Édouard Fritch : “J'aide les communes de l'opposition comme j'aide les autres”


Tahiti, le 12 septembre 2022 – À l'occasion de l'ouverture du 31e Congrès des communes, lundi, le président du Pays et maire de Pirae, Édouard Fritch, était interrogé sur l'importance de ce rendez-vous avec les tāvana à quelques mois des élections territoriales. Il assure ne faire aucune distinction entre les communes, quelle que soit leur couleur. Il aborde également le partage de certaines compétences du Pays avec les communes et la question de la cherté de la vie.
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Ce Congrès des communes, c'est un rendez-vous politique à ne pas rater ?
“Je ne sais pas, il faut demander ça aux autres. Moi je suis maire d'une commune, j'ai toujours participé aux réunions du SPC. Effectivement, ça peut être une réunion importante sur le plan politique, mais je me garde bien d'instrumentaliser les maires. Parce que je le fais toute l'année, vous risquez de me dire en aidant les communes, vous les achetez. Non. Je suis maire, je sais bien la difficulté que connaissent nos communes, qui sont les premiers et les derniers recours de nos populations. Elles ne vont pas chercher les représentants à l'assemblée ou un ministre, elles vont auprès des maires, il ne faut pas les abandonner. C'est la raison pour laquelle j'ai décidé depuis 2015 de ne pas faire de différence entre les maires. J'aide Oscar Temaru, Antony Géros, j'aide les communes de l'opposition comme j'aide les autres. Il n'y a aucune commune qui est mise de côté.”

Vous allez présenter deux projets de loi à l'assemblée prochainement qui concernent les communes. Il s'agit de certaines compétences du Pays qui seront cédées aux communes ?
“Non, ce n'est pas tout à fait comme ça. Ce qui est demandé aujourd'hui par les maires, c'est de pouvoir exercer certaines compétences qui rentrent dans la vie sociale des communes, comme ce que je suis en train de faire à Pirae, les Jeux de Pare Nui, je m'occupe de ma jeunesse. C'est normal que les maires puissent le faire. Mais la jeunesse n'est pas de la compétence des communes, tout comme le social, le développement économique. Donc nous sommes en train de regarder dans quelle mesure nous pouvons partager ces compétences avec les communes. C'est l'objet des deux projets de loi que je vais soumettre très rapidement à l'assemblée de la Polynésie française de façon à ce qu'on puisse définir le cadre. Ensuite, ce ne sera pas une compétence générale, je vais travailler avec chaque commune pour voir quelle compétence la commune en question souhaite exercer. Parce qu'il y a des difficultés, certaines communes voient certaines de leurs dépenses refusées, ou subissent des reproches de la part de la cour des comptes. Donc on va essayer de sécuriser les maires sur ces différents articles.”

Quelles sont les grandes compétences que désirent les maires ?
“Ce sont des compétences qui étaient déjà exercées. Tous les maires s'occupent de leur jeunesse, ils ont des associations, ils s'occupent du social, on aide les familles. Ce sont des habitudes qui ont été prises mais qui sont aujourd'hui formellement interdites. Donc je souhaite régulariser ce genre de situation afin que ces maires ne soient pas exposés. Et je pense notamment aux jeunes. Par exemple, au moment du Covid, les communes sont intervenues au niveau des transport, de l'alimentation.”

Ce sont des compétences que les communes exercent déjà. Est-ce que le budget va aller avec ?
“Pour le moment, il n'est pas question encore de budget, cela dépendra de la façon dont seront déléguées ces compétences. Aujourd'hui, l'urgence pour les communes, ce n'est pas de chercher de l'argent, c'est de sécuriser leurs fonctions. Le fait qu'on limite les compétences de nos communes, c'est spécifique à la Polynésie française. Il y a eu une extension de ces compétences à l'Assemblée nationale, où on a imposé le traitement des ordures ménagères, l'assainissement des eaux et l'eau potable, qui étaient des compétences exercées indirectement par le Pays. Mais ces compétences, elles n'en voulaient pas, parce que ça coûte excessivement cher. Mais par contre, les compétences de la vie quotidienne, oui.”

Dans son discours, Antony Géros parlait de la cherté de la vie et que Pays, État et communes devraient faire des efforts. Pour les communes, il s'agit par exemple de revoir les redevances et les dépenses, pour le Pays, il parle d'allègement de la pression fiscale pour les entreprises et les familles…
“Le Pays a déjà beaucoup fait. Nous n'avons pas augmenté les hydrocarbures de janvier à juin de cette année, ça nous a coûté près de 8 milliards de Fcfp. Si vous me demandez de baisser la pression fiscale, c'est-à-dire que j'ai moins de recettes, et que vous me demander de baisser le fioul qui coûte excessivement cher, c'est pratiquement 1 milliard par mois, pour soutenir le prix des hydrocarbures, même s'il y a des élections, je ne peux pas envoyer mon pays à la catastrophe. Nous avons beaucoup fait, nous avons retiré la TVA sur les textiles, sur les produits de grande consommation. On a allégé. Maintenant, je suis en train de regarder si on peut continuer à alléger ou alors essayer d'augmenter les minima sociaux pour ceux qui souffrent. Je trouve que cette augmentation des prix, c'est déplorable. Malheureusement, le gouvernement n'a pas la main dessus. Si nous produisions notre café ou notre beurre, on n'aurait pas de problème, le gouvernement pourrait dire aux agriculteurs de baisser leurs prix. Mais là, on achète en Nouvelle-Zélande ou en Chine et lorsqu'on fait transporter jusqu'à Papeete, le prix du fret a triplé. Donc on essaie de discuter avec ces gens-là pour que les augmentations soient plus raisonnables. Mais ce n'est pas facile et je dois continuer à nourrir la CPS et l'hôpital. Il y a des obligations sur lesquelles je ne peux pas revenir.”
 
Dans ce contexte, ça aiderait que l'État annule la dette comme ça a été demandé pendant le discours ?
“Les Calédoniens l'ont demandé, je n'ai pas la même philosophie. Lorsque je demande à emprunter de l'argent à quelqu'un, je rembourse mes dettes. Tony Géros disait qu'il y avait 75 entreprises qui risquent d'être en difficulté parce qu'elles doivent rembourser leur PGE. Il faut discuter avec l'État. Je sais qu'il y a eu déjà des aménagements pour étaler les paiements. Je ne pense pas que l'État souhaite la faillite de nos entreprises. Effacer la dette, ce serait de la démagogie et l'État n'accédera pas à ce type de demande. Il faut être raisonnable, il ne faut pas faire rêver les gens. Mais si l'État accepte pour la Nouvelle-Calédonie, ne vous inquiétez pas, nous demanderons la même chose.”

 

Rédigé par Anne-Laure Guffroy le Lundi 12 Septembre 2022 à 20:11 | Lu 1349 fois