Enfants faamu, concubins notoires : des spécificités locales


PAPEETE, jeudi 22 novembre. A l’occasion de la discussion de la nouvelle loi de Pays sur les transmissions de biens à titre gratuit, les représentants de l’assemblée de Polynésie française ont longuement discuté de situations spécifiques au territoire et qui ne trouvent pas leur traduction légale dans les textes du Code civil national. C’est le cas notamment des enfants faamu ou des concubins. Dans le texte initial proposé par Pierre Frébault, le ministre en charge de la réforme fiscale, ces deux particularités locales n’apparaissaient pas. Conséquence : la transmission de patrimoine entre concubins (même pour une valeur en deçà de 50 millions de Fcfp) se retrouvait taxée ; dans le même sens, les enfants faamu se retrouvaient lésés, et contraints au paiement de droits de succession, quand bien même ils apparaissaient nommément dans une indivision. Les deux situations ont entraîné une discussion entre les élus (voir en encadré) et ont été finalement réintroduites, après divers amendements sur le texte initial. Pierre Frébault a annoncé qu’une définition précise du statut de concubinage notoire serait proposée par ses services dans le courant du mois de janvier prochain.

La nouvelle loi de Pays sur les transmissions de biens à titre gratuit entre vifs a été adoptée, ce jeudi 22 novembre, par 47 voix pour. Il n’y a eu aucune abstention, aucun vote contre. De plus, aucune condition de durée n’a été finalement introduite sur cette loi, alors que la précédente, datant de 2006 n’avait été adoptée que pour une durée de 6 ans, jusqu’à fin 2012. Au cours de ces années, de 2006 à 2012, 2057 actes notariés ont été effectués en bénéficiant de ces mesures, ce qui a démontré l’efficacité de ce dispositif ont souligné les représentants. Le nouveau texte adopté, comme le précédent, va dans le sens d’une meilleure résolution des problèmes fonciers locaux, afin de permettre de sortir plus facilement des situations d’indivision familiales complexes, mais il n’est plus limité dans le temps. Un rapport annuel de ce dispositif sera soumis aux élus de l’assemblée afin qu’ils aient en mains une évaluation de cette loi de Pays.

Les interventions des élus, la réponse du ministre

Emma Algan (Ia Ora Te Fenua)

«Ce qui m’interpelle, c’est la suppression du statut de concubinage dans le texte initial et l’introduction du Pacs (pacte civil de solidarité), ce qui n’est pas adapté dans le contexte de la Polynésie française. Le Pacs n’est même pas encore organisé dans notre pays. Cela va pénaliser tous ceux qui n’ont pas les moyens de se payer un Pacs en allant à l’extérieur du territoire. Il faut adapter ce texte à la situation locale. La reconnaissance du concubinage notoire est acceptée par la CPS ».



Teura Iriti (Tahoera’a Huiraatira)

«La population de Polynésie française n’a pas un accès facile au Pacs. Même si l’application du Pacs est étendue à notre territoire, concrètement ici il est impossible de faire enregistrer un Pacs. Aussi cela ne vaut que pour des couples venant de l’extérieur ou pour des Polynésiens qui auraient eu la chance de le faire sur un autre territoire. On le sait, la majorité des couples polynésiens ne sont pas mariés».

Pierre Frébault

«Le maintien de la situation de concubinage notoire pose des inquiétudes légitimes sur d’éventuels abus avec cette notion un peu floue. J’ai accepté de réintégrer le concubinage dans les exonérations à condition qu’une vraie définition soit introduite dans le code de procédure civile. La CPS demande pour sa part une durée de deux ans pour accepter cette notion, peut-être que pour les actes patrimoniaux on pourrait exiger cinq ans avant d’accepter une ouverture des droits ? En tout cas, il y a tout un cadre à définir. Je vais m’occuper de cette définition, laissez-moi un peu de temps, mais je pense qu’en janvier cela sera possible».

Exonération de la transmission de biens : jusqu’où ?

L’exonération des droits de succession en faveur des transmissions de biens à titre gratuit entre vifs et de certains partages est maintenue pour ceux qui entrent en ligne directe : époux, pacsés, concubins notoires, enfants, frères ou sœurs. Les enfants faamu par droit testamentaire reconnus dans une indivision bénéficient également de cette exonération.
Ces droits sont taxés à hauteur de 10% jusqu’au 4e degré de parenté : oncle, cousin ; à hauteur de 15% au-delà.
L’exonération de droits de succession dans ces cas cités précédemment est maintenue pour toute donation inférieure ou égale à 50 millions de Fcfp par donataire. Dans le cas de trois enfants, le donateur pourra donc léguer en étant exonéré de taxes jusqu’à 150 millions de Fcfp de biens. Au-delà de ce plafond de 50 millions de Fcfp/donataire il est appliqué un droit proportionnel minimal.

Rédigé par Mireille Loubet le Jeudi 22 Novembre 2012 à 16:48 | Lu 2592 fois