sommes."
La part du gâteau ? 51% des parts de l'entreprise, détenue principalement par le groupe EDT-Engie suivi du Pays et de quelques 600 "petits" actionnaires (lire encadré). Mais le président de l'association demande aussi à la société de "ne plus signer des baux avec certains propriétaires seulement." Ce qui conduit à des "bagarres interminables devant les tribunaux" eux-mêmes "à la solde des grosses sociétés pour s'approprier ce qui nous appartient."
"Diviser pour mieux régner"
Si le discours galvanisant semble prendre au départ, les premiers applaudissements cèdent peu à peu la place à des interventions un peu plus musclées. "Je n'ai pas besoin de l'association Pomare pour me battre pour les intérêts de ma famille, en tant que présidente, je me bouge" , lâche Werna Maruhi. A la tête de l'Association Te Hui Tama Fraizer Amaru, la jeune femme souligne que "c'est aux propriétaires terriens d'ici de parler des problématiques de chez eux." "Il n'a aucun droit ici à Hitia'a", embraye son voisin, "il veut juste se faire un nom". "Ils viennent ici parce qu'ils savent qu'il y a de l'argent derrière à réclamer", renchérit Goergy.
Comme lui, certains sont juste venus écouter par curiosité, tandis que d'autres pointent les nombreux déboires judiciaires du personnage, sa bonne foi, et donc sa légitimité à fédérer. Méfiance également lorsque Joinville Pomare présente un livre, censé recueillir les signatures de tous les propriétaires convaincus par la démarche. "C'est un registre pour la mise en place d'une société", souffle une participante. "C'est quoi son plan ? Il nous demande de signer, mais qu'est-ce qu'il va faire avec nos signatures ?", interroge Ralph. "On sait pas comment ça peut être utilisé" interroge Werna.
Le traité de Waitangi
Conscient de ces réticences, Joinville Pomare met en garde contre la "technique colonialiste" qui consiste à "diviser pour mieux régner" et appelle les plus récalcitrants à laisser de côté leurs problèmes particuliers. "Il y a des familles qui n'ont rien eu depuis 40 ans, comme moi. Il faut faire bloc contre le gouvernement et l'Etat qui ne respectent pas nos traités." En l'occurrence, le traité de Pomare V, qu'il élève au même rang que celui de Waitangi entre les Anglais et les Maoris. "Notre traité n'a jamais été respecté depuis 178 ans. Mon ancêtre a signé un traité avec la France, il ne s'appelaient pas Gaston Flosse ou Edouard Fritch, c'est Pomare, Pomare c'est moi, poursuit l'activiste foncier. Nous sommes déterminés à être entendus, nous avons déposé un courrier de rencontre avec le gouvernement pour que le partage se fasse équitablement".
Une première action est évoquée, mais sans échéance. L'association Pomare envisage d'organiser une marche entre Teahupoo et Papeete avec les propriétaires fonciers. " Nous sommes des gueux dans notre pays, aucun parti politique ne défend notre cause", déplore le responsable tout en se défendant de faire de la politique. Contactés par nos soins, les responsables de Marama Nui n'ont pas souhaité s'exprimer.
"Nous palabrons pour rassembler, demain nous amènerons 2 000 personnes devant les barrages". C'est du renfort que Joinville Pomare est venu chercher samedi matin à Hitia'a, pour peser dans les débats face à la société de production hydroélectrique, Marama Nui, filiale d'EDT-Engie. "Ça fait 40 ans que ça dure, les barrages dans les vallées ont permis à la société de se constituer un patrimoine foncier et pécuniaire. Nous voulons notre part du développement", assène le président de l'association Pomare.
Cette fois, il ne s'agit pas seulement d'échanger. Dans l'enceinte de l'église protestante, le propriétaire foncier tente de convaincre ses pairs d'envisager une action sur le terrain. "Il y a beaucoup de monde aux réunions et plus personne sur le terrain quand il faut passer à l'action, déplore ce dernier. Nous ne pouvons plus continuer à subir. Il faut que Marama nui arrête de se moquer des propriétaires que nous sommes."
La part du gâteau ? 51% des parts de l'entreprise, détenue principalement par le groupe EDT-Engie suivi du Pays et de quelques 600 "petits" actionnaires (lire encadré). Mais le président de l'association demande aussi à la société de "ne plus signer des baux avec certains propriétaires seulement." Ce qui conduit à des "bagarres interminables devant les tribunaux" eux-mêmes "à la solde des grosses sociétés pour s'approprier ce qui nous appartient."
"Diviser pour mieux régner"
Si le discours galvanisant semble prendre au départ, les premiers applaudissements cèdent peu à peu la place à des interventions un peu plus musclées. "Je n'ai pas besoin de l'association Pomare pour me battre pour les intérêts de ma famille, en tant que présidente, je me bouge" , lâche Werna Maruhi. A la tête de l'Association Te Hui Tama Fraizer Amaru, la jeune femme souligne que "c'est aux propriétaires terriens d'ici de parler des problématiques de chez eux." "Il n'a aucun droit ici à Hitia'a", embraye son voisin, "il veut juste se faire un nom". "Ils viennent ici parce qu'ils savent qu'il y a de l'argent derrière à réclamer", renchérit Goergy.
Comme lui, certains sont juste venus écouter par curiosité, tandis que d'autres pointent les nombreux déboires judiciaires du personnage, sa bonne foi, et donc sa légitimité à fédérer. Méfiance également lorsque Joinville Pomare présente un livre, censé recueillir les signatures de tous les propriétaires convaincus par la démarche. "C'est un registre pour la mise en place d'une société", souffle une participante. "C'est quoi son plan ? Il nous demande de signer, mais qu'est-ce qu'il va faire avec nos signatures ?", interroge Ralph. "On sait pas comment ça peut être utilisé" interroge Werna.
Le traité de Waitangi
Conscient de ces réticences, Joinville Pomare met en garde contre la "technique colonialiste" qui consiste à "diviser pour mieux régner" et appelle les plus récalcitrants à laisser de côté leurs problèmes particuliers. "Il y a des familles qui n'ont rien eu depuis 40 ans, comme moi. Il faut faire bloc contre le gouvernement et l'Etat qui ne respectent pas nos traités." En l'occurrence, le traité de Pomare V, qu'il élève au même rang que celui de Waitangi entre les Anglais et les Maoris. "Notre traité n'a jamais été respecté depuis 178 ans. Mon ancêtre a signé un traité avec la France, il ne s'appelaient pas Gaston Flosse ou Edouard Fritch, c'est Pomare, Pomare c'est moi, poursuit l'activiste foncier. Nous sommes déterminés à être entendus, nous avons déposé un courrier de rencontre avec le gouvernement pour que le partage se fasse équitablement".
Une première action est évoquée, mais sans échéance. L'association Pomare envisage d'organiser une marche entre Teahupoo et Papeete avec les propriétaires fonciers. " Nous sommes des gueux dans notre pays, aucun parti politique ne défend notre cause", déplore le responsable tout en se défendant de faire de la politique. Contactés par nos soins, les responsables de Marama Nui n'ont pas souhaité s'exprimer.
Marama Nui, 40 ans plus tard
Aujourd'hui "référence polynésienne de l’hydroélectricité", Marama Nui a vu le jour en 1980 et exploite depuis 15 barrages et 13 centrales hydroélectriques. Son actionnariat est détenu à 56,36 % par la société anonyme Electricité de Tahiti, et à 35,38 % par la Polynésie française. Le reste est dispatché entre près de 600 petits porteurs, dont une grande partie est composée d’ayant-droits des vallées accueillant les ouvrages de l’entreprise. "Cette participation au capital de la société permet aux riverains d’être associés au développement économique de leurs territoires", note Marama Nui dans un rapport sur la concession. 85% de l’électricité d’origine renouvelable de Polynésie française et produite par ces barrages. Des performances qui permettent à la Polynésie de disposer d’un mix électrique composé de 30 à 35% d’énergies renouvelables. Des travaux menés dans le cadre d'un programme global de réhabilitation ont mobilisé un investissement de 4 milliards de francs, sur une durée de 15 ans, pour tous ses grands ouvrages dans cinq vallées de Tahiti.