Gaston Flosse passe la main à 93 ans


Tahiti, le 16 juillet 2024 - Gaston Flosse démissionne de son parti et donne les clés du Amuitahiraa à son président-délégué. Charge donc à Bruno Sandras d'organiser, d'ici le 28 septembre, le congrès qui élira le successeur du “vieux lion”. S'il semble le mieux placé, rien n'est encore arrêté et Pascale Haiti-Flosse ou Gilda Vaiho-Faatoa n'écartent pas l'idée de reprendre le flambeau. Attention à ne pas se diviser, prévient toutefois Bruno Sandras pour qui l'alliance ‘Āmui tātou est la preuve que “l'union mène à la victoire”.
 

À 93 ans, Gaston Flosse a décidé de passer la main du Amuitahiraa o te nuna’a mā’ohi, ce parti créé en janvier 2022 sur les cendres du Tahoeraa huiraatira. Il l'a formalisé en envoyant sa lettre de démission le 9 juillet dernier à son président-délégué Bruno Sandras. “Vous en connaissez beaucoup qui ont fait cet exercice ? Aucun ! Lui, il le fait. Contraint par la santé et l'âge peut-être, mais tout va bien vous l'avez vu, la mécanique fonctionne très bien”, lance Bruno Sandras qui se réjouit que celui qui sera “toujours le seul et unique président de ces deux mouvements soit encore là” pour assister à l'élection de son successeur le 28 septembre prochain.
 
Le calendrier est fixé selon l'article 25 du statut de feu le Tahoeraa “qui dit qu'en cas de décès, de démission ou de vacance du président, c'est le 1er président-délégué qui le supplée de plein droit et qui convoque un congrès extraordinaire dans un délai de trois mois”, a ainsi expliqué Gaston Flosse.
 
Flosse toujours “très bien physiquement et intellectuellement”
 
Fragilisé, fatigué mais toujours “très bien physiquement et intellectuellement”, le “vieux lion” ne compte pas se tourner les pouces. Pour ceux qui pensent que ce passage de relais signe la fin de sa vie politique, c'est bien mal connaître Gaston Flosse. “Je continuerai à travailler, et je serai là tous les jours à monter ces deux étages, c'est un bon exercice”, a-t-il prévenu face à la presse ce mardi matin à la permanence de son parti de Papeete, entouré de son président-délégué, Bruno Sandras, et de son épouse Pascale Haiti-Flosse ainsi que d'autres membres du Amuitahiraa o te nuna’a mā’ohi.
 
Mais qui pour le remplacer ? Si Bruno Sandras semblait être une évidence, il se pourrait qu'il y ait d'autres candidatures : “Oui bien sûr, pourquoi pas ! Il faut qu'on en discute et je ne serai pas la seule”, a répondu Pascale Haiti-Flosse. À sa droite, Gilda Vaiho-Faatoa, elle aussi, “pourrait prétendre à cette candidature” et trouve même que c'est une “très bonne idée”. “S'il y a plusieurs candidats, ce sera un vote à bulletins secrets. Sinon, ce sera Bruno”, poursuit le “vieux lion”.
 
“Si le jour du congrès, on en sort divisés, j'aurai échoué”
 
Bruno Sandras assure ne pas être candidat “aujourd'hui” pour se focaliser sur l'organisation du congrès. Et “s'il y a quatre ou cinq candidats, il n'y a pas de souci, c'est sain, c'est la démocratie”, assure-t-il. Mais on sent bien que ces potentielles futures candidatures ne l'emballent pas plus que ça.
 
“Si on commence se déchirer parce qu'il y a un congrès, qu'il faut élire notre président et que ça fait bien d'avoir quatre, cinq candidats... il faut réfléchir aux conséquences après. Si le jour du congrès, on en sort divisés, j'aurai échoué. ‘Āmui tātou nous a rappelé que la division ça mène à l'échec et que l'union mène à la victoire”, prévient Bruno Sandras qui veut que “le grand gagnant le 28 septembre, ce soit le Amuitahiraa soudé, uni, derrière celui ou celle qui sera élu”.
 
En parlant d'union, l'alliance ‘Āmui tātou va-t-elle perdurer et même se transformer en une “fusion” de tous les partis comme le veut Gaston Flosse depuis le début ? En tout cas, les résultats des dernières élections législatives partielles ont démontré la force de frappe autonomiste dès lors qu'elle est soudée. Mais comme toujours, le “vieux lion” veut aller vite. Trop vite peut-être au goût de certains de ses partenaires qui n'ont pas forcément envie de se retrouver noyés dans une seule et même entité en perdant leur identité. Les élections municipales en 2026 pourraient voir des tickets communs. Mais pour les prochaines territoriales, l'enjeu sera différent.
 
Petit tacle à Lana Tetuanui en passant
 
En tout cas pour cette fois, le pari est réussi. “L'alliance se porte bien. Le résultat est là. Nous emportons deux sièges sur trois et si une certaine sénatrice n'était pas venue, pardonnez-moi l'expression, foutre le bordel, on aurait eu les trois”, a taclé Gaston Flosse qui attribue la défaite de son épouse Pascale Haiti-Flosse sur la troisième circonscription le 6 juillet dernier à “Lana Tetuanui qui nous a demandé de retirer Pascale pour mettre sa fille à la place comme tête de liste”.

Mais il l'attribue aussi à Édouard Fritch dont il continue de remettre en cause le choix de la circonscription imposé par le leader du Tapura à la candidate du Amuitahiraa. Est-ce à dire que Gaston Flosse va “casser” l'alliance ‘Āmui tātou comme l'a évoqué le président du Pays le soir de ces élections ? “Il rêve ! Il n'est pas question pour moi de casser cette alliance”, a affirmé Gaston Flosse qui assure par ailleurs qu'il n'est “pas question” non plus de déposer une motion de défiance contre le gouvernement Brotherson.

Bruno Sandras : “Pour moi, il sera toujours le président du Amuitahiraa”

“C'est un moment important. Et c'est ce qui retient mon attention depuis exactement une semaine, depuis le 9 juillet lorsqu'il m'a remis sa lettre de démission. Gaston Flosse, qui a créé le Tahoeraa et le Amuitahiraa aujourd'hui, a toujours été le seul et unique président de ces deux mouvements, et il l'est encore aujourd'hui, dans mon esprit en tous les cas. Certes, il a démissionné de ses fonctions, mais pour moi, il sera toujours le président du Amuitahiraa. En ce qui me concerne, j'ai une mission, mais j'ai aussi une très grande responsabilité, c'est d'organiser le congrès. (...) Je n'ai pas décidé quoi que ce soit. Parce que si le jour du congrès, on en sort divisés, j'aurai échoué. ‘Āmui tātou nous a rappelé que la division, ça mène à l'échec et que l'union mène à la victoire. Si après avoir vécu le ‘Āmui tātou, entre nous au sein de notre mouvement politique on va commencer à se déchirer parce qu'il y a un congrès, qu'il faut élire notre président et que ça fait bien d'avoir quatre, cinq candidats, il faut réfléchir aux conséquences après. On n'en sort jamais indemnes de ce genre d'exercice. Moi, je veux que le grand gagnant qui sorte le 28 septembre, ce soit le Amuitahiraa soudé, uni, derrière celui ou celle qui sera élu pour les grandes batailles qui nous attendent. Peu importe qui va être élu. C'est mon seul objectif.”

Rédigé par Stéphanie Delorme le Mardi 16 Juillet 2024 à 16:50 | Lu 986 fois