Divorce par consentement mutuel chez le notaire : la Polynésie devra attendre


PAPEETE, le 03 janvier 2017 - Si un décret d’application métropolitain modifie la procédure de divorce par consentement mutuel depuis le 1er Janvier, ce changement ne pourra pas être appliqué en Polynésie de sitôt.

Depuis le 1er janvier, les couples en instance de divorce n'ont plus à passer devant un juge des affaires familiales. En effet, un décret d'application publié au journal officiel de la République, qui s'applique de "plein droit" en Polynésie, réforme la procédure de divorce par consentement mutuel. Selon ce dernier, les époux, accompagnés chacun de leur avocat, signent une convention de séparation devant un notaire. Le document rédigé par les avocats listera les intérêts de chacun, la convention est ensuite signée par le couple en instance de séparation, puis contresignée par les avocats avant d'être déposé au "rang des minutes d'un notaire". Cette procédure ne s'applique pas aux couples ayant des enfants mineurs. L'objectif de ce décret est de simplifier la procédure et de l'accélérer, mais selon les hommes de lois, la Polynésie devra attendre.

Me Brugmann, président de la chambre des notaires, indique "ce décret est applicable de plein droit, encore faut-il qu'on nous donne les moyens de l'appliquer. Aujourd'hui, ce n'est pas le cas. Il est d'ailleurs plus que probable qu'on ne puisse pas l'appliquer localement, car le code de procédure locale doit être mis à jour. C'est trop tôt pour la Polynésie, nous ne nous sommes pas encore penchés sur la question", explique le notaire. Il ajoute "dans la profession nous n'étions pas spécialement pour. Quelque part, il va y avoir des partages inégaux. Ici le notaire n'est qu'un dépositaire. Il aurait fallu associer les notaires à la rédaction de la convention de séparation."

De son côté, le bâtonnier du barreau de Papeete, Me Quinquis, explique "ce décret ne concerne que les procédures par consentement mutuel. L'essentiel du divorce par consentement mutuel, c'était souvent la liquidation de la communauté qui devait intervenir nécessairement pendant la procédure de divorce et dès lors qu'il y avait des biens immeubles ça se faisait toujours par notaire. Les modifications sont donc relativement mineures. Il n'y a pas de quoi être vent debout contre cette réforme."

Néanmoins, Me Quinquis doute de la simplification de la procédure, "maintenant est-ce que ce décret présente une avancée. Permettez-moi d'être très dubitatif, parce que je ne suis pas convaincu qu'un notaire qui, en général, n'est pas réputé pour sa rapidité, soit plus efficace, en la matière qu'un juge."

Il ajoute par ailleurs, qu'"à l'heure où on parle beaucoup de l'accès au droit", imposer un avocat à chacune des parties alors qu'un simple médiateur suffisait peut augmenter les frais de procédures, "ça laisse dubitatif". Le bâtonnier ajoute par ailleurs, "ça peut effectivement être dissuasif pour les familles puisque les couples pour lesquels il n'y avait pas de difficultés et qui n'avaient pas de biens immeubles à partager pouvaient parfaitement divorcer par simple consentement mutuel sans avocat, sans notaire en allant uniquement devant le juge. Maintenant ce sera quelque chose d'impossible ce qui va renchérir le coût."

Enfin pour ce qui est de l'application du décret en Polynésie, le bâtonnier note que le texte n'est pas applicable tel quel en Polynésie. "C'est une matière qui dépend directement de l'État. Maintenant, certains textes d'application peuvent être de la compétence de la Polynésie française et celle-ci n'a pas encore pris les textes. Il peut y avoir des difficultés dans les semaines qui suivent." Il rappelle par ailleurs qu'"il appartient au législateur local de se pencher sur la question éventuellement en concertation avec le bâtonnier. Si on me demande mon avis à ce stade-là c'est bien volontiers que je le donnerais", conclut Me Quinquis.

Rédigé par Marie Caroline Carrère le Mardi 3 Janvier 2017 à 17:10 | Lu 7039 fois