Euthanasie : les divers échelons de l'ordre divergent sur le cas Bonnemaison


Me Arnaud Dupin, l'avocat de Nicolas Bonnemaison
BORDEAUX, 2 septembre 2011 (AFP) - Le cas de l'urgentiste de Bayonne (Pyrénées-atlantiques) soupçonné d'avoir abrégé la vie de patients sème le trouble dans les différents niveaux de l'ordre des médecins: ses confrères départementaux renonçant à le poursuivre tandis que le conseil national semble bien décidé à le faire.

Réuni jeudi soir, l'Ordre des médecins des Pyrénées-Atlantiques a décidé de ne pas porter plainte contre le Dr Nicolas Bonnemaison devant la chambre disciplinaire du Conseil régional de l'Ordre, compétente pour les médecins hospitaliers.

La décision a été prise à bulletins secrets, à la majorité, parmi les 21 titulaires du Conseil départemental. Mais en la rendant publique vendredi, le président du Conseil, le Dr Marc Renoux, s'en est aussitôt désolidarisé, la qualifiant même de "véritable gifle", et disant "en avoir honte".

Pour son président, l'ordre départemental, comme toute institution de la République, "doit dire le droit". Or, a-t-il considéré, "le Dr Bonnemaison a enfreint la loi doublement, au titre de l'art 38 du Code de déontologie et de la loi Leonetti" sur les droits des patients en fin de vie.

Le Dr Renoux a considéré que la décision prise par son ordre traduisait une confusion, entre "d'une part les qualités humaines, professionnelles et intellectuelles du Dr Bonnemaison, qui sont indéniables, et d'autre part, l'élément légal".

Il a conclu que désormais, "seul le Conseil national de l'ordre peut porter plainte et se saisir du dossier".

Or c'est bien ce que celui-ci semble vouloir faire, comme l'a laissé entendre son porte-parole, le Dr André Deseur.

"Radiation ou interdiction temporaire"

Interrogé par l'AFP, le Dr Deseur, qui est aussi président de la section "Exercice professionnel" du Conseil de l'ordre, s'est étonné de la décision de l'ordre départemental.

"Si le Conseil national estime -et je n'imagine pas qu'il ne l'estime pas- que le Dr Bonnemaison a transgressé les règles de la santé publique, il va demander qu'une sanction soit prise par la chambre disciplinaire", a-t-il déclaré, ajoutant : "Au vu des éléments dont nous disposons actuellement, on imagine mal les motifs pour lesquels la chambre disciplinaire ne serait pas amenée à prononcer une sanction".

Le Conseil national va délibérer dans le courant de la semaine prochaine et confirmer sa décision en session plénière en octobre. La chambre disciplinaire disposera alors de trois à quatre mois pour rendre sa décision.

Le Dr Deseur a même prédit le genre de sanctions que risque le Dr Bonnemaison : "du fait de la gravité des faits, il s'expose à une radiation du tableau ou à une interdiction temporaire du droit d'exercer la médecine".

Le Dr Bonnemaison, 50 ans, praticien aux urgences à l'hôpital de Bayonne, est soupçonné d'avoir pratiqué des injections de substances ayant entraîné le décès immédiat d'au moins quatre personnes âgées au cours des cinq derniers mois. Il a été mis en examen le 12 août pour "empoisonnements sur personnes particulièrement vulnérables", mais remis en liberté sous contrôle judiciaire.

Le parquet ayant fait appel de cette décision, le docteur devra comparaître mardi prochain devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Pau. Aucune des familles des patients concernés n'a encore porté plainte.

Interrogé par l'AFP, Me Arnaud Dupin, l'avocat de l'urgentiste, a simplement "pris acte" vendredi des déclarations des différents organes de l'ordre de médecins, indiquant se concentrer pour sa part sur l'audience de mardi.

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Rédigé par AFP le Vendredi 2 Septembre 2011 à 15:13 | Lu 742 fois