PAPEETE, le 1er juillet 2018 - Moana’ura Teheiura est le président du jury de la 137ème année du Heiva i Tahiti, qui ouvrira ses portes ce mercredi 4 juillet, à To'atā. Pour lui, ce titre de président n'est pas une fin en soi, mais une étape qui lui permet de se rapprocher des groupes. Rencontre avec ce passionné de 'ori tahiti.
À 18 ans, il participe à son premier Heiva i Tahiti, avec la troupe Heikura Nui, d’Iriti Hoto. En 1999, il rejoint les rangs du groupe O Tahiti E, avec Marguerite Lai, durant 11 ans. "J'ai beaucoup appris, reçu, échangé et partagé. Marguerite peut paraitre de nature autoritaire, mais elle aime partager et donner. Elle m'a donné ce qu'elle pouvait. Elle donnait surtout une vision sans rien attendre en retour. Elle a contribué à mon éducation culturelle", souligne Moana’ura Teheiura.
Après avoir été vice-président du jury, il est aujourd'hui, le président de cette 137ème édition. À 41 ans, Moana’ura est un homme accompli, même s'il avoue que ce titre "n'est pas une fin en soi. C'est une étape qui me permet de me rapprocher de tous ces groupes et de me rapprocher de moi-même. Je mesure la richesse que chaque groupe partage avec nous lors de nos tournées sur les lieux de répétition."
Danseur accompli et passionné, les échanges avec Moana’ura sont intenses. Il vous parle à cœur ouvert de cette passion qui l'anime depuis son plus jeune âge. La gestuelle accompagne les mots qu'il utilise. Lorsqu'il parle du 'ori tahiti, on peut ressentir tout cet amour qu'il a pour sa terre, sa culture et son pays. Un amour qui l'a mené là où il se trouve aujourd'hui.
Retrouvez son interview ci-dessous.
À 18 ans, il participe à son premier Heiva i Tahiti, avec la troupe Heikura Nui, d’Iriti Hoto. En 1999, il rejoint les rangs du groupe O Tahiti E, avec Marguerite Lai, durant 11 ans. "J'ai beaucoup appris, reçu, échangé et partagé. Marguerite peut paraitre de nature autoritaire, mais elle aime partager et donner. Elle m'a donné ce qu'elle pouvait. Elle donnait surtout une vision sans rien attendre en retour. Elle a contribué à mon éducation culturelle", souligne Moana’ura Teheiura.
Après avoir été vice-président du jury, il est aujourd'hui, le président de cette 137ème édition. À 41 ans, Moana’ura est un homme accompli, même s'il avoue que ce titre "n'est pas une fin en soi. C'est une étape qui me permet de me rapprocher de tous ces groupes et de me rapprocher de moi-même. Je mesure la richesse que chaque groupe partage avec nous lors de nos tournées sur les lieux de répétition."
Danseur accompli et passionné, les échanges avec Moana’ura sont intenses. Il vous parle à cœur ouvert de cette passion qui l'anime depuis son plus jeune âge. La gestuelle accompagne les mots qu'il utilise. Lorsqu'il parle du 'ori tahiti, on peut ressentir tout cet amour qu'il a pour sa terre, sa culture et son pays. Un amour qui l'a mené là où il se trouve aujourd'hui.
Retrouvez son interview ci-dessous.
Moana’ura Teheiura
Président du jury
"Nous n'avons pas le savoir absolu"
Après toutes ces années passées au Heiva i Tahiti, quel est votre constat ?
"Chez le Mā'ohi, on a besoin des transmissions, du savoir-faire des anciens, et nous sommes arrivés à une étape du Heiva où les anciens ne sont plus oubliés. C'est un hommage immense qui leur est rendu par l'ensemble des groupes. Nous remarquons également que nos identités sont blessées par l’histoire propre au heiva. Néanmoins, la prise de conscience commune aujourd’hui est ce besoin de retourner aux mots qui nés de la terre. Parfois maladroitement. Mais la démarche est bien présente. Notre rôle de membre du jury est donc d’encourager l’ensemble des groupes à aller dans ce sens. Nous regardons tout cela avec humilité, avec respect et vigilance parce qu'il s'agit d'un héritage collectif sacré."
Les membres du jury ont rendu visite à tous les groupes, durant leurs répétitions. Pourquoi ?
"Le règlement est validé par les groupes et ils élisent un jury afin qu’ils appliquent le règlement et déterminent les différents vainqueurs. L'application des pénalités dépend de l'huissier. Donc, nous allons voir dans les différents groupes afin de constater le respect du règlement, l'effectif, le temps minimum ou maximum… Au-delà de ça, il y a surtout cette idée de ramener le jury a son statut d'humain, et non pas à une entité suprême qui est sur un trône et qui va juger des groupes. Par ailleurs, nous constatons combien notre peuple est beau à travers une expression communautaire qui tente de survivre face à l’individualisme croissant."
Quelles sont les nouveautés dans le règlement ?
"Auparavant, on parlait de président qui imposait une vision. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas, et la seule chose que j'impose, c'est la prise de parole de chaque membre du jury, que ce soit lors de nos rencontres avec les groupes ou lors de nos réunions. Il est important que nous harmonisions nos avis et que nous donnions nos arguments par rapport à tel ou tel critère. Nous faisons, à l'intérieur du jury, des formations parce qu'il y a une démarche d'honnêteté, c'est-à-dire que oui nous sommes le jury, mais nous n'avons pas le savoir absolu. Avant, les membres du jury notaient tout. Aujourd'hui, nous avons créé deux types de fiches de notation : une fiche complète pour les membres du jury spécialisé dans le domaine concerné et une fiche simplifiée pour les membres du jury non spécialisé. Par exemple, lorsque l’on on va juger les meilleurs danseurs, eh bien, les membres du jury en chant ne vont pas noter les pā'oti, le taparuru… tout ce qui est technique. En revanche, ils sauront apprécier si le danseur exprime bien son thème, s'il a un beau costume… "
Pour les chants, le ministre appelle les gens à respecter les groupes sur scène. Qu'en pensez-vous ?
"Il y a des efforts qui ont été faits par Te Fare Tauhiti Nui lors les éditions précédentes avec la diffusion des textes sur les écrans. Cette année encore, Te Fare Tauhiti Nui a considérablement amélioré le système de sonorisation et le public sera ravi de pouvoir mieux apprécier chaque prestation. Si nous voulons que le public s’intéresse davantage aux hīmene, nous devons tous ensemble faire des efforts. C’est pour cela que lors de nos rencontres avec les groupes de chant, nous avons encourager les groupes à mettre en œuvre des éléments scénographiques afin d’attirer l’attention du spectateur. Qu’il ait la curiosité de rester et d’assister à la prestation du groupe de chant. Cependant, nous devons reconnaître que nous ne pouvons pas enchainer les gens à leur siège et les forcer à aimer une prestation de hīmene. Il y a un vrai travail de fond à réaliser avec l’éducation dans notre pays : les hīmene doivent s’apprendre dans nos classes d’école. D’ailleurs, il est dommage que notre hymne ne soit pas un hīmene traditionnel de notre pays. N’ayons pas peur de nos chants, nos danses, nos musiques et nos écritures ! Assumons-les et apprenons-les dans nos écoles. Aujourd’hui, nous sommes encore incapables de chanter un chant d’accueil tous ensemble sans avoir répéter avant. L’école doit nous apprendre des chants fondamentaux de notre terre, des tārava et des ru’au, sans en faire un complexe ou un rejet. À ce moment-là, nous accepterons nos chants dans notre heiva et le public s’y intéressera sincèrement.
Un grand prix leur sera également décerné ?
"Ce prix nommé "Tumu ra'i fenua" a été mis en place à la demande des groupes. Ce Grand Prix récompensera le groupe qui aura obtenu la meilleure note au total dans les catégories Tārava, Ru’au, ‘ūte paripari et ‘ārearea. Ce prix contribuera à pousser les pupu hīmene vers l’excellence et apportera une pierre à la reconnaissance de cet art. Une reconnaissance qui est créée par nous-mêmes pour que nous prenions conscience de nos propres valeurs sans que quelqu’un d’autre nous le dise."
Autre nouveauté, le Hura Nui ?
"Avec la Maison de la Culture, on a constaté qu'il y avait beaucoup de groupes, et pour donner une certaine équité entre le 1er groupe et le dernier, nous avons voulu que tout le monde présente leur grand costume en "more". Chacun avait 10 minutes pour nous expliquer leurs costumes exclusivement en reo mā'ohi, et c'était noté. Il était important de dire aux groupes de danse qu’il était essentiel d’utiliser nos langues polynésiennes afin d’arrêter de porter ces masques de paroles carnavalesques juste pour habiller nos spectacles. Les chefs de groupes ont très bien saisi les enjeux et ont accepté sans rechigner. Les masques sont tombés et la sincérité s’est exprimée. Nous sommes au début d’une belle démarche qui ramène le heiva à l’essence même de ses valeurs. D’autres efforts doivent être effectués, nous en sommes conscients, et nous sommes déjà contents de ceux qui ont été réalisés."
Président du jury
"Nous n'avons pas le savoir absolu"
Après toutes ces années passées au Heiva i Tahiti, quel est votre constat ?
"Chez le Mā'ohi, on a besoin des transmissions, du savoir-faire des anciens, et nous sommes arrivés à une étape du Heiva où les anciens ne sont plus oubliés. C'est un hommage immense qui leur est rendu par l'ensemble des groupes. Nous remarquons également que nos identités sont blessées par l’histoire propre au heiva. Néanmoins, la prise de conscience commune aujourd’hui est ce besoin de retourner aux mots qui nés de la terre. Parfois maladroitement. Mais la démarche est bien présente. Notre rôle de membre du jury est donc d’encourager l’ensemble des groupes à aller dans ce sens. Nous regardons tout cela avec humilité, avec respect et vigilance parce qu'il s'agit d'un héritage collectif sacré."
Les membres du jury ont rendu visite à tous les groupes, durant leurs répétitions. Pourquoi ?
"Le règlement est validé par les groupes et ils élisent un jury afin qu’ils appliquent le règlement et déterminent les différents vainqueurs. L'application des pénalités dépend de l'huissier. Donc, nous allons voir dans les différents groupes afin de constater le respect du règlement, l'effectif, le temps minimum ou maximum… Au-delà de ça, il y a surtout cette idée de ramener le jury a son statut d'humain, et non pas à une entité suprême qui est sur un trône et qui va juger des groupes. Par ailleurs, nous constatons combien notre peuple est beau à travers une expression communautaire qui tente de survivre face à l’individualisme croissant."
Quelles sont les nouveautés dans le règlement ?
"Auparavant, on parlait de président qui imposait une vision. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas, et la seule chose que j'impose, c'est la prise de parole de chaque membre du jury, que ce soit lors de nos rencontres avec les groupes ou lors de nos réunions. Il est important que nous harmonisions nos avis et que nous donnions nos arguments par rapport à tel ou tel critère. Nous faisons, à l'intérieur du jury, des formations parce qu'il y a une démarche d'honnêteté, c'est-à-dire que oui nous sommes le jury, mais nous n'avons pas le savoir absolu. Avant, les membres du jury notaient tout. Aujourd'hui, nous avons créé deux types de fiches de notation : une fiche complète pour les membres du jury spécialisé dans le domaine concerné et une fiche simplifiée pour les membres du jury non spécialisé. Par exemple, lorsque l’on on va juger les meilleurs danseurs, eh bien, les membres du jury en chant ne vont pas noter les pā'oti, le taparuru… tout ce qui est technique. En revanche, ils sauront apprécier si le danseur exprime bien son thème, s'il a un beau costume… "
Pour les chants, le ministre appelle les gens à respecter les groupes sur scène. Qu'en pensez-vous ?
"Il y a des efforts qui ont été faits par Te Fare Tauhiti Nui lors les éditions précédentes avec la diffusion des textes sur les écrans. Cette année encore, Te Fare Tauhiti Nui a considérablement amélioré le système de sonorisation et le public sera ravi de pouvoir mieux apprécier chaque prestation. Si nous voulons que le public s’intéresse davantage aux hīmene, nous devons tous ensemble faire des efforts. C’est pour cela que lors de nos rencontres avec les groupes de chant, nous avons encourager les groupes à mettre en œuvre des éléments scénographiques afin d’attirer l’attention du spectateur. Qu’il ait la curiosité de rester et d’assister à la prestation du groupe de chant. Cependant, nous devons reconnaître que nous ne pouvons pas enchainer les gens à leur siège et les forcer à aimer une prestation de hīmene. Il y a un vrai travail de fond à réaliser avec l’éducation dans notre pays : les hīmene doivent s’apprendre dans nos classes d’école. D’ailleurs, il est dommage que notre hymne ne soit pas un hīmene traditionnel de notre pays. N’ayons pas peur de nos chants, nos danses, nos musiques et nos écritures ! Assumons-les et apprenons-les dans nos écoles. Aujourd’hui, nous sommes encore incapables de chanter un chant d’accueil tous ensemble sans avoir répéter avant. L’école doit nous apprendre des chants fondamentaux de notre terre, des tārava et des ru’au, sans en faire un complexe ou un rejet. À ce moment-là, nous accepterons nos chants dans notre heiva et le public s’y intéressera sincèrement.
Un grand prix leur sera également décerné ?
"Ce prix nommé "Tumu ra'i fenua" a été mis en place à la demande des groupes. Ce Grand Prix récompensera le groupe qui aura obtenu la meilleure note au total dans les catégories Tārava, Ru’au, ‘ūte paripari et ‘ārearea. Ce prix contribuera à pousser les pupu hīmene vers l’excellence et apportera une pierre à la reconnaissance de cet art. Une reconnaissance qui est créée par nous-mêmes pour que nous prenions conscience de nos propres valeurs sans que quelqu’un d’autre nous le dise."
Autre nouveauté, le Hura Nui ?
"Avec la Maison de la Culture, on a constaté qu'il y avait beaucoup de groupes, et pour donner une certaine équité entre le 1er groupe et le dernier, nous avons voulu que tout le monde présente leur grand costume en "more". Chacun avait 10 minutes pour nous expliquer leurs costumes exclusivement en reo mā'ohi, et c'était noté. Il était important de dire aux groupes de danse qu’il était essentiel d’utiliser nos langues polynésiennes afin d’arrêter de porter ces masques de paroles carnavalesques juste pour habiller nos spectacles. Les chefs de groupes ont très bien saisi les enjeux et ont accepté sans rechigner. Les masques sont tombés et la sincérité s’est exprimée. Nous sommes au début d’une belle démarche qui ramène le heiva à l’essence même de ses valeurs. D’autres efforts doivent être effectués, nous en sommes conscients, et nous sommes déjà contents de ceux qui ont été réalisés."