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Expulsion à Titioro : « on nous a prévenu que tout sera rasé d’ici trois mois ! »


Mardi matin, très tôt, les policiers de la DSP ont procédé à l’expulsion de deux familles sur les six habitant au début de la vallée de Titioro. L’opération, prévue de longue date, s’est déroulée dans le calme et sous le regard d’un clerc d’huissier du cabinet Monod. Du côté des familles, c’était l’incompréhension. Et ce n’est que le début.

Une douzaine de personnes -dont des enfants - ont été délogées d’une parcelle de terre au lieu-dit « ‘Ōtu’e nō Pa’ura », située au début de la vallée de Titioro. Mais ces dernières ne représentent qu’une petite partie des quelques 50 personnes vivant sur les lieux, soit 4 à 6 familles au total. L’une d’elles revendique le terrain, documents à l’appui, qu’elles ont été forcées de quitter par une décision de justice. Noëlle Mahai en est la maman. Elle déplore la manière dont les opérations ont été menées : « Les policiers se sont postés juste devant le terrain concerné vers 7h30. (…) En plus, personne n’est venu nous dire quoique ce soit. Ils ont débarqué et tout démoli, mais nous n’abandonnons pas car cela fait plus de 50 années que nous vivons ici. »

L’incompréhension réside dans le fait que les expulsés attendaient le jugement d’une audience fixée au 26 mars prochain, où les familles sur place demandaient la prescription acquisitive où usucapion. Dans le cas d’une réponse positive de la chambre des terres, du tribunal donc, cette prescription pourrait conférer un droit légal d’occupation des terres concernées. Cela sous-entendrait notamment que les demandeurs occupent les lieux depuis une date confirmée par des témoins.

L’affaire a ému l’ex premier-adjoint de la mairie de Pape’ete, Jean Claude Clark, qui est également président de la fédération Te ora mau nō ‘oe. « Je soutiens ces familles parce que la famille Bernière qui se prétend être propriétaire du terrain sur lequel vivent ces familles depuis plus d’un demi-siècle, n’a aucun titre de propriétaire, alors que les familles Amo/Timau sont là depuis 1958 et 1969. » Il a décidé de suivre le dossier de près.

En attendant, les familles expulsées, comme celle de Noelle Mahai ont trouvé refuge à proximité, à quelques mètres seulement du lieu qu’ils occupaient. « Ici, je suis chez mon frère qui sera lui aussi sous le coup d’une expulsion prévue dans trois mois, selon l’huissier qui est venu.Oui, on nous a prévenu que tout sera rasé d'ici trois mois !» a-t’elle confié, toujours sous le choc de l’émotion. Au-delà du litige, il y a avant tout des hommes et des femmes, des enfants qui subissent les faits. « Heureusement que nos deux petites étaient à la garderie car lorsqu’elles sont revenues, elles nous ont demandé où était la maison. »

Ainsi, il s’agit désormais d’une course contre la montre car le consort Amo/Timau a trois mois pour démontrer du bien fondé de leurs démarches auprès de la justice, faute de quoi, une trentaine de personnes devra quitter les lieux. Ces familles attendent beaucoup de l'audience du 24 mars prochain, ultime espoir pour en finir avec toute cette histoire.

TP

Cette maison se trouve à quelques mètres seulement du lieu où s'est déroulée la première expulsion ce mardi 18 février. Elle appartient au frère de l'une des mères de familles délogées. Selon cette dernière, la demeure se trouve également sous le coup d'une expulsion prévue dans trois mois.

Rédigé par TP le Mercredi 19 Février 2014 à 14:15 | Lu 2223 fois