PAPEETE, 27 juin 2018 - Toilettage statutaire, impact du projet de loi constitutionnelle "pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace", prochaine convention Etat-Pays pluriannuelle de solidarité : dans un entretien accordé à Tahiti Infos, le président Edouard Fritch souligne les enjeux de sa mission à Paris, la semaine dernière. Il évoque aussi ses attentes concernant le contenu du Livre bleu des Outre-mer, qui doit être remis ce jeudi au président Macron, et sur lequel le Pays compte beaucoup pour la mise en œuvre des priorités de l’Accord de l’Elysée.
Où en est le projet de toilettage du statut d’autonomie ?
Le projet du gouvernement central est prêt. Il comporte une dizaine d’articles, qui font effectivement partie des points que nous souhaitons ajuster. Mais il n’est pas satisfaisant en l’état, puisque nous avions identifié une trentaine d’articles à aménager. L’objectif est de rendre ce statut plus efficient. Si je prends l’exemple des lois du Pays, leur traitement est bloquant : dès qu’il y a un recours, leur application est suspendue. Nous sommes alors obligés d’attendre que le Conseil d’Etat se prononce. Cela prend du temps. On ne peut pas travailler dans ces conditions. Avec le ministère des Outre-mer, nous avons essayé d’imaginer un dispositif plus souple, plus efficient. Dans l’ensemble c’est l’esprit de ce que nous demandons.
Je disais que nous avons une trentaine de projets d’amendements du statut actuel. Paris en a retenu une dizaine. Des séances de travail se tiennent actuellement pour que l’on parvienne à faire accepter nos amendements, préalablement à l’examen par le Parlement de cette réforme statutaire. Je ne veux pas aller directement à l’affrontement. Il faut que l’on discute encore un peu.
Le gouvernement central est prêt à introduire ce projet de loi et le Conseil des ministres devrait l’examiner avant la fin du mois de juillet de façon à ce que l’assemblée de la Polynésie française soit consultée courant août. Nous convoquerons donc une session extraordinaire pour cela. Et nous profiterons de cet examen par l’assemblée pour proposer nos amendements ; si possible ceux dont on sait qu’ils seront acceptés par le gouvernement central. Ce fut l’objet de ma dernière visite à Paris. Nous en avons parlé avec la ministre des Outre-mer, avec le Premier ministre et avec le président du Sénat. C’est le Sénat qui portera ce projet de loi courant octobre-novembre, afin que la loi soit adoptée avant la fin du premier trimestre 2019.
En dehors du processus d’application des lois du Pays, quels autres aménagements vous semblent importants dans ce "toilettage" statutaire ?
Par exemple, nous demandons à ce que nous puissions avoir une marge de manœuvre plus importante, au niveau de nos relations extérieures ici dans le Pacifique. Prenons le cas de l’investissement Manatua, de sécurisation de notre connexion internet. Cela a été d’une complexité terrible. Il nous a fallu demander l’avis du Quai d’Orsay, à chaque étape des discussions pour arriver à mettre sur pieds le consortium avec les îles Cook, Niue et les îles Samoa. Ces procédures, lorsqu’il s’agit d’échanges commerciaux, je voudrais qu’elles soient allégées. Je ne veux pas empiéter dans le domaine diplomatique de l’Etat ; mais j’estime que dans le Pacifique, maintenant que nous sommes intégrés au Forum, il serait bon que nous puissions avoir une liberté d’action.
Il y a aussi des attentes importantes au niveau de la souplesse en matière d’immigration, et en particulier pour ce qui concerne les investisseurs étrangers en Polynésie. Il faut faciliter la mobilité de ces personnes. Si à chaque fois qu’ils viennent il leur faut demander un visa… Il nous faut pouvoir attirer ces gens et faciliter leurs déplacements lorsqu’ils ont investi dans notre pays. (…) C’est ce type d’aménagements qui nous préoccupe aujourd’hui. Ils sont liés au développement de la Polynésie.
Et concernant les terres rares ?
C’est vrai qu’au sujet des ressources minières, le statut met actuellement un blocage au niveau des matières premières stratégiques. (…) Le gouvernement central a donné son accord de principe pour que l’on trouve une rédaction plus claire. Dans l’immédiat, nous demandons à ce que l’exploitation des terres rares soit ouverte à la Polynésie française.
Fin janvier dernier, la ministre des Outre-mer avait promis une "réponse législative" aux revendications autonomistes exprimées par les élus des Marquises. La piste d’un "nouveau cadre de compétences" entre les communes et le Pays avait été évoquée. L’opportunité du toilettage statutaire sera-t-elle saisie pour intégrer cette considération ?
Non, c’est trop tôt. Pour le moment, la définition du projet des îles Marquises n’est pas claire. S’il s’agit d’avoir un élargissement des compétences ; s’il s’agit de laisser aux Marquisiens le soin de développer leur archipel, au plan touristique, concernant l’exploitation de leurs ressources maritimes : je suis entièrement d’accord pour que l’on revoie les dispositifs prévus par le statut à ce niveau. Le biais utilisé aujourd’hui est celui de la Communauté de communes. Celle-ci n’a pu se mettre en place que parce que le Pays a délégué deux compétences essentielles : le développement économique ; et l’aménagement du territoire. Maintenant, ils ont voulu développer un peu plus leur zone maritime. Je n’ai formulé aucune opposition à ce projet. Les difficultés qu’ils rencontrent sont internes aux Marquises.
Mais s’il s’agit de trouver un statut différent pour les îles Marquises : je suis opposé. Je pense que la Polynésie française n’a aucun intérêt à donner des statuts spéciaux à ses archipels. C’est notre unité qui fait notre force aujourd’hui. (…)
Le Parlement se penche actuellement sur le projet de loi constitutionnelle "pour une démocratie plus représentative". Pensez-vous que la voix polynésienne sera entendue pour limiter la baisse de son effectif parlementaire?
Lors de notre déplacement à Paris, nous avons essayé d’expliquer qu’avec un député et un sénateur, pour le Polynésie française, on ne pourra rien faire. Ces élus auraient un tel territoire qu’ils ne pourraient pas être à l’écoute de tout le monde, ni porter la parole, puisque c'est leur rôle. Nous nous sommes battus auprès de la ministre des Outre-mer, puis du Premier ministre et du président du Sénat, pour que nous puissions au moins maintenir deux députés sur trois et deux sénateurs, compte tenu de l’éclatement géographique de notre territoire. Je pense qu’ils tiendront compte de cette différenciation liée aux paramètres géographiques. (…)
Le Livre bleu des Outre-mer est présenté jeudi. Qu’attendez-vous de ce document ?
Nous nous sommes inscrits dans la continuité de l’Accord de l’Elysée pour réaliser ce document. Nous essayons d’être logiques avec notre vision du développement de ce pays, de la solidarité, de la continuité, etc. Nous avons exprimé, au travers de ce document des assises, les priorités qui sont inscrites dans les grandes lignes de l’Accord de l’Elysée. Nous sommes dans la continuité de ce que nous avons déjà dit à l’Etat. Maintenant, le président de la République va prendre connaissance, dans le Livre bleu des Outre-mer, de l’intention des uns et des autres. Il sera ensuite en mesure de tracer sa feuille de route pour le quinquennat. J’attends de voir ce qui sera retenu.
Ce qui est certain – et c’est l’intérêt des assises de l’Outre-mer – c’est que la feuille de route du gouvernement central prendra nécessairement en compte les intérêts de la Polynésie française. A partir de cette logique, on prendra ce que le gouvernement central aura retenu. Mais il ne faut pas se faire d’illusions. Toutes les propositions ne seront pas retenues. Nous vivons avec l’espoir que l’essentiel le sera.
Vous attendez du président Macron qu’il respecte son engagement de tenir compte de l’existence de l’Accord de l’Elysée ?
Oui. Mais je suis confiant là-dessus. C’est pour cela que nous avons tout intérêt à être constants sur notre ligne de conduite et sur nos objectifs. (…)
En somme, vous avez de grandes attentes concernant le contenu de ce Livre bleu, pour la Polynésie.
J’ai de grandes attentes sur la bonne volonté de Paris d'accompagner dans notre effort de développement. Sur les demandes, il y en a beaucoup… Peut-être trop, compte tenu de moyens financiers dont dispose l’Etat aujourd’hui. Nous accepterons tout ce qui nous sera proposé par l’Etat, parce que ce sera nécessairement issu du registre de nos priorités.
La continuité territoriale est-elle au nombre de ces priorités de premier ordre ?
Oui. La réflexion est complexe parce que ce qui nous préoccupe aujourd’hui n’est pas tant notre isolement par rapport à la Métropole que notre continuité intérieure. A ce niveau, il y a plusieurs choses à prendre en compte : les déplacements liés à la santé, le développement des unités de santé décentralisées, des questions liées à l’éducation, les questions de la communication, des transports aériens, maritimes… Il y a différents sujets qui composent cette problématique de la continuité territoriale. (…) Nous souhaitons un partenariat soutenu avec l’Etat pour y faire face. Prenons l’exemple de la décision prise à Paris sur le financement du câble Natitua. Le Premier ministre a inscrit cette intervention d’urgence de l’Etat dans le sens de la continuité territoriale en matière de communications. Il s’agit d’une aide de 1,2 milliard de francs sur les 6 milliards investis ; mais l’Etat manifeste sa solidarité.
La prochaine convention pluriannuelle pour le financement du RSPF sera-t-elle traitée sous l’égide de la solidarité ?
Nous devons en discuter avec le ministère de la santé. C’est à un autre niveau. On parle effectivement de solidarité nationale en faveur des populations les plus défavorisées chez nous. Mais, je vois mieux cette convention englobant l’ensemble des matières où le ministère de la santé et de la solidarité intervient. Au-delà du RSPF (Régime de solidarité de Polynésie française, NDLR) lui-même, je vois bien figurer dans cette nouvelle convention le problème de l’oncologie, celui de la participation de l’Etat sur les moyens que nous devons déployer pour créer des plateaux techniques décentralisés dans les archipels. Là aussi, c’est un problème de continuité : plus nous soignerons nos malades dans les archipels, moins cela nous coûtera de les évacuer vers un plateau unique à Tahiti. La philosophie est là. C’est pour ça que cette convention est importante. Il ne s’agit pas pour moi de courir après les 1,4 milliard du RSPF. Cette convention devra être beaucoup plus globale.
Quand sera-t-elle signée ?
Pas avant le premier trimestre 2019.
Au plan local, votre assise politique, c’est le groupe Tapura de l’assemblée. Il a pu sembler sujet à perturbations ces derniers jours. C’est difficile de tenir uni un groupe de 38 élus ?
Oui, la famille s’est agrandie. Nous sommes passés de 29 à 38, avec une nouvelle génération qui arrive, qui veut prendre des responsabilités, s’exprimer. Il nous faut nous organiser. C’est vraiment un problème d’intendance. Il n’y a pas de crise politique, contrairement à ce qu’on peut entendre. Il y a aujourd’hui une question d’organisation du groupe à l’assemblée, qui est en train de se régler. Vous savez que chaque groupe dispose de moyens fournis par l’assemblée outre les moyens complémentaires confiés par chaque élu sur son enveloppe de crédits collaborateurs. L’idée que j’essaye de faire passer, en accord avec le président de l’assemblée, est qu’il vaut mieux privilégier le travail de groupe afin de disposer de moyens humains puissants et pouvoir s’exprimer sur les dossiers qui lui seront présentés. Nous demandons à nos élus d’avoir une vision plus communautaire plutôt que de ne regarder que leurs intérêts propres. Ce n’est pas facile. Avec un peu de discipline et d’organisation, je pense qu’on réussira. Il n’y a pas de crise dans le groupe. Ce que je note, en attendant, c’est que les délibérations sont passées à 39 voire 40 élus. La cohésion du groupe est là. Il nous faut simplement gérer certaines personnalités à l’intérieur.
Où en est le projet de toilettage du statut d’autonomie ?
Le projet du gouvernement central est prêt. Il comporte une dizaine d’articles, qui font effectivement partie des points que nous souhaitons ajuster. Mais il n’est pas satisfaisant en l’état, puisque nous avions identifié une trentaine d’articles à aménager. L’objectif est de rendre ce statut plus efficient. Si je prends l’exemple des lois du Pays, leur traitement est bloquant : dès qu’il y a un recours, leur application est suspendue. Nous sommes alors obligés d’attendre que le Conseil d’Etat se prononce. Cela prend du temps. On ne peut pas travailler dans ces conditions. Avec le ministère des Outre-mer, nous avons essayé d’imaginer un dispositif plus souple, plus efficient. Dans l’ensemble c’est l’esprit de ce que nous demandons.
Je disais que nous avons une trentaine de projets d’amendements du statut actuel. Paris en a retenu une dizaine. Des séances de travail se tiennent actuellement pour que l’on parvienne à faire accepter nos amendements, préalablement à l’examen par le Parlement de cette réforme statutaire. Je ne veux pas aller directement à l’affrontement. Il faut que l’on discute encore un peu.
Le gouvernement central est prêt à introduire ce projet de loi et le Conseil des ministres devrait l’examiner avant la fin du mois de juillet de façon à ce que l’assemblée de la Polynésie française soit consultée courant août. Nous convoquerons donc une session extraordinaire pour cela. Et nous profiterons de cet examen par l’assemblée pour proposer nos amendements ; si possible ceux dont on sait qu’ils seront acceptés par le gouvernement central. Ce fut l’objet de ma dernière visite à Paris. Nous en avons parlé avec la ministre des Outre-mer, avec le Premier ministre et avec le président du Sénat. C’est le Sénat qui portera ce projet de loi courant octobre-novembre, afin que la loi soit adoptée avant la fin du premier trimestre 2019.
En dehors du processus d’application des lois du Pays, quels autres aménagements vous semblent importants dans ce "toilettage" statutaire ?
Par exemple, nous demandons à ce que nous puissions avoir une marge de manœuvre plus importante, au niveau de nos relations extérieures ici dans le Pacifique. Prenons le cas de l’investissement Manatua, de sécurisation de notre connexion internet. Cela a été d’une complexité terrible. Il nous a fallu demander l’avis du Quai d’Orsay, à chaque étape des discussions pour arriver à mettre sur pieds le consortium avec les îles Cook, Niue et les îles Samoa. Ces procédures, lorsqu’il s’agit d’échanges commerciaux, je voudrais qu’elles soient allégées. Je ne veux pas empiéter dans le domaine diplomatique de l’Etat ; mais j’estime que dans le Pacifique, maintenant que nous sommes intégrés au Forum, il serait bon que nous puissions avoir une liberté d’action.
Il y a aussi des attentes importantes au niveau de la souplesse en matière d’immigration, et en particulier pour ce qui concerne les investisseurs étrangers en Polynésie. Il faut faciliter la mobilité de ces personnes. Si à chaque fois qu’ils viennent il leur faut demander un visa… Il nous faut pouvoir attirer ces gens et faciliter leurs déplacements lorsqu’ils ont investi dans notre pays. (…) C’est ce type d’aménagements qui nous préoccupe aujourd’hui. Ils sont liés au développement de la Polynésie.
Et concernant les terres rares ?
C’est vrai qu’au sujet des ressources minières, le statut met actuellement un blocage au niveau des matières premières stratégiques. (…) Le gouvernement central a donné son accord de principe pour que l’on trouve une rédaction plus claire. Dans l’immédiat, nous demandons à ce que l’exploitation des terres rares soit ouverte à la Polynésie française.
Fin janvier dernier, la ministre des Outre-mer avait promis une "réponse législative" aux revendications autonomistes exprimées par les élus des Marquises. La piste d’un "nouveau cadre de compétences" entre les communes et le Pays avait été évoquée. L’opportunité du toilettage statutaire sera-t-elle saisie pour intégrer cette considération ?
Non, c’est trop tôt. Pour le moment, la définition du projet des îles Marquises n’est pas claire. S’il s’agit d’avoir un élargissement des compétences ; s’il s’agit de laisser aux Marquisiens le soin de développer leur archipel, au plan touristique, concernant l’exploitation de leurs ressources maritimes : je suis entièrement d’accord pour que l’on revoie les dispositifs prévus par le statut à ce niveau. Le biais utilisé aujourd’hui est celui de la Communauté de communes. Celle-ci n’a pu se mettre en place que parce que le Pays a délégué deux compétences essentielles : le développement économique ; et l’aménagement du territoire. Maintenant, ils ont voulu développer un peu plus leur zone maritime. Je n’ai formulé aucune opposition à ce projet. Les difficultés qu’ils rencontrent sont internes aux Marquises.
Mais s’il s’agit de trouver un statut différent pour les îles Marquises : je suis opposé. Je pense que la Polynésie française n’a aucun intérêt à donner des statuts spéciaux à ses archipels. C’est notre unité qui fait notre force aujourd’hui. (…)
Le Parlement se penche actuellement sur le projet de loi constitutionnelle "pour une démocratie plus représentative". Pensez-vous que la voix polynésienne sera entendue pour limiter la baisse de son effectif parlementaire?
Lors de notre déplacement à Paris, nous avons essayé d’expliquer qu’avec un député et un sénateur, pour le Polynésie française, on ne pourra rien faire. Ces élus auraient un tel territoire qu’ils ne pourraient pas être à l’écoute de tout le monde, ni porter la parole, puisque c'est leur rôle. Nous nous sommes battus auprès de la ministre des Outre-mer, puis du Premier ministre et du président du Sénat, pour que nous puissions au moins maintenir deux députés sur trois et deux sénateurs, compte tenu de l’éclatement géographique de notre territoire. Je pense qu’ils tiendront compte de cette différenciation liée aux paramètres géographiques. (…)
Le Livre bleu des Outre-mer est présenté jeudi. Qu’attendez-vous de ce document ?
Nous nous sommes inscrits dans la continuité de l’Accord de l’Elysée pour réaliser ce document. Nous essayons d’être logiques avec notre vision du développement de ce pays, de la solidarité, de la continuité, etc. Nous avons exprimé, au travers de ce document des assises, les priorités qui sont inscrites dans les grandes lignes de l’Accord de l’Elysée. Nous sommes dans la continuité de ce que nous avons déjà dit à l’Etat. Maintenant, le président de la République va prendre connaissance, dans le Livre bleu des Outre-mer, de l’intention des uns et des autres. Il sera ensuite en mesure de tracer sa feuille de route pour le quinquennat. J’attends de voir ce qui sera retenu.
Ce qui est certain – et c’est l’intérêt des assises de l’Outre-mer – c’est que la feuille de route du gouvernement central prendra nécessairement en compte les intérêts de la Polynésie française. A partir de cette logique, on prendra ce que le gouvernement central aura retenu. Mais il ne faut pas se faire d’illusions. Toutes les propositions ne seront pas retenues. Nous vivons avec l’espoir que l’essentiel le sera.
Vous attendez du président Macron qu’il respecte son engagement de tenir compte de l’existence de l’Accord de l’Elysée ?
Oui. Mais je suis confiant là-dessus. C’est pour cela que nous avons tout intérêt à être constants sur notre ligne de conduite et sur nos objectifs. (…)
En somme, vous avez de grandes attentes concernant le contenu de ce Livre bleu, pour la Polynésie.
J’ai de grandes attentes sur la bonne volonté de Paris d'accompagner dans notre effort de développement. Sur les demandes, il y en a beaucoup… Peut-être trop, compte tenu de moyens financiers dont dispose l’Etat aujourd’hui. Nous accepterons tout ce qui nous sera proposé par l’Etat, parce que ce sera nécessairement issu du registre de nos priorités.
La continuité territoriale est-elle au nombre de ces priorités de premier ordre ?
Oui. La réflexion est complexe parce que ce qui nous préoccupe aujourd’hui n’est pas tant notre isolement par rapport à la Métropole que notre continuité intérieure. A ce niveau, il y a plusieurs choses à prendre en compte : les déplacements liés à la santé, le développement des unités de santé décentralisées, des questions liées à l’éducation, les questions de la communication, des transports aériens, maritimes… Il y a différents sujets qui composent cette problématique de la continuité territoriale. (…) Nous souhaitons un partenariat soutenu avec l’Etat pour y faire face. Prenons l’exemple de la décision prise à Paris sur le financement du câble Natitua. Le Premier ministre a inscrit cette intervention d’urgence de l’Etat dans le sens de la continuité territoriale en matière de communications. Il s’agit d’une aide de 1,2 milliard de francs sur les 6 milliards investis ; mais l’Etat manifeste sa solidarité.
La prochaine convention pluriannuelle pour le financement du RSPF sera-t-elle traitée sous l’égide de la solidarité ?
Nous devons en discuter avec le ministère de la santé. C’est à un autre niveau. On parle effectivement de solidarité nationale en faveur des populations les plus défavorisées chez nous. Mais, je vois mieux cette convention englobant l’ensemble des matières où le ministère de la santé et de la solidarité intervient. Au-delà du RSPF (Régime de solidarité de Polynésie française, NDLR) lui-même, je vois bien figurer dans cette nouvelle convention le problème de l’oncologie, celui de la participation de l’Etat sur les moyens que nous devons déployer pour créer des plateaux techniques décentralisés dans les archipels. Là aussi, c’est un problème de continuité : plus nous soignerons nos malades dans les archipels, moins cela nous coûtera de les évacuer vers un plateau unique à Tahiti. La philosophie est là. C’est pour ça que cette convention est importante. Il ne s’agit pas pour moi de courir après les 1,4 milliard du RSPF. Cette convention devra être beaucoup plus globale.
Quand sera-t-elle signée ?
Pas avant le premier trimestre 2019.
Au plan local, votre assise politique, c’est le groupe Tapura de l’assemblée. Il a pu sembler sujet à perturbations ces derniers jours. C’est difficile de tenir uni un groupe de 38 élus ?
Oui, la famille s’est agrandie. Nous sommes passés de 29 à 38, avec une nouvelle génération qui arrive, qui veut prendre des responsabilités, s’exprimer. Il nous faut nous organiser. C’est vraiment un problème d’intendance. Il n’y a pas de crise politique, contrairement à ce qu’on peut entendre. Il y a aujourd’hui une question d’organisation du groupe à l’assemblée, qui est en train de se régler. Vous savez que chaque groupe dispose de moyens fournis par l’assemblée outre les moyens complémentaires confiés par chaque élu sur son enveloppe de crédits collaborateurs. L’idée que j’essaye de faire passer, en accord avec le président de l’assemblée, est qu’il vaut mieux privilégier le travail de groupe afin de disposer de moyens humains puissants et pouvoir s’exprimer sur les dossiers qui lui seront présentés. Nous demandons à nos élus d’avoir une vision plus communautaire plutôt que de ne regarder que leurs intérêts propres. Ce n’est pas facile. Avec un peu de discipline et d’organisation, je pense qu’on réussira. Il n’y a pas de crise dans le groupe. Ce que je note, en attendant, c’est que les délibérations sont passées à 39 voire 40 élus. La cohésion du groupe est là. Il nous faut simplement gérer certaines personnalités à l’intérieur.