Hauts-de-Seine: un conducteur mineur tué par la police après un refus d'obtempérer


Photo d'illustration. Crédit Philippe HUGUEN / AFP
Nanterre, France | AFP | mardi 27/06/2023 - Un automobiliste, âgé de 17 ans, a été tué mardi matin à Nanterre par un policier qui a fait usage de son arme, après un refus d'obtempérer du mineur.

La victime est décédée peu de temps après avoir été atteinte, malgré l'intervention du Samu qui lui a prodigué un massage cardiaque sur place.

Selon le parquet de Nanterre, contacté par l'AFP, la victime était âgée de 17 ans.

Les faits ont eu lieu vers 8h30 près de la station de RER Nanterre-Préfecture, aux abords de la place Nelson-Mandela, derrière le quartier d'affaires de la Défense.

Une vidéo de l'incident circulant sur Twitter mardi matin, authentifiée par l'AFP, montre deux policiers contrôler une voiture jaune passage François-Arago.

L'un d'entre eux, debout, accoudé sur le pare-brise, tient le conducteur en joue avec son pistolet. Quand le conducteur redémarre, le policier tire à bout portant depuis le côté du véhicule. La voiture a fini sa course quelques dizaines de mètres plus loin, encastrée dans un poteau.

Dans un premier temps, des sources policières ont affirmé que le véhicule avait foncé sur les forces de l'ordre.

Une enquête, confiée au commissariat de Nanterre et à la sûreté territoriale des Hauts-de-Seine, a été ouverte pour refus d'obtempérer et tentative d'homicide volontaire sur personne dépositaire de l'autorité publique, a indiqué le parquet.   

Une autre enquête, ouverte pour homicide volontaire par personne dépositaire de l'autorité publique, a été confiée à l'IGPN (Inspection générale de la police nationale), la police des polices.

"Les policiers sont en ce moment auditionnés par les services de justice", a déclaré en milieu d'après-midi le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, depuis l'Assemblée nationale.

Deux autres personnes se trouvaient dans le véhicule au moment des faits: un premier passager a pris la fuite, alors que le second, également mineur, a été arrêté et placé en garde à vue.

Selon les premiers éléments de l'enquête rapportés de source policière, le conducteur du véhicule, une Mercedes AMG qui avait été louée, avait commis plusieurs infractions au code de la route. A la vue de motards de police, il s'est d'abord arrêté, avant d'accélérer.

Un fonctionnaire lui a alors tiré dessus au niveau du thorax.

"Son décès a été constaté à 9h15 suite à au moins une blessure par arme à feu", a précisé le parquet.

13 décès en 2022

Une quarantaine de personnes se sont brièvement rassemblées en début d'après-midi près des lieux du drame, larmes aux yeux, pour partager leur "colère".

"C'est tellement triste, il était tellement jeune. Je l'ai vu naître", a soupiré Samia Bough, 62 ans, ancienne voisine de l'adolescent, venue déposer un bouquet de roses jaunes.

La victime était déjà connue de la justice, notamment pour refus d'obtempérer.

"Bouleversé par le décès du jeune homme, Patrick Jarry, maire de Nanterre, exprime ses plus sincères condoléances à sa maman ainsi qu'à sa famille et à ses proches. Il souhaite que les enquêtes ouvertes (...) permettent de faire au plus vite toute la lumière sur les circonstances exactes de ce drame", a indiqué la mairie dans un communiqué.

Le maire (DVG) s'est également dit "choqué" par la vidéo du drame.

Selon une source policière, les policiers impliqués sont membres de la compagnie territoriale de circulation et de sécurité routière du 92.

Le drame a provoqué de vives réactions au sein de la gauche, de nombreux responsables politiques ayant relayé la vidéo du tir.

"Oui, un refus d'obtempérer c'est contraire à la loi, mais la mort ne fait pas partie des sanctions prévues par le code pénal", a tweeté le coordinateur de La France insoumise, Manuel Bompard.

"Le refus d'obtempérer ne donne pas de permis de tuer. Ce n'est pas une question d'électorat mais d'humanité et de respect de l'Etat de droit !", a écrit le premier secrétaire du PS Olivier Faure.

Depuis l'Assemblée, Gérald Darmanin a parlé d'"images extrêmement choquantes", en appelant à "respecter le deuil des familles et la présomption d'innocence des policiers". 

En 2022, 13 décès ont été enregistrés après des refus d'obtempérer lors de contrôles routiers, un record. Cinq policiers ont été mis en examen dans ces dossiers, les autres ayant été libérés sans poursuite à ce stade.

Autorités et syndicats de police attribuent le record de décès en 2022 à des comportements au volant plus dangereux, mais des chercheurs incriminent une loi de 2017 modifiant l'usage de leur arme par les policiers.

le Mardi 27 Juin 2023 à 06:27 | Lu 490 fois