Des tāvana dans le tourbillon de la vie chère


Paris, le 20 novembre 2024 - Une forte délégation de tāvana et d'élus municipaux a fait le déplacement à Paris pour alerter leurs collègues et le gouvernement central sur la vie chère et les problèmes particuliers aux cinq archipels de Polynésie.
 

“Une crise sociale très grave”, “une vie chère extrême et inadmissible”, “des quartiers qui ressemblent à des bidonvilles” : les problèmes décrits par les maires de Guyane, de Guadeloupe, de la Martinique ou encore de La Réunion, sont aussi ceux des élus du Fenua. “Nous aussi, sur les îles basses des Tuamotu, nous avons un problème d'accès à l'eau potable, confirme par exemple Yseult Butcher, tāvana de l'atoll de Hao. Le problème de la vie chère dans son ensemble est exacerbé pour nous, habitants des îles éloignées de Tahiti. Le ravitaillement nous coûte très cher. Nous attendons un grand soutien de l'État. Échanger avec nos collègues de l'Outre-mer est très important.”
 
Faire connaître des situations – et des demandes d'aide – particulières comme celle des Tuamotu est l'enjeu principal des élus du Fenua qui participent cette semaine au 106e Congrès des maires à Paris. En comptant pas moins de 240 émissaires, maires et élus municipaux ainsi que responsables administratifs confondus, la Polynésie représente la plus forte délégation ultramarine cette année.
 
“Nous étions en Guadeloupe la semaine dernière pour travailler avec notre association des communes d'Outre-mer (Accdom), complète Cyril Tetuanui, président du Syndicat pour la promotion des communes de Polynésie française (SPCPF), tāvana de Tumaraa, à Raiatea. Le but est de porter ensemble la voix des Outre-mer au plus haut niveau de l'État. Le problème de la vie chère est très grave. L'ensemble des Outre-mer est uni pour trouver une solution avant que nous arrivions à la situation extrême de la Guadeloupe et de la Martinique.”
 
Depuis le 1er septembre dernier, la Martinique est secouée par un mouvement social de grande ampleur initié par un collectif, le Rassemblement pour la protection des peuples et des ressources Afro-Caribéens (RPPRAC). Manifestations, actions citoyennes, blocage de certains supermarchés, violences urbaines et nocturnes rythment le quotidien des habitants.

“L'éloignement contribue durement à la cherté de la vie !”

Lors des dernières semaines mouvementées qu'il a traversées, le maire de la commune martiniquaise du François, Samuel Tavernier, s'est parfois senti “impuissant” et peu soutenu par les forces de l'ordre qui lui ont fait défaut et ont manqué de “coordination” en plusieurs occasions. Ce Congrès des maires était l'occasion pour lui d'en parler publiquement. “Beaucoup de violence aurait pu être évitée”, déplorait-il à l'adresse de ses collègues.
 
“En Polynésie, nous avons des difficultés supplémentaires, complétait ce lundi le maire de Punaauia, Simplicio Lissant, à cette tribune du Congrès des maires. Nos 118 îles sont éparpillées et l'éloignement contribue durement à la cherté de la vie !”
 
Mis en cause à plusieurs reprises pour ses actions, son manque d'initiative, voire ses intentions supposées, le gouvernement central était présent au Congrès des maires pour se défendre, en la personne du ministre des Outre-mer, François-Noël Buffet. “L'heure de vérité est arrivée sur la vie chère : il est temps de mettre de l'ordre dans cette affaire !” a déclaré le locataire de la rue Oudinot d'un ton martial.
 
Tout en rappelant qu'il se lançait dans “la bataille budgétaire” afin d'obtenir des crédits – l'enveloppe de son ministère est en baisse de près de 300 millions d'euros – le ministre a promis que les effets de son action seraient visibles “dans un délai rapide, au premier trimestre 2025”.
 
Les tāvana et leurs équipes vont continuer à enchaîner les rendez-vous institutionnels et politiques d'ici la fin de la semaine. “Vendredi, nous allons rencontrer nos parlementaires, députés comme sénateurs et l'après-midi nous serons reçus à l'hôtel de Matignon, la résidence du Premier ministre”, précise encore Cyril Tetuanui.
 
La semaine prochaine sera consacrée à des rendez-vous dans différents ministères parmi lesquels on peut citer celui des Outre-mer ainsi que les Collectivités territoriales. Il sera ensuite grand temps pour les tāvana et leurs délégations de retrouver le chemin du Fenua : la météo des prochains jours prévoit une vague de froid et des chutes de neige dans le nord de la France.

Les Marquisiens reçus en particulier
 
Ils jurent leurs grands dieux qu'ils ne font “pas de séparatisme” et que leur unique souhait est de faire avancer la cause de tous les archipels de Polynésie : une délégation hakā’iki a été reçue “en aparté” ce mercredi par le ministre des Outre-mer, François-Noël Buffet, rue Oudinot.

“Nous avons travaillé sur les dossiers en cours et avons soumis au ministre des Outre-mer des questions importantes sur le Fonds vert, le fonds de la transition énergétique et l'évolution du statut de notre communauté de communes en communauté d'archipel”, détaille Félix Barsinas, tāvana de Tahuata.
 
La délégation marquisienne était accompagnée du député récemment élu, et originaire de l'archipel, Moerani Frebault. Les élus du Syndicat pour la promotion des communes de Polynésie française (SPCPF), qui parlent eux aussi “au nom des élus de tous les archipels de Polynésie”, seront reçus rue Oudinot la semaine prochaine.

Rédigé par Bertrand PREVOST le Mercredi 20 Novembre 2024 à 17:55 | Lu 2019 fois