Île de Pâques : Waitiare et Koro remportent la Tapati 2018


Koro et Wai au moment de leur triomphe
RAPA NUI, le 19 février 2018- Waitiare Kaltenegger et Koro Pate forment le couple vainqueur de la Tapati 2018 qui a mobilisé l’énergie de l’île de Pâques du 2 au 17 février.

Depuis le début du mois de février, en réalité bien avant si l’on considère les périodes d’entraînement, des centaines et des centaines de personnes se sont mobilisées en deux clans à l’île de Pâques pour soutenir leurs champions lors de la Tapati.
Il ne s‘agit pas d’un concours de beauté mais d’un affrontement amical entre deux groupes, représentés par deux couples, qui se mesurent à travers un grand nombre d’épreuves inspirées des anciens sports et des anciennes activités de l’île : course à pied (porteurs de fruits), sculpture, course de chevaux, de totoras (roseaux), mais aussi concours de chants, de danses, de récitations (« orero » en tahitien), de cuisine, de chasse sous-marine et de pêche, de battage du tapa, etc.


Un titre pour un an

Le couple de vainqueurs, resplendissant lors de son défilé final
Le sacre de Waitiare et de Koro a été déterminé par le nombre de points acquis (191 370 pts.) par tous ceux qui les soutenaient durant ces deux semaines d’épreuves acharnées.
Le titre officiel du couple vainqueur, « Icka Ariki Tapati Rapa Nui 2018 », est un titre honorifique qu’il portera jusqu’à la Tapati de 2019 (Tapati signifiant « semaine » en Rapa Nui).
Tahita Nahoe et Petero Avaka, les vainqueurs de 2017, ont procédé au couronnement des deux nouveaux élus, « Icka » Waitiare et « Ariki » Koro.
Le couple vaincu, Kimi Ma’ara Tucki (pour le titre de Ariki) et la très belle Vai Tiare Rapu (pour le titre de Icka) est évidemment déçu d’avoir échoué, mais cette défaite n’a rien de déshonorant ; eux aussi, avec leur clan et leur supporters, ont su être à la hauteur de cette compétition..


40 ans de Tapati

Le couple des "vaincus", la délicate Vai et le solide Kimi
La Tapati, devenue un festival populaire incontournable sur l’île, a pris une importance considérable dans le calendrier pascuan ; elle se déroule à la belle saison, pendant une période de vacances et de nombreux jeunes rentrent de Santiago, où ils suivent leurs études, pour participer aux différents concours.
La toute première Tapati, très modeste, a eu lieu en février 1968. Elle correspondait à un hommage rendu par les Pascuans d’alors à leurs ancêtres dont le dernier culte, après le renversement des moai, avait été celui de l’homme oiseau (Tangata Manu).
Les serviteurs des chefs de guerre de l’île se rendaient à la nage sur le motu Nui, au large du cratère du Rano Kau. Le premier à ramener entier un œuf d’oiseau migrateur, symbolisant la renaissance, permettait à son maître de prendre le titre d’homme oiseau pour une année. Celui-ci se rasait le crâne, devenait « tabu », vivait reclus à la carrière de statues du Rano Raraku et, dans la réalité, exerçait un pouvoir absolu sur tous les clans de l’île, ayant droit de vie et de mort sur ses sujets.
En 1868, la dernière cérémonie du Tangata Manu eut lieu à Orongo, sur la lèvre du Rano Kau et un siècle plus tard, plus pacifiquement et de manière bien moins dangereuse, les Pascuans relancèrent donc une compétition amicale entre deux clans pour désigner leur reine de l’année.

Mataveri contre Hanga Roa

Les vainqueurs de l'année dernière, Tahita et Petero
La division en deux clans remonte au XIXe siècle, où, à l’époque des premiers missionnaires français de Picpus et du sinistre « roi » (lui aussi français) Dutrou Bornier, deux clans s’affrontaient, représentant chacun une partie de l’île : ceux du village de Hanga Roa (où se trouvait la mission) et ceux de Mataveri (à l’emplacement de l’actuel aéroport, où vivait Dutrou-Bornier).
Cette division de Rapa Nui en deux grands clans est en fait bien plus ancienne, mais elle fut exacerbée et radicalisée par le conflit entre Dutrou et la mission catholique.
La Tapati telle que nous la connaissons aujourd’hui, permit durant plus de trente ans, de désigner une reine, au terme des compétitions organisées entre les deux camps en lice, présentant chacun une candidate.
Récemment, cette élection d’une jeune femme avait été interrompue (pas le festival), mais finalement, depuis peu, c’est plus logiquement un couple de chacun des deux clans qui s’affronte pour le titre.
Encore une fois, il ne s’agit en aucun cas d’un concours de beauté, même si la fille et le garçon doivent participer activement aux épreuves, notamment en danse et être jeunes et plutôt beaux évidemment.

Textes : Daniel Pardon
Photos : Tapati Rapa Nui Oficial


Rédigé par Daniel Pardon le Mardi 20 Février 2018 à 10:46 | Lu 2829 fois