"Je n’ai pas envie qu’il y ait un confinement" martèle Edouard Fritch


Tahiti, le 29 octobre 2020 - Une déclaration conjointe du haut-commissaire Dominique Sorain et du président Fritch est prévue vendredi matin pour donner des précisions sur un éventuel confinement en Polynésie française, suite à l'annonce mercredi du président de la République. Interrogé jeudi, le chef de l'exécutif polynésien s'est clairement montré opposé à la mise en place d'un confinement ici dans l'immédiat. Si elle devait être prise, cette décision, qui serait selon lui "une catastrophe", n'interviendrait au plus tôt qu'en milieu de semaine prochaine. Pour Edouard Fritch, il importe aujourd'hui de "mesurer l’impact" du couvre-feu sur la situation épidémiologique du fenua avant de décider ou pas d'un reconfinement. 


Réfléchissez-vous aujourd’hui à la manière dont vous allez mettre en place un confinement ?
Non. Je crois que l’on a été assez clairs et suffisamment constants dans nos comportements : ce n’est pas parce qu’en France on se confine que nous allons nous confiner. (…) Aujourd’hui nous sommes en période de couvre-feu. Nous avons mis en place des mesures pour protéger les uns et les autres et éviter que le Covid ne se propage. Il nous faut attendre 15 jours, 3 semaines, pour voir quels sont les premiers résultats de cette mesure. Laissons le temps au temps. (…). Pour l’instant, il n’y a pas de confinement.
 
Cela veut-il dire qu'il n'y en aura pas ?
Vous savez, je n’ai pas envie qu’il y ait un confinement parce que ce serait une catastrophe sur le plan économique. On me reproche encore aujourd’hui à l’assemblée d’avoir rouvert les frontières. Mais si je ne l’avais pas fait, combien de familles seraient par terre ? Combien d’entreprises seraient par terre ? Ce mal est aussi cuisant que celui que nous subissons aujourd’hui. Toute la gymnastique que nous avons eue à faire a été de trouver un équilibre intelligent pour tenter de continuer à protéger nos populations. Et c’est ce que nous avons fait.
 
Ce matin, Jean Castex explique que l’épidémie en Martinique est "en forte augmentation" pour justifier l’application d’un confinement là-bas. Ici, les données épidémiologiques sont bien plus alarmantes. Le confinement n’est-il pas indiqué ?
Nous nous battons ici pour que les mesures qui sont prises en Polynésie française le soient en concertation avec le gouvernement, avec les responsables politiques de ce Pays. Je vous rappelle que le couvre-feu, ce n’est pas une décision du Premier ministre. C’est nous qui l’avons demandé. Je ne sais pas ce qui se passe en Martinique. Bien sûr que nous sommes dans le top 3 au niveau du taux d’incidence de la maladie. Oui, je le sais bien. On devrait tout fermer. Mais est-ce la solution au problème ? Les Polynésiens vont-ils accepter que l’on revienne au confinement, que l’on enferme tout le monde ? Pour le faire, il nous faudra des éléments à leur présenter. On surveille bien sûr les chiffres matins et soirs ; mais on essaye aussi d’appeler tout un chacun à ses responsabilités. On voit des personnes Covid+ qui voyagent, qui vont dans les îles, aux enterrements, aux mariages… et qui se savent Covid+. Ce n’est pas raisonnable. Si on n’essaye pas de limiter nos déplacements au strict nécessaire pour stopper ce Covid, eh bien nous en paieront les frais.
 
Vous estimez en somme que l’on a encore besoin de quelques jours pour réfléchir à la question d’un confinement ?
Non seulement réfléchir. Mais surtout mesurer l’impact des premières décisions qui ont été prises. Aujourd’hui, on ne s’étonne pas trop de l’augmentation des tests positifs, puisque nous sommes en train de gérer les contaminations d’avant couvre-feu. A partir de la semaine prochaine – mercredi ou jeudi –, il faudra que l’on observe le comportement de cette courbe : si elle continue à augmenter ou si elle commence à se stabiliser, ce qui sera une preuve importante des retombées positives du couvre-feu. Je ne veux pas prendre une décision parce qu'en métropole on fait ceci ou cela. Il faut que l’on adapte les mesures à la Polynésie française et c’est tout le sujet des discussions que nous avons avec le haut-commissaire.
 
Rendez-vous la semaine prochaine en somme ?
On va voir comment les choses évoluent. 

Rédigé par Propos recueillis par Jean-Pierre Viatge le Jeudi 29 Octobre 2020 à 14:32 | Lu 9434 fois