Christophe ARCHAMBAULT / AFP
Pointe-à-Pitre, France | AFP | jeudi 04/05/2022 - Libérer les mangroves des entreprises qui s'y sont installées progressivement et illégalement, c'est l'une des missions du conservatoire du littoral en Guadeloupe pour redonner vie à ces forêts humides afin de réduire le risque de submersion.
"En 67 ans, la forêt humide de Jarry est passée de 320 à 180 ha, soit une perte de plus d'un tiers d'espace naturel", s'inquiète Angélique Gourdol, chargée de mission au conservatoire du littoral de Guadeloupe.
Dans le même temps, Jarry est devenue la "troisième plus grande zone industrielle de France", selon l'Insee. 31.000 salariés, le port autonome de Pointe-à-Pitre, de nombreuses entreprises industrielles et commerciales.
"On a coutume de dire que c'est le poumon économique de l'île", rappelle Angélique Gourdol, qui pilote un projet appelé Ja-Riv lancé en 2016.
"Contraction de Jarry et de Rivage", le projet vise à récupérer les terrains appartenant au Conservatoire, mais occupés illégalement par des entreprises, installées là au fil du temps, parfois depuis plusieurs dizaines d'années, a-t-elle expliqué lors d'une conférence de presse.
Le Conservatoire vise 13 hectares. "Nous en avons déjà libéré 4 et nous visons l'ensemble de ces espaces d'ici 2026", précise -t-elle. "L'objectif c'est de restaurer ces terrains en forêt marécageuse ou en mangrove, et d'implanter un sentier piéton qui ferait tout le tour de la zone centrale, soit près de 9 km".
Et les entreprises participent, bon gré mal gré. "Certaines vont jusqu'au contentieux administratif, mais globalement ça se passe bien : on négocie en bonne intelligence pour allier au mieux la contrainte économique des sociétés et l'impératif écologique", sourit Angélique Gourdol.
Généralement l'argument de la loi foncière suffit à convaincre les sociétés concernées. En effet sur ces terrains, passés du domaine public maritime au Conservatoire du Littoral en 2010, l'entreprise doit avoir un titre de propriété ou une autorisation d'occupation non expirée, sinon elle est hors la loi.
"Mais il n'y a pas que ça, souligne Angélique Gourdol. Ces terrains sont régulièrement inondés. Certains pensent qu'en construisant des digues, cela sera plus sécuritaire, mais nous pouvons expliquer et prouver qu'en enlevant du remblais on réduit le risque de submersion".
Submersions chroniques dès 2030
D'autant que la Guadeloupe, où les inondations de cette fin avril ont fait au moins un mort, est très concernée par ce risque, encore accru par le dérèglement climatique. "Dans des territoires d'îles hautes, comme la Guadeloupe, la zone de Pointe-à-Pitre, Jarry, le Raizet, qui concentre la majeure partie de la population, des infrastructures et des activités économiques du territoire sont installées à moins de 80 cm d'altitude", indiquait, dans une conférence en janvier à Paris, Virginie Duvat, autrice du volet du 6e rapport du Giec sur les petites îles.
"Ce qui fait qu'en plus des submersions de tempêtes, on s'attend à ce que la submersion soit chronique et répétée en 2030 et jusqu'à 180 jours par an, en 2060", précise-t-elle.
"Longtemps déconsidérées, les mangroves ont fait l’objet d’une attention croissante à partir des années 2000 du fait de nombreux services qu’elles fournissent : protection des côtes contre la houle et l’érosion, purification de l’eau, nurserie pour les poissons, habitat essentiel pour l’avifaune et les crustacés ou encore stockage de carbone", rappelle l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) dans un communiqué sur les mangroves.
Francesco Fautra a repris, avec ses frères, la société de son père. "Nous avons des activités dans la récupération et la collecte de déchets, dans le BTP et le transport de personnes", dit-il. Pour libérer et restaurer les espaces illégalement occupés par son père, il doit investir plus de 400.000 euros. Sans l'aide technique et financière du conservatoire, "cela chiffrerait à plus d'un million".
Pour lui, c'est à la nouvelle génération de "corriger les erreurs du passé et d'assumer celles des gens qui nous entourent. La mangrove a été colonisée par les hommes à une époque où peut-être on ne connaissait pas tout. Mais, notre génération est sensibilisée à ces problématiques. Aucun d'entre nous ne pourra dire qu'on ignorait les enjeux".
"En 67 ans, la forêt humide de Jarry est passée de 320 à 180 ha, soit une perte de plus d'un tiers d'espace naturel", s'inquiète Angélique Gourdol, chargée de mission au conservatoire du littoral de Guadeloupe.
Dans le même temps, Jarry est devenue la "troisième plus grande zone industrielle de France", selon l'Insee. 31.000 salariés, le port autonome de Pointe-à-Pitre, de nombreuses entreprises industrielles et commerciales.
"On a coutume de dire que c'est le poumon économique de l'île", rappelle Angélique Gourdol, qui pilote un projet appelé Ja-Riv lancé en 2016.
"Contraction de Jarry et de Rivage", le projet vise à récupérer les terrains appartenant au Conservatoire, mais occupés illégalement par des entreprises, installées là au fil du temps, parfois depuis plusieurs dizaines d'années, a-t-elle expliqué lors d'une conférence de presse.
Le Conservatoire vise 13 hectares. "Nous en avons déjà libéré 4 et nous visons l'ensemble de ces espaces d'ici 2026", précise -t-elle. "L'objectif c'est de restaurer ces terrains en forêt marécageuse ou en mangrove, et d'implanter un sentier piéton qui ferait tout le tour de la zone centrale, soit près de 9 km".
Et les entreprises participent, bon gré mal gré. "Certaines vont jusqu'au contentieux administratif, mais globalement ça se passe bien : on négocie en bonne intelligence pour allier au mieux la contrainte économique des sociétés et l'impératif écologique", sourit Angélique Gourdol.
Généralement l'argument de la loi foncière suffit à convaincre les sociétés concernées. En effet sur ces terrains, passés du domaine public maritime au Conservatoire du Littoral en 2010, l'entreprise doit avoir un titre de propriété ou une autorisation d'occupation non expirée, sinon elle est hors la loi.
"Mais il n'y a pas que ça, souligne Angélique Gourdol. Ces terrains sont régulièrement inondés. Certains pensent qu'en construisant des digues, cela sera plus sécuritaire, mais nous pouvons expliquer et prouver qu'en enlevant du remblais on réduit le risque de submersion".
Submersions chroniques dès 2030
D'autant que la Guadeloupe, où les inondations de cette fin avril ont fait au moins un mort, est très concernée par ce risque, encore accru par le dérèglement climatique. "Dans des territoires d'îles hautes, comme la Guadeloupe, la zone de Pointe-à-Pitre, Jarry, le Raizet, qui concentre la majeure partie de la population, des infrastructures et des activités économiques du territoire sont installées à moins de 80 cm d'altitude", indiquait, dans une conférence en janvier à Paris, Virginie Duvat, autrice du volet du 6e rapport du Giec sur les petites îles.
"Ce qui fait qu'en plus des submersions de tempêtes, on s'attend à ce que la submersion soit chronique et répétée en 2030 et jusqu'à 180 jours par an, en 2060", précise-t-elle.
"Longtemps déconsidérées, les mangroves ont fait l’objet d’une attention croissante à partir des années 2000 du fait de nombreux services qu’elles fournissent : protection des côtes contre la houle et l’érosion, purification de l’eau, nurserie pour les poissons, habitat essentiel pour l’avifaune et les crustacés ou encore stockage de carbone", rappelle l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) dans un communiqué sur les mangroves.
Francesco Fautra a repris, avec ses frères, la société de son père. "Nous avons des activités dans la récupération et la collecte de déchets, dans le BTP et le transport de personnes", dit-il. Pour libérer et restaurer les espaces illégalement occupés par son père, il doit investir plus de 400.000 euros. Sans l'aide technique et financière du conservatoire, "cela chiffrerait à plus d'un million".
Pour lui, c'est à la nouvelle génération de "corriger les erreurs du passé et d'assumer celles des gens qui nous entourent. La mangrove a été colonisée par les hommes à une époque où peut-être on ne connaissait pas tout. Mais, notre génération est sensibilisée à ces problématiques. Aucun d'entre nous ne pourra dire qu'on ignorait les enjeux".