Immigration: inquiète d'un contournement de la loi, la droite accentue la pression


Ludovic MARIN / AFP
Paris, France | AFP | vendredi 22/12/2023 - Les ténors de la droite sont montés au créneau vendredi pour réclamer la stricte application de la loi immigration, redoutant qu'elle ne soit vidée de sa substance par le Conseil constitutionnel, les décrets d'application et la fronde des départements de gauche.

Compromis, chose due. C'est ce qu'a rappelé Eric Ciotti à Elisabeth Borne: dans un courrier consulté par l'AFP, le président des Républicains a demandé à la Première ministre de "prendre l'engagement solennel" qu'elle fera "appliquer la nouvelle loi immigration".

Requête justifiée par les prises de position de la cheffe du gouvernement, mais aussi de plusieurs de ses ministres ainsi que du président Emmanuel Macron, auxquels M. Ciotti reproche d'annoncer "publiquement que plusieurs mesures fortes" du texte voté mardi "sont contraires à la Constitution ou pourront être revues".

Comme par exemple la fixation de quotas migratoires, qui "représente peut-être une rupture dans le droit", a indiqué le porte-parole des députés Renaissance, Benjamin Haddad, sur LCI.

Ou encore la création d'une caution pour les étudiants étrangers, qui "n'est pas une bonne mesure", a estimé le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave, sur franceinfo. Mme Borne avait déjà suggéré que le montant de cette caution pourrait être symbolique, de l'ordre de "10 ou 20 euros".

A moins que la mesure ne soit censurée par le Conseil constitutionnel, au même titre que d'autres "qui ont été proposées par Les Républicains et sur lesquelles on peut avoir un doute", a souligné le ministre de la Fonction publique, Stanislas Guerini, sur CNews et Europe1.

"A la moulinette" 

"Un jeu très dangereux à la frontière du cynisme consistant à soutenir un texte tout en disant que certaines de ses dispositions sont contraires à la Constitution", a dénoncé Laurent Wauquiez dans le quotidien Le Figaro. 

Le président (LR) de la région Auvergne-Rhône-Alpes redoute de voir "la loi passer à la moulinette" avec "la tentation très forte d'en neutraliser les mesures les plus fortes". "L’Etat de droit consiste avant tout à veiller à ce que la volonté du peuple soit respectée et non à l’étouffer", a-t-il encore mis en garde. 

A l'inverse, certaines dispositions abandonnées au Parlement pourraient être repêchées. La ministre de la Ville, Sabrina Agresti-Roubache, entend ainsi revenir "de manière réglementaire" sur l'accès au travail sans délai pour les demandeurs d'asile. "Il faut se battre pour cette mesure" qui figurait "dans le texte initial" du gouvernement, a-t-elle affirmé sur RMC.

D'autres ont engagé le combat contre un article du texte adopté au Parlement: les 32 départements de gauche ont fait savoir qu'ils n'appliqueront pas la restriction de l'accès à l'allocation personnalisée d'autonomie (APA).

Cette aide sociale, versée aux personnes âgées de plus de 60 ans en situation de dépendance, doit en effet être soumise pour les étrangers à un délai de carence de cinq ans, réduit à deux ans et demi pour ceux qui ont travaillé.

"Nous n'allons pas opérer ce tri", a prévenu la maire (PS) de Paris, Anne Hidalgo, lors d'un point de presse, ajoutant que Paris enverrait une contribution au Conseil constitutionnel "pour faire invalider" plusieurs points de la loi.

"Nous allons combattre sur le terrain du droit mais aussi imaginer des dispositifs", a-t-elle ajouté.

Rébellion intolérable pour la droite, à l'image du député Aurélien Pradié (LR) fustigeant "une transgression majeure et impardonnable". L'élu du Lot menace même dans un communiqué d'attaquer "personnellement devant la justice chaque délibération ou manquement qui constituera un acte de négation de la loi".

le Vendredi 22 Décembre 2023 à 05:16 | Lu 393 fois