Energies renouvelables : EDT sous haute tension avec le gouvernement


PAPEETE, samedi 1er décembre 2012. L’entreprise EDT (Electricité de Tahiti) a été placée sur le grill par le ministre de l’environnement Jacky Bryant, jeudi à l’assemblée, durant le débat qui s’est ouvert sur les futures orientations de la politique énergétique de Polynésie. La volonté affichée du gouvernement local est de s’aligner sur les dispositions prises en France. L’objectif chiffré en Polynésie française est d’avoir au moins 50% de production électrique issue de l’exploitation des énergies renouvelables, à l’horizon 2020. Huit ans, pour passer des 30% d’électricité hydroélectrique produite à ce jour, à 50%, cela paraît un peu court, mais il faut savoir, sans doute, être ambitieux. On ne saurait reprocher au ministre de vouloir avancer rapidement alors que ce plan de développement stratégique du secteur de l’énergie est attendu depuis de nombreuses années. Mais, il y a l’art et la manière.


Jeudi depuis le banc du gouvernement dans l’hémicycle, Jacky Bryant a fait un procès à charge envers EDT,
partenaire énergétique essentiel, depuis 1960 de la Polynésie française, via un contrat de concession, pour la distribution de l’électricité. Les accusations portées par le ministre, étaient nettes : EDT est une société disposant d’une bonne rentabilité, au point de dégager des dividendes conséquents pour ses actionnaires. Aussi, laissait entendre Jacky Bryant, si le prix de l’électricité est si cher en Polynésie, cela pourrait être imputable aux marges confortables que s’accorde la société. Il estime également que le Pays dispose de très peu de moyens de contrôles sur cette société délégataire d’un service public pour la distribution de l’électricité. «Si la collectivité n’arrive pas à contrôler ce concessionnaire, celui-ci doit fournir le juste prix. J’espère que l’on finira par trouver des relations où la transparence ne sera pas une exigence, mais un élément naturel» affirmait Jacky Bryant. En attendant, le projet de loi de Pays, tel qu’il est rédigé, porterait un coup d’arrêt aux possibilités de développement de la société filiale de GDF-Suez, pour casser ce que le ministre a appelé «le monopole de fait d’EDT». Jeudi l'examen de ce projet de loi de Pays sur la politique énergétique a été ajourné et reporté Jacqui Drollet, le président de l'assemblée l'avait annoncé, "pour la semaine prochaine", mais, curieusement, il n'apparaît pas dans le programme de la 8e séance de la session budgétaire, prévue pour le jeudi 6 décembre, où le budget 2013 du Pays sera présenté.


La CTC l’avait bien dit


Jacky Bryant s’est longuement appuyé pour son discours au sujet d’EDT, jeudi, sur le rapport de la Chambre territoriale des comptes (CTC) publié en octobre 2007, sur le service public de l’électricité. A plusieurs reprises, la CTC évoque la bonne rentabilité d’EDT et le manque de contrôles qu’exerce le Pays sur son concessionnaire. Le rapport de la CTC écrit très clairement : «la société privée EDT est aujourd’hui, sous la surveillance du Pays, le principal acteur de la gestion du service public de l’électricité, jouissant d’un monopole de fait (…) Ce concessionnaire qui gère avec professionnalisme un contrat qui lui assure une bonne rentabilité, ne produisait pas à l’autorité délégante (le Pays), jusqu’à ces dernières années, de compte particulier de la concession, ce qui ne permettait pas à la collectivité d’exercer un véritable contrôle sur le service délégué».
Mais ce qu’omet de dire Jacky Bryant, c’est qu’EDT, au sujet des contrôles, est dans les clous de ce qui est réclamé par le contrat. Le rapport indique en effet : «A cet égard il peut être remarqué que le contrat ne fixe aucune obligation particulière au concessionnaire, si ce n’est la fourniture d’états statistiques prévus à l’article 28 du cahier des charges. Ces états, tenus par le concessionnaire, ne sont d’ailleurs pas réclamés par le concédant et pas fournis. Il conviendrait sur ce point de revoir les termes du contrat de concession (…) En effet, aucune disposition réglementaire ne définit à l’heure actuelle en Polynésie française le contenu des comptes actuels de la délégation, et seules les dispositions contractuelles permettent de préciser, sur ce point, les obligations du délégataire».

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Rédigé par Mireille Loubet le Vendredi 30 Novembre 2012 à 16:32 | Lu 2545 fois