Des signes alarmants pour le crédit local


Au Fenua, la production de crédits montre des signes de fatigue. Entre une chute des prêts aux entreprises et des particuliers qui semblent hésiter à emprunter, l’optimisme fait visiblement ses valises. Crédit photo : Thibault Segalard.
Tahiti, le 20 septembre 2024 - L’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM) a levé le voile, ce jeudi, sur les chiffres du crédit en Polynésie française pour le deuxième trimestre 2024. Ceux-ci mettent l'accent sur le nombre de crédits accordés, qui montre des signes de fatigue. Entre une chute des prêts aux entreprises et des particuliers qui semblent hésiter à emprunter, l’optimisme fait visiblement ses valises. Pendant ce temps, les taux d'intérêt continuent leur ascension.
 
L’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM) vient de publier les données du deuxième trimestre 2024 sur la production de crédits et les taux pratiqués en Polynésie française. Des chiffres qui, derrière une légère baisse, trahissent une économie locale en perte de vitesse. Si l'on en croit ces indicateurs, investisseurs et particuliers semblent marcher sur des œufs, révélant une prudence croissante. Ce qui pourrait, à terme, freiner certains secteurs. Mais, pour l’instant, rassurons-nous : le marché du crédit en Polynésie tient encore bon.
 
Une production de crédit sous tension
 
Au deuxième trimestre 2024, la production de crédits reste sur le papier solide, mais la réalité est moins reluisante : elle recule de 16,6 % par rapport au trimestre précédent. C’est principalement du côté des entreprises que ça se complique, avec une baisse de 10,8 % des crédits accordés aux sociétés non financières. La machine à investir semble s'enrayer, reflet d’une confiance en berne dans un contexte économique incertain. L’inertie ambiante trouve probablement son origine dans les cafouillages autour de la réforme fiscale et les décisions gouvernementales, souvent prises sans la moindre concertation avec les acteurs locaux.
 
Frédéric Dock, ancien président du Medef Polynésie, avait pourtant prévenu le gouvernement à maintes reprises : “Tout ça, ce sont des messages très négatifs pour les investisseurs”, avait-il martelé au micro de Tahiti Infos en fin d'année dernière. Derrière ses avertissements, qui avaient fait le même effet qu'un seau d’eau sur un canard, l'ancien patron des patrons avait visiblement vu juste.
 
Dans cet ennui, le secteur des particuliers n'est pas en reste. Les crédits accordés aux ménages diminuent de 8,8 % sur un an. Toutefois, alors que les prêts immobiliers chutent de 22,2 %, les crédits à la consommation, eux, s’envolent. La demande en crédits personnels et autres prêts pour boucler les fins de mois bondit, reflet d’un quotidien devenu plus coûteux, dans un monde où l’inflation frappe à toutes les portes. Apparemment, il devient plus facile d’emprunter pour son caddie que pour sa maison.
 
Des taux d’intérêt qui grimpent… tranquillement
 
Parmi les facteurs qui expliquent cette frilosité dans la production de crédits, il y a l’inévitable hausse des taux. Bien que maîtrisée (c’est ce qu'on dit pour éviter la panique), cette hausse reste significative. Les prêts personnels affichent une hausse de 15 points de base, avec un taux moyen qui grimpe à 6,46 %. Un joli record sur les cinq dernières années. Certes, ces taux demeurent encore attractifs à l’échelle internationale, notamment par rapport à la France et la Nouvelle-Calédonie, mais ils paraissent gargantuesques par rapport à ceux d’il y a deux ou trois ans.
 
Quant aux entreprises, les taux varient en fonction de leur taille et du secteur d’activité, mais là encore, la hausse est palpable : +11 points en moyenne par rapport au trimestre précédent, atteignant ainsi 6,05 %. En somme, tout augmente sauf l'enthousiasme général.
 

Rédigé par Thibault Segalard le Vendredi 20 Septembre 2024 à 17:26 | Lu 5748 fois