Édouard Fritch à la Maison Blanche


Tahiti, le 26 septembre 2022 – Le président Édouard Fritch s'est envolé lundi soir pour participer à Washington à un sommet entre les États-Unis et les chefs d'État et de gouvernement des îles du Pacifique. Le sujet est géopolitique, c'est l'influence de la Chine et des États-Unis dans cette zone du monde”, ne s'y trompe pas le président du Pays.
 
Géopolitique du Pacifique, cas pratique. Le président du Pays, Édouard Fritch, s'est envolé lundi soir pour les États-Unis afin de participer à Washington au tout premier “US-Pacific Island Leader summit”. Comprenez : Sommet entre les États-Unis et les chefs d'État et de gouvernement des îles du Pacifique. Une première dans l'histoire de la diplomatie américaine, qui n'a évidemment rien d'anodin dans le contexte géopolitique de la rivalité entre les deux grandes puissances : Chine et États-Unis.
 
À la table des grands
 
Si le président de la Polynésie française s'est retrouvé invité par le Président américain Joe Biden à participer à ce sommet international, c'est en raison de la qualité de membre du Forum des îles du Pacifique de la Polynésie française. “Tous les Pays du Pacifique n'étaient pas invités au départ à Washington. Il n'y en avait qu'une seule partie”, a détaillé lundi matin le président Édouard Fritch, en marge de la cérémonie de prise de fonction du haut-commissaire à Papeete. “Et lors de la réunion de la semaine dernière du PICL (Pacific Island Conference of Leaders) à Honolulu, les membre du Forum se sont réunis pour décliner l'invitation si tous les Pays n'y allaient pas.” Les États-Unis se sont rangés à la voix du Forum. Tous les Pays, Polynésie française comprise, sont invités.
 
La délégation polynésienne est restreinte. Édouard Fritch est accompagné des seuls chefs de service de la direction des affaires internationales, européennes et du Pacifique, Manuel Terai, et du chargé de mission des affaires européennes et du Pacifique, Thierry Catteau. Il participera à ce sommet prévu sur deux jours, les mercredi 28 et jeudi 29 septembre, avec trois axes programmatiques. Les deux premiers seront abordés mercredi au Département d’État américain : d'une part la lutte contre le changement climatique et la transformation vers l’énergie propre, d’autre part la gestion des océans et la lutte contre la pêche illégale. Le troisième axe, point fort du sommet, sera abordé jeudi en présence du Président des États-Unis, Joe Biden, autour des relations stratégiques entre les États-Unis et les États du Pacifique. Le sommet se clôturera ensuite par une photo de famille et un dîner officiel à la Maison Blanche, précise le service de communication de la présidence. Polynésienne, celui-ci.
 
“L'armée française pour nous protéger”
 
Ce sommet américain fait en tous cas couler beaucoup d'encre depuis un mois. En juillet dernier, la vice-présidente américaine Kamala Harris avait déjà prononcé un discours virtuel au Forum des îles du Pacifique, annonçant un engagement plus prégnant des États-Unis dans la région, l'ouverture de cinq nouvelles ambassades, le retour du “Corps de la paix” –une agence indépendante américaine– dans la région et des propositions d'aides sonnantes et trébuchantes. En août, la secrétaire adjointe du département d'État américain Wendy Sherman et l'ambassadrice en Australie, Caroline Kennedy, s'étaient également rendues aux Îles Salomon pour le 80e anniversaire de la campagne de Guadalcanal… L'objectif est évidemment de marquer son territoire dans une région stratégique déjà lorgnée, et parfois même déjà investie, par la Chine.
 
Au milieu de cette âpre lutte d'influence, Édouard Fritch a tenu à souligner lundi que la position de la Polynésie française n'était pas exactement la même que celle de ses voisins du Pacifique. “Il faut comprendre que si nous n'avons trop à craindre de ce que la guerre en Ukraine pourrait dégénérer –parce que nous sommes un pays chanceux, que nous avons une armée, l'armée française pour nous protéger– d'autres pays sont dans une forte crainte. Que vont faire les Chinois ? Que vont faire les Américains ? Vont-ils protéger comme un seul homme l'ensemble du Pacifique ?”
 
Au milieu, la Polynésie
 
Mais pas question pour autant de prendre position pour le président du Pays. “Derrière toutes ces demandes du Forum et tous ces mouvements que nous menons aujourd'hui au niveau du Forum, il y a la recherche de la Paix et de la protection maximum pour nos différents Pays”, explique Édouard Fritch. “Les États-Unis, vous l'avez vu il y a deux jours, déploient de plus en plus des moyens militaires importants, des gardes côte vont être lancés pour lutter contre la pêche illicite, la protection des zones maritimes. Tout ça n'a qu'un objectif en fin de compte, c'est de maintenir la Paix dans le Pacifique.”
 
Et du côté des ambitions chinoises dans le Pacifique, pas question non plus pour Édouard Fritch d'être alarmiste. “Je ne crois pas qu'il y ait une inquiétude sur les Routes de la Soie ou sur les axes de développement dans les Pays du Pacifique”, estime le président polynésien. “Tous sont demandeurs. Tous ceux qui veulent contribuer au développement des îles, à créer de l'emploi dans nos îles, sont les bienvenus. Il n'y a aucun sujet là-dessus. Le sujet est géopolitique, c'est l'influence de la Chine et des États-Unis dans cette zone du monde.” Et la petite Polynésie y a rarement été aussi grande.
 

Rédigé par Antoine Samoyeau le Lundi 26 Septembre 2022 à 20:59 | Lu 2756 fois