En Guadeloupe, des "geeks" sensibilisent aux risques de catastrophes naturelles


Pointe-à-Pitre, France | AFP | jeudi 23/03/2017 - Ils sont seize "geeks" à "s'être sentis concernés" par la question de la protection des populations en cas de tsunami ou de séisme: des passionnés d'informatique participent en Guadeloupe à un exercice international de simulation qui a démarré mardi.
"Caribe Wave 2017" est une simulation d'un séisme de magnitude 8,5 suivi d'un tsunami de plus de 15 m de haut lancée mardi sous l'égide de l'Unesco, et qui concerne tous les États de la Caraïbe et quelques États d'Amérique centrale et du Sud.
Une simulation annuelle depuis 2011, dont les milieux informatiques se sont saisis en 2015.
Cette année, "c'est une dizaine d'outils qui a été testée", en marge de l'exercice officiel, a expliqué Gaël Musquet, président de l'association HAND, Hackers against Natural Disasters, venue en Guadeloupe pour cet exercice de simulation.
A Marie-Galante, la Désirade et à Baie-Mahault, en partenariat avec les "makers" (nom donné aux nouveaux bricoleurs tournés vers la technologie, la robotique, etc.) de la Guadeloupe, venus du fablab local (laboratoire de fabrication ouvert au public), les hackers ont mis au point et testé plusieurs outils numériques: "Au déclenchement de l'alerte on a fait de la bathymétrie (mesure de la profondeur d'eau, vitesse des courants), de la mesure de trafic maritime et aérien, on a monté des applications de localisation de sites refuges, et bien sûr, utilisé les réseaux sociaux", raconte Gaël Musquet.
A Marie-Galante, l'immense villa qui accueille la troupe a été transformée en cellule de crise, éparpillant sur la terrasse des ordinateurs, des dizaines de fils électriques, cartes électroniques, et quelques drones. - mode "débrouillard"- Militants pour la neutralité du web, ils utilisent pour développer leurs outils uniquement des logiciels libres et mettent leur travaux à disposition de tous.
Sur la Guadeloupe continentale, les membres du fablab ont conduit une évacuation de classe d'un lycée et fait de la sensibilisation "aux bons gestes", en présentant aux élèves les règles de sécurité et un kit de communication de survie.
Ils ont par exemple expliqué comment créer une antenne réseau ou signaler sa présence. "Avec un lance-pierre on peut signaler sa présence", a expliqué Cortex, le président du fablab devant les lycéens, invités à "réfléchir en mode débrouillard".
Ils ont surtout précisé comment utiliser les outils numériques en situation extrême: c'est-à-dire en se servant uniquement d'internet et des réseaux sociaux, et en laissant le réseaux des télécommunication aux secours.
Au-delà de l'exercice, l'association HAND entend faire entendre le "problème national" de la non-utilisation des outils numériques dans les programmes de protection des populations, notamment en cas de crise majeure.
"On entend n'importe quoi sur les protocoles d'alertes" s'insurge Gaël Musquet, qui essaie, avec son équipe, de faire comprendre aux instances décisionnelles que le "cellbroadcast" (des messages d'alertes sur les réseaux cellulaires) est un outil simple, peu cher et accessible.
De son côté, il a "hacké" les messages défilants sur les auto-radios pour diffuser des messages d'alerte aux automobilistes, en fabricant un émetteur FM à l'échelle de la maison.
Cette année, l'opération Caribe Wave a mobilisé 35.000 euros. "Notre objectif c'est de montrer que c'est facile, que le problème n'est pas technique ou financier mais politique", martèle Gaël Musquet. Pour lui, "il n'y a aucun débat à avoir sur la sécurité des citoyens".
A la fin de l'exercice, samedi, le bilan de l'opération sera dressé. Les outils de l'association seront prochainement déployés dans le sud de la France, notamment en Méditerranée, pour la lutte contre les feux de forêts.

le Jeudi 23 Mars 2017 à 04:54 | Lu 1031 fois