Et si le territoire marin de la Polynésie s'agrandissait?


Carte générale montrant en bleu pâle les ZEE des trois territoires et les zones d’extension potentielle en rouge (source Ifremer).
PAPEETE, le 12 février 2015. Dans le cadre du dossier de demande d'extension du plateau continental au-delà des 200 milles marins, ouvert depuis le début des années 2000, la Polynésie française pourrait élargir son domaine maritime actuel de plusieurs centaines de milliers de km2. Une campagne de mesures océaniques est prévue en avril prochain.

Actuellement la ZEE (zone économique exclusive) de la Polynésie français, ce sont 4 767 242 km2 d'océan autour des cinq archipels. A elle seule, cette ZEE représente déjà 43% des surfaces maritimes françaises (autour de la métropole et des territoires ultramarins) ! Jusqu'il y a quelques années, cette superficie faite d'eau salée avait surtout une valeur utile pour la pêche et la position stratégique de la France dans cette partie du globe. Depuis peu cependant, cette superficie océanique a pris une dimension, plus industrielle et stratégique.

Grâce aux résultats de quelques études préliminaires, les ressources naturelles issues de ces fonds marins, promettent d'être particulièrement riches non seulement en encroûtements d'où pourraient être extraites les fameuses "terres rares" nécessaires à nos équipements technologiques, mais aussi en bio-ressources, uniques dans leur genre grâce à une biodiversité presque intacte et parfois même inexplorée.

Or, non seulement la Polynésie française, riche de près de 5 millions de km2
d'océan est déjà un gisement convoité, mais de plus, ce territoire maritime dispose encore de possibilités d'extension. En effet, dans le cadre du programme Extraplac (Extension raisonnée du plateau continental) lancé en 1998 par la France, un programme opérationnel a émergé autour des territoires de l'outre-mer depuis 2002. Le but du programme Polyplac est de grappiller de nouveaux espaces maritimes au-delà des 200 milles nautiques (370 km au large) de la ZEE polynésienne actuelle.


Sept zones d'extension en Polynésie


Tout cela est bien entendu extrêmement encadré par des conventions internationales sur le droit de la mer et visé, en bout de course, par la Commission des limites du plateau continental, basée à l'ONU. Il faut aussi répondre à un certain nombre de critères techniques compliqués (géologiques, sédimentologiques et morphologiques). En Polynésie française, pas moins de sept zones d'extensions possibles ont été identifiées lors d'une étude préliminaire pour lesquelles la France a déposé des informations préliminaires auprès du secrétariat général de l'ONU, " toutefois la démonstration du prolongement naturel à partir des îles de la Polynésie est fragile dans certaines de ces zones, notamment à l’ouest du fait d’un contexte géologique particulier qui ne laisse présager qu’une faible chance d’acceptation par la Commission" précise l'Ifremer dans un article publié en 2014 sur le sujet.

Aussi la priorité pour la Polynésie a été ciblée sur des zones situées
"vers l'Est de la Polynésie, où la démonstration du prolongement naturel semble plus robuste". La première campagne de mesures océanographiques Polyplac réalisée par le navire L'Atalante en septembre 2012 sur une zone située à l'Est-Sud-Est des Marquises laissait entrevoir une extension probable de 60 000 km2. Une nouvelle campagne de mesure sera effectuée cette année, L'Atalante sera en Polynésie du 21 avril au 6 mai 2015 pour effectuer des "levés bathymétriques dans le cadre du projet Extraplac" indique le programme des missions du navire de l'Ifremer. Cette fois les mesures seront effectuées dans l'Est polynésien.

L'Atalante sera en Polynésie du 3 avril au 8 mai

C'est l'un des navires hauturiers de la flotte océanographique française : L'Atalante (long de près de 85 mètres) est un navire de recherche pluridisciplinaire destiné aux géosciences marines, à l'océanographie physique et à la biologie marine. Dans quelques semaines, ce navire mènera plusieurs missions consécutives dans les eaux polynésiennes. Du 18 février au 3 avril, entre Noumea et Papeete il s'agira d'une étude sur la biogéochimie et la biodiversité dans le Pacifique tropical sud-ouest, en coopération avec des chercheurs des Etats-Unis et de Suède; du 9 au 19 avril, L'Atalante sera utilisé par le SHOM (service hydrographique et océanographique de la Marine) pour une campagne de mesures pour la Marine. Enfin, du 21 avril au 6 mai 2015, la campagne Polyplac permettra d'effectuer les levés bathymétriques dans le cadre du projet Extraplac. L'Atalante quittera Papeete le 8 mai prochain pour rejoindre la Nouvelle-Calédonie.

Une Polynésie plus grande ce n'est pas pour demain !

Même si la France est engagée depuis le début des années 2000 dans ce processus d'extension du domaine maritime de ses territoires du Pacifique (c'est aussi le cas autour de Wallis et Futuna, ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie) il ne faut pas s'attendre à récupérer ces espaces marins dans l'immédiat. Le plus important était de déposer des informations préliminaires auprès de la Commission des limites du plateau continental à l'ONU avant 2009. Ce qui a été fait. Car, ensuite les processus de reconnaissance d'extension du plateau continental sont longs : ils demandent des vérifications scientifiques, des mesures et, parfois des négociations avec des demandes provenant d'autres pays. Ce qui ne se produit pas pour la Polynésie française, très isolée. A titre d'exemple, l'Ifremer indique que l'examen par la Commission onusienne du dossier déposé pour Wallis et Futuna, fin 2012 ne démarrera pas avant 6 ou 8 ans. En Polynésie française ce sera encore plus long dans la mesure où des campagnes de mesures restent à faire et des dossiers à constituer. "Cette démarche doit être considérée comme un investissement pour le futur".

La figure ci-dessus explicite les grands zones résultantes qui, de la terre vers la mer, sont : la mer territoriale (12 milles nautiques), la ZEE (200 milles nautiques), l’extention du plateau continental en fonction des critéres explicités plus SCIENCE Avec le soutien du congrès de la Nouvelle-Calédonie. haut, le reste constituant la Zone Internationale dont les fonds marins sont administrés par l’Autorité Internationale des Fonds Marins (AIFM ou ISA, International Seabed Authority en anglais).

Rédigé par Mireille Loubet le Jeudi 12 Février 2015 à 18:25 | Lu 5109 fois