Edouard Fritch lors de son discours dimanche soir à Pirae. Crédit photo : Desire Teivau.
Tahiti, le 1er mai 2023 – Le président sortant et leader du Tapura, Édouard Fritch, a réagi à sa défaite électorale dimanche soir en insistant sur le fait que les partis autonomistes étaient restés majoritaires en Polynésie. Il estime que l'alliance avec Gaston Flosse a fonctionné et qu'elle doit donner les bases d'une future "plateforme autonomiste".
Le Tavini a gagné, quelle est votre première réaction ?
"D’abord, il faut accepter le résultat. La messe est dite. On va laisser la place à Oscar Temaru et Moetai Brotherson, parce qu’apparemment c’est lui qui se présenterait à la présidence du Pays. Et puis, au-delà, j’ai envie de leur souhaiter : Bon vent et bon courage. Parce que le Pays a besoin de soutien, les entreprises aussi. On a beaucoup parlé des personnes en situation précaire. Maintenant ils ont l’occasion, pour les cinq ans à venir, de montrer ce dont ils sont capables de faire. De faire de mieux par rapport à nous."
Est ce qu’on peut dire que l’alliance avec le Amuitahira’a et Gaston Flosse a fonctionné ?
"Je pense que cette alliance a pas mal fonctionné. J’ai vu que le score du Tapura a bien augmenté et ce qu’il faut dire, c’est que cette alliance était naturelle. Les gens du Tapura sont aussi de la famille du Tahoera’a et je pense que la fusion n’a pas été si problématique. On peut toujours dire qu’on aurait pu atteindre un meilleur résultat. Mais il faut reconnaitre que notre alliance et notre réconciliation a apporté quelque chose de neuf dans notre pays. C’est la possibilité pour nous tous, les hommes politiques ou dans nos familles, de pouvoir se réconcilier un jour."
Vous avez accusé le A Here ia Porinetia d'être la cause de cette déroute ?
"Malheureusement, c’est un constat. Car le résultat final, c’est celui d’un parti qui n’a pas gagné le maximum de voix autour de lui par rapport aux voix des indépendantistes. Et puis, j’ai envie de dire que c’est aussi un peu de notre faute. On n’a pas su mettre en place les moyens pour se mettre d’accord. Il y a beaucoup d’incompréhension au départ et c’est vrai que si j’avais la clef du problème, on aurait pu agir autrement."
Vous avez peut-être fait la paix un peu trop tard avec Gaston Flosse ?
"On a peut-être fait la paix trop tard. Mais son intérêt a été fait au nom des Polynésiens. Vous savez, avec Gaston, on a discuté une heure. Ça n’a pas duré longtemps. Il m’a fait confiance, il m’a dit : tu regardes la liste, tu fais les choix, tu choisiras la place de mes représentants. Son souci, c’était que certes réconciliation soit représentée dans les urnes, avec des gens Amuitahira’a, mais sans exigence. On n’a pas parlé de places ni de ministères mais simplement de sauver le pays de l’indépendance et de ce mouvement indépendantiste. Mais on n’a pas réussi."
Vous pensez que votre stratégie de mettre des tāvana sur votre liste a fonctionné ?
"C’est un sujet sur lequel il va falloir porter une réflexion dans les jours à venir. Je reste convaincu, pour ma part, que les maires restent les hommes politiques les plus proches de leur population. Maintenant, est-ce qu'ils font l’unanimité ? est ce qu’ils arrivent à mobiliser leur majorité sur leur nom ? Aujourd’hui ces questions se posent. Mais franchement, sur ce Pays qui est éclaté et qui est aussi grand que l’Europe, le gouvernement ne peut pas à lui seul gouverner le Pays sans l’appui et le soutien des maires. Lorsqu’il y a un problème dans une des vallées des Marquises, qui peut nous informer sur les difficultés rencontrées à part les maires. On ne peut pas retirer ça. Après, est-ce que ce sont eux qui peuvent nous amener des voix et faire gagner une liste, la question se pose. Mais sur le rôle que joue un maire dans une démocratie, il n’y a personne d’autre qu’eux."
Vous pensez que certains maires vont basculer au Tavini ?
"Je ne pense pas. Ils ont bien compris ma stratégie. Dès le départ, je les ai invités à travailler ensemble. J’ai fait des maires de véritables partenaires dans notre stratégie de gouvernance. Ai-je donné trop de confiance aux maires ou suis-je allé au-delà des limites ? Je reste convaincu de leur rôle fondamental, c’est ce que je retiens et jusqu’à aujourd’hui, je n’ai pas la preuve du contraire."
Le Tavini va aller en novembre prochain à New-York, où vous êtes également allé. Vous rappeliez à l’époque que les autonomistes étaient majoritaires à l’assemblée, c’est encore le cas aujourd’hui ?
"Ils sont majoritaires à l’assemblée. J’ai le plus souvent dit, à New York, que c’est la majorité de la population polynésienne qui n’est pas indépendantiste. En ajoutant notre nombre de voix et celui du A Here ia Porinetia, il y a plus de 55% des voix, presque 60%, qui sont pour l’autonomie."
Pour vous, c’est quand même l’autonomie qui a gagné ce soir ?
"Dans le cœur et l’esprit des gens oui. Mais malheureusement il n’y a pas que ça. Il y a l’expression populaire qui fait que le nombre de sièges est plus important du côté des indépendantistes. Mais il ne faut pas baisser les bras. Je retiens toujours l’idée de Gaston Flosse, pour que demain nous puissions constituer une vraie plateforme autonomiste où nous mettrions de côté nos égos pour mettre en avant notre humilité et notre sens du service public. C’est-à-dire se mettre ensemble pour défendre une population, car la voix de l’indépendance est difficile aujourd’hui pour la Polynésie."
Cette humilité, vous pensez l'avoir respecté lors de ces cinq dernières années ?
"Il ne faut pas me parler d’humilité. Me mettre avec Gaston Flosse après tout ce qu’il a dit sur le Tapura… Je n’avais d’ailleurs jamais répondu à ses invectives parce que j’estimais que ce n’était pas mon devoir. Je suis l’un de ses enfants en politique. Il m’a formé, j’ai grandi sous son éducation. Sur le plan familial c’est important aussi. J’ai toujours eu du respect pour ce grand homme."
Même après deux ans de discours de Gaston Flosse sur l'indépendance ?
"Je l’ai dit et je le redis. Gaston Flosse a toujours dix-quinze ans d’avance sur nous. Quand il avait parlé du statut de 2004, c’était en 1995, avec l’arrivée de Jacques Chirac. C’est vrai qu’il a pensé au Pays souverain. Mais son équation était difficile, car il voulait un pays souverain mais toujours avec la France en partenaire. Nous qui sommes obligés aujourd’hui de gérer les affaires publiques, nous avons besoin de la France. Avec les enseignants pour nos enfants, car ils ont le droit à l’éducation. Aujourd’hui l’éducation coute près de 60 milliards de Fcfp à l’État. Si on veut changer, il faudra prévoir comment on peut changer et remplacer ce soutien de l’État pour l’éducation. Je n’ai pas de réponde à ça, mes amis indépendantistes d’ailleurs. Nous sommes dans une période où une troisième guerre mondiale est en train de se préparer, qu’est-ce qu’on va mettre sur la mer pour défendre nos territoires ? Des bénitiers ? On ne peut pas se permettre ça."
Le Tavini a gagné, quelle est votre première réaction ?
"D’abord, il faut accepter le résultat. La messe est dite. On va laisser la place à Oscar Temaru et Moetai Brotherson, parce qu’apparemment c’est lui qui se présenterait à la présidence du Pays. Et puis, au-delà, j’ai envie de leur souhaiter : Bon vent et bon courage. Parce que le Pays a besoin de soutien, les entreprises aussi. On a beaucoup parlé des personnes en situation précaire. Maintenant ils ont l’occasion, pour les cinq ans à venir, de montrer ce dont ils sont capables de faire. De faire de mieux par rapport à nous."
Est ce qu’on peut dire que l’alliance avec le Amuitahira’a et Gaston Flosse a fonctionné ?
"Je pense que cette alliance a pas mal fonctionné. J’ai vu que le score du Tapura a bien augmenté et ce qu’il faut dire, c’est que cette alliance était naturelle. Les gens du Tapura sont aussi de la famille du Tahoera’a et je pense que la fusion n’a pas été si problématique. On peut toujours dire qu’on aurait pu atteindre un meilleur résultat. Mais il faut reconnaitre que notre alliance et notre réconciliation a apporté quelque chose de neuf dans notre pays. C’est la possibilité pour nous tous, les hommes politiques ou dans nos familles, de pouvoir se réconcilier un jour."
Vous avez accusé le A Here ia Porinetia d'être la cause de cette déroute ?
"Malheureusement, c’est un constat. Car le résultat final, c’est celui d’un parti qui n’a pas gagné le maximum de voix autour de lui par rapport aux voix des indépendantistes. Et puis, j’ai envie de dire que c’est aussi un peu de notre faute. On n’a pas su mettre en place les moyens pour se mettre d’accord. Il y a beaucoup d’incompréhension au départ et c’est vrai que si j’avais la clef du problème, on aurait pu agir autrement."
Vous avez peut-être fait la paix un peu trop tard avec Gaston Flosse ?
"On a peut-être fait la paix trop tard. Mais son intérêt a été fait au nom des Polynésiens. Vous savez, avec Gaston, on a discuté une heure. Ça n’a pas duré longtemps. Il m’a fait confiance, il m’a dit : tu regardes la liste, tu fais les choix, tu choisiras la place de mes représentants. Son souci, c’était que certes réconciliation soit représentée dans les urnes, avec des gens Amuitahira’a, mais sans exigence. On n’a pas parlé de places ni de ministères mais simplement de sauver le pays de l’indépendance et de ce mouvement indépendantiste. Mais on n’a pas réussi."
Vous pensez que votre stratégie de mettre des tāvana sur votre liste a fonctionné ?
"C’est un sujet sur lequel il va falloir porter une réflexion dans les jours à venir. Je reste convaincu, pour ma part, que les maires restent les hommes politiques les plus proches de leur population. Maintenant, est-ce qu'ils font l’unanimité ? est ce qu’ils arrivent à mobiliser leur majorité sur leur nom ? Aujourd’hui ces questions se posent. Mais franchement, sur ce Pays qui est éclaté et qui est aussi grand que l’Europe, le gouvernement ne peut pas à lui seul gouverner le Pays sans l’appui et le soutien des maires. Lorsqu’il y a un problème dans une des vallées des Marquises, qui peut nous informer sur les difficultés rencontrées à part les maires. On ne peut pas retirer ça. Après, est-ce que ce sont eux qui peuvent nous amener des voix et faire gagner une liste, la question se pose. Mais sur le rôle que joue un maire dans une démocratie, il n’y a personne d’autre qu’eux."
Vous pensez que certains maires vont basculer au Tavini ?
"Je ne pense pas. Ils ont bien compris ma stratégie. Dès le départ, je les ai invités à travailler ensemble. J’ai fait des maires de véritables partenaires dans notre stratégie de gouvernance. Ai-je donné trop de confiance aux maires ou suis-je allé au-delà des limites ? Je reste convaincu de leur rôle fondamental, c’est ce que je retiens et jusqu’à aujourd’hui, je n’ai pas la preuve du contraire."
Le Tavini va aller en novembre prochain à New-York, où vous êtes également allé. Vous rappeliez à l’époque que les autonomistes étaient majoritaires à l’assemblée, c’est encore le cas aujourd’hui ?
"Ils sont majoritaires à l’assemblée. J’ai le plus souvent dit, à New York, que c’est la majorité de la population polynésienne qui n’est pas indépendantiste. En ajoutant notre nombre de voix et celui du A Here ia Porinetia, il y a plus de 55% des voix, presque 60%, qui sont pour l’autonomie."
Pour vous, c’est quand même l’autonomie qui a gagné ce soir ?
"Dans le cœur et l’esprit des gens oui. Mais malheureusement il n’y a pas que ça. Il y a l’expression populaire qui fait que le nombre de sièges est plus important du côté des indépendantistes. Mais il ne faut pas baisser les bras. Je retiens toujours l’idée de Gaston Flosse, pour que demain nous puissions constituer une vraie plateforme autonomiste où nous mettrions de côté nos égos pour mettre en avant notre humilité et notre sens du service public. C’est-à-dire se mettre ensemble pour défendre une population, car la voix de l’indépendance est difficile aujourd’hui pour la Polynésie."
Cette humilité, vous pensez l'avoir respecté lors de ces cinq dernières années ?
"Il ne faut pas me parler d’humilité. Me mettre avec Gaston Flosse après tout ce qu’il a dit sur le Tapura… Je n’avais d’ailleurs jamais répondu à ses invectives parce que j’estimais que ce n’était pas mon devoir. Je suis l’un de ses enfants en politique. Il m’a formé, j’ai grandi sous son éducation. Sur le plan familial c’est important aussi. J’ai toujours eu du respect pour ce grand homme."
Même après deux ans de discours de Gaston Flosse sur l'indépendance ?
"Je l’ai dit et je le redis. Gaston Flosse a toujours dix-quinze ans d’avance sur nous. Quand il avait parlé du statut de 2004, c’était en 1995, avec l’arrivée de Jacques Chirac. C’est vrai qu’il a pensé au Pays souverain. Mais son équation était difficile, car il voulait un pays souverain mais toujours avec la France en partenaire. Nous qui sommes obligés aujourd’hui de gérer les affaires publiques, nous avons besoin de la France. Avec les enseignants pour nos enfants, car ils ont le droit à l’éducation. Aujourd’hui l’éducation coute près de 60 milliards de Fcfp à l’État. Si on veut changer, il faudra prévoir comment on peut changer et remplacer ce soutien de l’État pour l’éducation. Je n’ai pas de réponde à ça, mes amis indépendantistes d’ailleurs. Nous sommes dans une période où une troisième guerre mondiale est en train de se préparer, qu’est-ce qu’on va mettre sur la mer pour défendre nos territoires ? Des bénitiers ? On ne peut pas se permettre ça."