Grève à la RATP: pagaille évitée mais forte mobilisation des conducteurs de bus et tramways


Ludovic MARIN / AFP
Paris, France | AFP | vendredi 25/03/2022 - A l'approche d'une modification de leurs conditions de travail pour s'adapter à l'ouverture à la concurrence, les conducteurs du réseau de surface de la RATP se sont fortement mobilisés vendredi en coupant totalement environ 150 lignes de bus et en limitant le service des tramways.

Réunis à l'appel de tous les syndicats représentatifs (CGT, FO, Unsa, CFE-CGC), environ 500 machinistes ont manifesté devant le siège de la RATP à Paris.

"La mobilisation chez les bus est plus importante qu'en 2019 (lors des grèves pour la réforme des retraites)", a salué Pierre Yaghlekdjian, délégué syndical CGT sur le réseau de surface. Dans son dépôt du 15e arrondissement de Paris, "on arrive à 90% de machinistes grévistes", assure-t-il.

D'après la direction, un machiniste sur deux était en grève côté bus et trams mais le niveau de mobilisation restait très inférieur dans les autres métiers par rapport à la dernière journée de grève du 18 février.

Si métros et RER roulaient quasiment normalement, environ 30% des lignes de bus étaient à l'arrêt avec seulement un bus sur deux circulant sur le reste du réseau.

Les trams étaient eux encore plus perturbés avec le T8 totalement arrêté et un service très largement réduit sur les sept autres lignes (circulation seulement aux heures de pointe ou trajet de desserte raccourci).

En cause, le projet de la direction de modifier les conditions et le temps de travail des 15.000 conducteurs de bus et 1.000 conducteurs de tramways pour s'intégrer au "cadre social territorial" (CST).

Ce dernier imposera les mêmes règles d'organisation et de temps de travail à toutes les entreprises à partir du 1er janvier 2025, date de fin du monopole de la RATP sur le réseau de surface.

Or il ne reste plus que trois mois avant l'entrée en vigueur de ce nouvel accord, toujours objet d'âpres négociations qui doivent se conclure en avril. 

Objectif compétitivité 

"Pendant longtemps les salariés ont pensé que ça allait se faire en 2024, donc l'échéance était loin. Là, ça devient concret", explique le secrétaire général de la CGT-RATP Bertrand Hammache.

L'objectif est de "mettre sur la table un deal qui (…) est +travailler plus pour gagner un peu plus+", rappelait début mars la patronne de la RATP, Catherine Guillouard. Actuellement, les machinistes travaillent un peu moins de 35 heures par semaine car contraints à la "conduite en zone dense".

En se rapprochant le plus possible du CST, la RATP et sa filiale CAP Ile-de-France espèrent être en ordre de marche pour remporter un maximum de marchés parmi les douze lots de bus soumis à appel d'offres sur lesquels lorgnent aussi Keolis et Transdev.

Pour le moment, il est prévu de faire travailler les machinistes 40 minutes en plus par jour et de supprimer six jours de congés annuels en échange d'une hausse de salaire d'environ 70 euros par mois, avancent les syndicats.

Pour le DRH Jean Agulhon, ce chiffre est "très éloigné du dernier que nous avons communiqué aux organisations syndicales".

Ce que propose la direction, "c'est l'équivalent d'un mois de travail en plus", avance Hani Labidi, secrétaire général FO pour le réseau de surface. "Avec les conditions de travail qu'on a actuellement, la boite a fait 200 millions d'euros de bénéfice" en 2021, insiste-t-il.

Comme ses collègues des autres syndicats il saluait la mobilisation, même si elle n'a pas atteint le niveau de celle du 18 février sur les salaires.

Cette fois-ci, la non mobilisation du métro et du RER a limité la pagaille et évité un nouveau vendredi noir en région parisienne. Mais les organisations syndicales ne veulent pas en rester là et préparent de nouvelles journées d'actions.

"Le combat doit être unitaire", a lancé un élu CGT au micro à l'intention du rail. "De toute façon, on va tous y passer". L'ouverture à la concurrence pour le métro et le RER est prévue pour 2040.

le Vendredi 25 Mars 2022 à 05:09 | Lu 309 fois