Fare Afera : le patrimoine polynésien en ligne


Guillaume Janoyer.
TAHITI, le 7 août 2022 - Jacques et Guillaume Janoyer portent un projet original. Baptisé Fare Afera, il consiste en une digitalisation du patrimoine polynésien. L’objectif ? Conserver et partager les objets, sites, mais aussi savoir-faire du fenua.

Digitaliser le patrimoine”, tel est l’objectif du projet Fare Afera porté par Jacques et Guillaume Janoyer. Le concept est simple, presque évident à l’ère du tout numérique. L’idée étant de créer un musée virtuel. En pratique, la tâche est sans fin. Le duo entend numériser en trois dimensions les objets (ti’i, costumes, bijoux, instruments…), les sites, mais aussi les œuvres d’artistes, les méthodes de construction, les fruits, légumes, coquillages…

Pour l’instant Jacques et Guillaume Janoyer se concentrent sur le patrimoine le plus fragile. Celui qui peut disparaître d’un jour à l’autre comme des maisons. Celui qui, soumis aux humeurs du ciel, s’abime. Guillaume Janoyer prend pour exemple les ti’i de Raivavae qui se trouvent actuellement au jardin botanique. Jour après jour, ils perdent de leur matière. Doucement mais sûrement, “certains détails disparaissent”. Fare Afera, dans ce contexte, répond à une question d’urgence.

Capturer la réalité dans sa complexité


Guillaume Janoyer a suivi une formation en architecture au Canada. De retour en Polynésie, il a travaillé avec son père Jacques Janoyer pour des cabinets d’architectes polynésiens. “Nous passions des plans 2D en plan 3D.” Pour ce faire, le duo a dû créer une banque d’images 3D. Il s’est familiarisé avec des outils photographiques qui permettent la réalisation d’images 3D, à savoir le laser scan et le photo scan.

Ti'i heiata
Ces deux outils sont complémentaires. Ils capturent la réalité dans toute sa complexité. “Ils sont en mesure de recréer les volumes bien sûr, mais également les couleurs, les surfaces et textures”, décrit Guillaume Janoyer. Pour obtenir les images en trois dimensions, Guillaume et Jacques Janoyer se placent à proximité de l’objet (ou du site) et numérisent toutes ses faces avec le laser scan et le photo scan.

Il est possible de créer une image 3D à partir de photographies 2D. Mais il faut disposer de très nombreuses images 2D différentes du même objet (ou du même site). Pour obtenir la plus fidèle des images en trois dimensions, il faut donc être en possession de l’objet où se rendre sur place s’il s’agit d’un site. Ce qui laisse présager des heures de récoltes d’images.

Ti'i Heiata
Le déclic

Une fois les outils de numérisation maîtrisés, “nous nous sommes demandé ce que nous pouvions en faire”, rapporte Guillaume Janoyer qui, il y a quelques mois, a pris soudainement et personnellement conscience des conséquences et enjeux de la disparition du patrimoine. À Papehue, une grande maison coloniale a longtemps existé côté mer. La Reine Pomare IV y avait séjourné. Guillaume Janoyer y avait passé une partie de son enfance. Elle a été détruite. De cette maison qui raconte en partie l’histoire de Tahiti, “je n’ai aucune photo. Et malgré mes recherches je n’en trouve pas”. C’est dans ce contexte que Fare Afera a vu le jour. “Notre objectif est à la fois de préserver et conserver le patrimoine. Nous souhaitons, en plus, mettre ce patrimoine à disposition du plus grand nombre.

Collaborations scientifiques et populaires

Le projet démarre tout juste. Trois objets ont été numérisés. L’association Fare Afera vient d’être créée. Le duo a d’ores et déjà établi une longue liste d’objets à ajouter. Il va faire appel au grand public pour compléter cette liste. “C’est un travail communautaire d’intérêt public. Nous voulons générer de l’attention sur le projet pour faire grandir le musée.” Concrètement, Guillaume et Jacques Janoyer espèrent que des collectionneurs, scientifiques, amateurs, passionnés se manifesteront pour allonger la liste d’éléments à intégrer au musée virtuel.

Les internautes qui visiteront le musée pourront découvrir les pièces dans leurs moindres détails. Ils auront également la possibilité de lire des anecdotes à leurs propos, des informations historiques, techniques. En effet, Guillaume et Jacques Janoyer ont l’intention de donner la parole à des scientifiques ou bien aux propriétaires pour décrire chaque objet du musée. Fare Afera constituera également un outil pour les scientifiques et étudiants du monde entier.
En attendant, une campagne de financement participatif est prévue avec la fondation Anavai pour récolter des fonds qui serviront au fonctionnement du site internet.


Contacts

Projet à suivre sur FB : Te Fare Afera, TikTok et Instagram.

Rédigé par Delphine Barrais le Dimanche 7 Aout 2022 à 14:36 | Lu 1926 fois