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En Guadeloupe, les tournages de séries TV en plein boom


Crédit LIONEL BONAVENTURE / AFP
Crédit LIONEL BONAVENTURE / AFP
Sainte-Anne, France | AFP | jeudi 28/02/2024 - "Silence, ça tourne!" En T-shirt et bermuda, le réalisateur Denis Thybaud donne ses directives sur la plage de Bois Jolan, en Guadeloupe. Les cameramen sont en maillot de bain, prêts à se mettre à l'eau pour filmer les scènes aquatiques de la nouvelle série policière de TF1.

L'action se déroule sur une île non identifiée des Antilles, mais c'est bien en Guadeloupe que l'équipe de tournage a pris ses quartiers pour près de quatre mois, illustrant une tendance de fond depuis quelques années.

"J'ai discuté pendant presque deux mois avec le producteur pour expliquer à quel point la Guadeloupe était magnifique, qu'il pouvait avoir les décors qu'il recherchait", explique à l'AFP Rebecca Jean-Gilles Bering, la responsable du bureau d'accueil des tournages pour la région.

Ce jour-là, elle vient "voir si tout se passe bien, car il y avait des autorisations un peu compliquées à obtenir pour tourner sur cette plage" de la commune de Sainte-Anne.

De loin, les touristes regardent, intrigués, les allées et venues des techniciens et comédiens.

"Tourner en Guadeloupe, c'est une volonté politique, il y a des incitations", ajoute Mme Bering, citant les retombées économiques qui en découlent, entre les "hébergements, les locations de voitures et surtout le nombre de techniciens et de figurants" embauchés par les équipes de production.

Pour la série policière de TF1, provisoirement baptisée "Commandant Saint-Barth", l'équipe "tourne autour de 50 personnes, sans compter le casting, la figuration", précise Hubert Brault, le directeur de la production. Et "au moins 40% de l'équipe technique est locale", ajoute-t-il.

Cela fait "de belles additions à la cantine", sourit-il. Ce jour-là, au menu du restaurant privatisé par l'équipe, colombo de poulet ou poisson au choix.

L'archipel guadeloupéen accueille "en moyenne cinq à six tournages sur un an", souligne Mme Bering. Parmi lesquels "Meurtres au paradis", série de la chaîne britannique BBC One tournée à Deshaies (ouest) qui va entamer sa quatorzième saison.

Au total, "plus de 500 figurants sont pris sur chaque saison" de la série britannique, ajoute-t-elle. En bonus, les techniciens guadeloupéens, obligatoirement bilingues, acquièrent une expérience "qui permet d'accueillir des projets internationaux".

"Dépaysement" 

Selon le Bureau d'accueil des tournages, la série anglo-saxonne a reçu depuis 2016 trois millions d'euros d'aides de la région Guadeloupe et généré "plus de 25 millions d'euros de retombées économiques".

Si "Meurtre au paradis" a été pionnier, "cela fait peut-être trois ans qu'on sent qu'il y a un vrai mouvement, que les productions tendent à venir travailler dans les Antilles", explique entre deux prises Carole Desfassiaux, Guadeloupéenne de 48 ans et seconde assistante-réalisateur pour la série de TF1.

"Meurtres au paradis", "Meurtre aux Saintes", "Magma", "Zétoiles Caraïbes"...: Valérie Milon, directrice de l'agence de casting Or du Temps, basée au Gosier, énumère films et séries sur lesquels elle a récemment travaillé.

Son emploi du temps n'a plus rien à voir avec ses débuts en 2008 pour la série "Baie des Flamboyants" de la chaîne France Ô, disparue depuis.

"On a aussi formé des comédiens pour que les productions puissent recruter sur place", précise-t-elle. Une cinquantaine au total ont suivi une formation d'acteur et Mme Milon assure posséder un fichier d'"environ 5.000 personnes" pour des rôles ou de la figuration.

Producteurs et réalisateurs, eux, trouvent en Guadeloupe des décors de rêve et des facilités administratives liées au statut du département français. 

"Avec la particularité antillaise qu'il y a des douanes, et que c'est donc parfois un peu compliqué d'envoyer du matériel", nuance le directeur de production Hubert Brault.

Pour le réalisateur Denis Thybaud, les Antilles apportent "le dépaysement, la carte postale dont tout le monde rêve (...) surtout lorsque les téléspectateurs sont devant leur écran en plein hiver".

Lui reconnait rechercher "des paysages un peu clichés", mais aussi des "décors beaucoup plus +roots+ comme des architectures très délavées par le soleil et par le vent".

A l'image de ses collègues, Carole Desfassiaux croise les doigts pour que la tendance dure, alors que le secteur audiovisuel local reste en développement: "J'espère que ça va durer: on a besoin des tournages de l'extérieur pour pouvoir vivre".

le Jeudi 29 Février 2024 à 06:41 | Lu 641 fois