Ice : le «plan kamikaze » d’un trio d’importateurs


PAPEETE, le 13 septembre 2018 - Deux hommes et une femme étaient présentés ce jeudi en comparution immédiate pour des faits d’importation d’ice. Le 8 août dernier, la prévenue avait été arrêtée à l’aéroport de Tahiti-Faa’a en possession de 176 grammes de méthamphétamines. Lors de l’audience, les mis en cause ont apporté de nombreux détails sur leur modus operandi. Des peines de 18 mois à 5 ans de prison ferme ont été requises.

Les trois prévenus, dont un frère et une sœur, avaient été interpellés alors qu’ils rentraient d’un court séjour aux Etats-Unis. Interrogée par les agents des douanes à son arrivée, la mule avait immédiatement avoué qu’elle transportait 176 grammes d’ice en indiquant que l’instigateur de l’opération n’était autre qu’un ami de son frère qui comparaissait donc ce jeudi à ses côtés.

Lors de l’audience, le président du tribunal a relu de nombreux extraits des déclarations de la prévenue - cinq pages sans aucune question - lors de sa première audition à la Section de recherches (SR.) Extraits qui retracent en détail le déroulement de ce que la mule a qualifié de « plan kamikaze. »



« Un an de salaire »

Dans ses déclarations, la prévenue explique donc que son demi-frère la sollicite une semaine avant les faits en lui demandant si ça l’intéresse de « gagner de l’argent facilement» en important de l’ice. Tel qu’elle l’a expliqué ce jeudi lors de sa comparution, la jeune femme accepte, car cela représente « un an de salaire. » Son frère lui présente l’instigateur qui lui demande combien de grammes elle pourrait importer. Elle avance le chiffre de 240. « Pourquoi 240 grammes ? Comment l’avez-vous estimé ? » s’interroge le magistrat. « Je travaille dans l’agriculture et je connais le poids des légumes » répond la mise en cause.

Au lendemain de cette rencontre, l’instigateur, la prévenue et son demi-frère se rendent dans une agence afin d’acheter les billets d’avion. A leur arrivée à Los Angeles, les trois comparses louent une chambre d’hôtel et se mettent à la recherche d’un fournisseur. Problème : aucun d’entre eux ne parle anglais. Ils achètent donc un téléphone pour télécharger une application de traduction.

« Philanthropie »

L’instigateur prend finalement contact avec un « gangster mexicain » du nom de Ramon Reyes. Durant trois jours, ce dernier apporte l’ice dans la chambre d’hôtel au fur et à mesure. La mule indique qu’elle ne sort pas de l’hôtel et passe ses journées au bord de la piscine « à boire. » Les trois prévenus n’ont pas beaucoup de nourriture et portent les mêmes vêtements depuis leur arrivée. Constatant cela, le fournisseur presse l’instigateur de nourrir et d’habiller le frère et la sœur. Il offre même un taco à cette dernière. « Ramon n’est pas un philanthrope ! » précise le président du tribunal mais il se doute bien que l’allure des trois prévenus fera mouche à l’aéroport.

Des ballons de baudruche et du scotch sont achetés pour conditionner la drogue mais cela ne marche pas. Les trois prévenus se rabattent alors sur des sacs en plastique. La mule explique qu’elle rencontre tant de difficultés pour s’insérer l’ice in corpore qu’elle utilise du mono'i.

A l’aéroport de Los Angeles, les services de l’immigration interrogent les trois prévenus qui arrivent à garder leur sang-froid en indiquant que le but de leur voyage est de faire du « shopping. » Ils sont finalement interpellés à leur arrivée à Tahiti.

A la barre ce jeudi, la mule affirme que son frère et l’instigateur lui ont chacun proposé de s’associer avec elle et de garder une partie pour eux. Cette mère d’un enfant est, tel que le fait remarquer le président du tribunal à l’instigateur, « celle qui a pris le plus de risques. » « Monsieur, si la drogue s’était répandue dans son corps, que serait-il arrivé ? » poursuit le magistrat. « Elle aurait crevé » répond froidement le financier de l’opération.

Des peines de 18 mois à 5 ans de prison ferme ont été requises à l’encontre des trois prévenus.

Rédigé par Garance Colbert le Jeudi 13 Septembre 2018 à 18:03 | Lu 9841 fois