Fritch est-il en prise illégale d’intérêt pour la Fête de l’Autonomie ?


PAPEETE, 21 juin 2019 - MMe Jourdaine et Koubbi, les avocats d'Oscar Temaru, s'interrogent sur les conséquences et tirent des conclusions de l'analyse faite par le procureur Hervé Leroy pour caractériser le délit de prise illégale d'intérêt, au fondement de l'accusation du ministère public dans le procès Radio Tefana. 
 
Le délit de prise illégale d’intérêt est constitué dès lors que l’élu a un rôle d’administration ou de surveillance lorsqu'il accorde une subvention litigieuse. Ce qui est toujours le cas pour un maire, seul chargé par la loi de l’administration de sa commune. Et l’intention frauduleuse n’est pas nécessaire à la commission du délit. Seul l’acte suffit. Oscar Temaru, était président du parti souverainiste et antinucléaire Tavini Huiraatira, il a participé aux délibérations municipales et aux votes des conventions d’octroi de subventions pour l’association Te Reo o Tefana, elle-même donnée pour indépendantiste et antinucléaire, et administrée par des membres de son parti, voire des compagnons politiques. Peu importe qu’il en ait tiré un profit à titre personnel, pour le ministère public : Oscar Temaru avait un intérêt pour le moins moral et politique lorsqu’il a participé à l’attribution et ordonné le versement des subventions municipales. "Je n’ai pas besoin des bandes, a insisté le procureur Hervé Leroy vendredi dans son réquisitoire pour balayer l'absence d'enregistrements radiophoniques permettant d'attester du caractère propagandiste des émissions de radio Tefana, il y a confusion entre l’objet de l’association et le but du Tavini Huiraatira. Oscar Temaru est au cœur d’un conflit d’intérêt."

Comme l’a souligné face au tribunal dans sa plaidoirie Me Jourdaine, l’avocat du maire de Faa’a : "si vous deviez allez en voie de condamnation, je crois que vous auriez beaucoup de travail. Vous allez devoir poursuivre tous les élus de Polynésie qui financent des associations dans lesquelles on trouve des membres de leur parti politique, de leur famille, etc. Tout le monde se connait en Polynésie. Je crois que vous allez avoir beaucoup de travail. Sinon, nous aurons des maires qui seront contraints de ne plus rien faire."

Et pour Me David Koubbi : "Avec la vision très extensive proposée par le ministère public du délit de prise illégale d’intérêt, à peu près tous les élus de France, de Navarre ou de Polynésie française peuvent être poursuivis et peut-être condamnés – ça, on le verra. Pour prendre en exemple un événement d’actualité, nous parlerons de la Fête de l’Autonomie : si l’on considère la subvention de 29 millions accordée par le gouvernement au comité organisateur, cela semble problématique pour le président actuellement au pouvoir en Polynésie, d’après ce que nous explique le procureur de la République. Et d’après ce que je comprends du procès que nous venons de traverser, cela sera naturellement analysé comme une prise illégale d’intérêt pour Edouard Fritch, s’il devait être traité comme mon client, M. Oscar Temaru. La fête de l’Autonomie est une fête au service d’une date célébrée par l’idéologie de son parti autonomiste. Et il en va de même pour la fête donnée le 14-juillet par le haut-commissaire, où l’on laisse entendre au peuple polynésien qu’il doit rester français. Le haut-commissaire est-il lui aussi passible de poursuites pour prise illégale d’intérêt ? Ce n’est pas sérieux."

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Vendredi 21 Juin 2019 à 18:54 | Lu 5406 fois