Développer le suivi local dans nos lagons


Une dizaine de volontaires engagés dans la préservation du lagon ont bénéficié de cette formation (Crédit : Anne-Charlotte Lehartel).
Tahiti, le 26 septembre 2024 – Une formation de trois jours s’est tenue cette semaine, à Papara, autour d’une “boîte à outils” visant à faciliter le suivi communautaire en milieu marin. Importée d’Australie et expérimentée dans plusieurs pays du Pacifique, cette méthode a été adaptée à la Polynésie autour de trois grands axes : les poissons, les invertébrés et les récifs coralliens.

 
Tablettes de plongée, masques et tubas étaient de sortie, ce jeudi, dans la zone de pêche réglementée (ZPR) de Papara. Il s’agissait de la dernière étape d’une formation de trois jours organisée par la Direction des ressources marines (DRM), en collaboration avec le bureau d’études australien C2O Pacific et la fédération des rāhui de Tahiti, Te Marae Mo’a, dans le cadre du programme Fonds Pacifique.
 
Entre théorie et pratique, une dizaine de volontaires de tous âges engagés dans la préservation du lagon ont été initiés à une méthode de suivi simplifiée, façon “boîte à outils” autour de trois modules : le suivi des captures de poissons, le comptage des invertébrés (oursins, bénitiers, etc.) et le suivi des récifs coralliens.
 

Chaque mise en pratique est précédée d’un volet théorique.

Éclairer la prise de décision


“On cherche à mettre en place des suivis des zones de pêche réglementée en science participative, c’est-à-dire en incluant la population dans la démarche”, explique Magali Verducci, chargée de projet ZPR à la DRM. “La méthodologie est adaptée pour qu’elle puisse être mise en œuvre de façon autonome par les communautés, avec la collecte des données, leur analyse et l’exploitation des résultats. Soit il n’y a pas de mesures de gestion en place, donc c’est une façon d’assurer un suivi pour voir si les stocks de poissons sont en bonne santé ou pas, et s’il y a un signal d’alerte sur une espèce, ça peut permettre de comprendre pourquoi, pour mettre en place des mesures adaptées, quand c’est nécessaire. Et quand il y a déjà des mesures de gestion, le but est de savoir si ça fonctionne ou pas.”
 
Deux guides bilingues français-tahitien servent de support, résumant la méthode et compilant des formulaires de suivi. Fredo Villierme, résident de Mahina militant en faveur d’une pêche durable, n’a pas hésité à se jeter à l’eau pour s’approprier la méthodologie. “Être formé, c’est indispensable pour gérer nos ZPR. Par la suite, on espère pouvoir former d’autres personnes à notre tour”, confie-t-il.
 
Membre du comité de gestion du rāhui de Tautira, Maguy Grimaud-Breton avait désormais hâte de pouvoir expérimenter cette méthode chez elle, “pour pouvoir visualiser l’état de santé de notre lagon”.
 
Il s’agissait de la deuxième session de formation au Fenua, une première approche ayant déjà été menée à Moorea, l’an dernier. D’autres rendez-vous similaires devraient être programmés pour poursuivre la diffusion de cette méthode.
 

Ce jeudi, le module ciblait le suivi des récifs coralliens.

David Welch, biologiste australien (C2O Pacific) : “De bons résultats”

“Je suis venu plusieurs fois en Polynésie pour développer une boîte à outils pensée spécialement pour les communautés locales. Avec mes collègues, nous avons commencé en 2016 au Vanuatu, et ça a depuis été adapté dans plusieurs territoires du Pacifique, comme les îles Salomon et Marshall, et Wallis-et-Futuna. Cette semaine, nous avons partagé la méthode à des volontaires de Tahiti, pour qu’ils puissent la comprendre et l’utiliser pour leurs propres besoins. C’est une approche moins technique que ce que pourraient faire des scientifiques, mais avec de bons résultats. Quand on compare les données, c’est encourageant, car elles sont souvent similaires.”

Mihiraa Clark, pêcheur de Mataiea : “Je suis prêt à m’impliquer”

“Je me suis porté volontaire pour cette formation. J’assiste régulièrement à des réunions autour du rāhui. Si je m’intéresse à ce genre d’action pour la préservation de notre lagon, c’est pour nos enfants plus tard. Ça permet de mieux comprendre les enjeux pour l’environnement. Je suis prêt à m’impliquer pour faire des plongées de suivi, en sachant que je suis tout le temps dans la mer. J’espère pouvoir convaincre certains de mes amis que c’est important.”

Rédigé par Anne-Charlotte Lehartel le Jeudi 26 Septembre 2024 à 19:02 | Lu 1943 fois