En Nouvelle-Calédonie, un 14-Juillet parasité par la crise profonde qui secoue l'archipel


Crédit Delphine MAYEUR / AFP
Nouméa, France | AFP | dimanche 14/07/2024 - Un défilé officiel annulé mais des levées de couleurs loyalistes et indépendantistes et un plaidoyer pour une séparation des provinces: la célébration du 14-Juillet en Nouvelle-Calédonie a illustré dimanche la crise profonde qui secoue l'archipel depuis deux mois.

Le défilé traditionnel de la Fête nationale a été annulé à Nouméa, en raison des violences qui secouent toujours l'archipel, mais, chacun de leur côté, loyalistes et indépendantistes ont levé dimanche leurs couleurs, a constaté une journaliste de l'AFP.

En l'absence de défilé militaire, des dizaines de Calédoniens, à l'appel des partis Les Loyalistes Le Rassemblement-Les Républicains, ont organisé dimanche matin un cortège de véhicules pavoisés aux couleurs tricolores dans les rues de Nouméa.

Une manière de "montrer notre soutien aux forces de l'ordre et notre amour de la France", selon Clément, un des participants.

- Courage et dévouement -

Dans l'après-midi, ce sont les indépendantistes qui ont défilé, drapeau vert, rouge, bleu et jaune frappé de la flèche faîtière en main dans plusieurs quartiers de la capitale.

Aucun incident majeur n'a été rapporté.

Un dépôt de gerbe a été organisé au Monument aux morts, place Bir-Hakeim, en lieu et place de l'habituel défilé militaire organisé chaque année.

"Les policiers et les gendarmes sont sur le terrain, il n'était pas convenable dans ces conditions de les mobiliser sur un défilé militaire", a expliqué le Haut-commissaire de la République, Louis Le Franc à l'AFP.

Les forces de l'ordre ont toutefois été mises à l'honneur de la courte cérémonie, où la direction territoriale de la police nationale et la gendarmerie nationale se sont vues décerner la médaille pour Actes de courage et de dévouement à titre collectif. 

Deux gendarmes et huit civils ont été tués depuis le 13 mai dernier et près de 500 membres des forces de l'ordre ont été blessés, selon le Haut-commissariat.

Ce 14-Juillet a aussi été marqué sur le "Caillou" par un discours, particulièrement virulent à l'égard des indépendantistes, de la présidente de la province Sud et cheffe de file des Loyalistes, Sonia Backès.

- "Jusqu'à la mort" -

L'ex-secrétaire d'Etat a notamment estimé que "le projet d'une Nouvelle-Calédonie institutionnellement unie et fondée sur un vivre ensemble, les uns avec les autres, est révolu".

"Nos adversaires politiques prônent une identité propre, où le peuple premier qu'ils représentent majoritairement impose ses règles au-dessus de celles des autres", a également dénoncé Mme Backès, pour qui descendants d'Européens et population kanak ne partageraient pas les mêmes valeurs.

"Au même titre que l'huile et l'eau ne se mélangent pas, je constate à regret que le monde kanak et le monde occidental ont, malgré plus de 170 années de vie commune, des antagonismes encore indépassables", a-t-elle estimé.

"Qu'il s'agisse de leur manière de vivre en société, par la place qui est faite aux femmes par exemple. Qu'il s'agisse encore de leurs systèmes politiques, féodal pour les uns et démocratique pour les autres", a asséné Mme Backès.

Or, "lorsque deux forces s'opposent et que deux camps sont persuadés de défendre légitimement leurs valeurs, ils se retrouvent face à un choix. Celui de s'affronter jusqu'à la mort de l'un des deux ou de se séparer pour mieux vivre", a-t-elle résumé.

"Ainsi, l'autonomisation des provinces peut représenter une opportunité de construction de plusieurs entités distinctes mais complémentaires, où chacun des peuples pourra enfin s'épanouir selon ses propres aspirations", a poursuivi la leader loyaliste.

Elle souhaite ainsi que chaque province "récupère la compétence fiscale qui leur permettra de bâtir la société attendue par sa population".

L'accord de Nouméa signé en 1998 prévoit que, même si les résultats des référendums d'autodétermination étaient différents d'une province à l'autre, "une partie de la Nouvelle-Calédonie ne pourra accéder seule à la pleine souveraineté ou conserver seule des liens différents avec la France".

La Nouvelle-Calédonie est divisée en trois provinces, la plus importante en termes de population est la province Sud, dirigée par les Loyalistes. La province Nord et la province des Iles sont gouvernées par les indépendantistes.

Rédigé par RB le Lundi 15 Juillet 2024 à 01:42 | Lu 602 fois