Marseille, France | AFP | samedi 16/02/2018 - Au coeur du Parc national des Calanques débouche un conduit baptisé "l'anus de Marseille", qui, pendant un siècle, a charrié les eaux usées de la deuxième ville de France et dévasté les fonds marins. Un projet expérimental espère les ressusciter.
Dans un paysage de carte postale, au pied des falaises de la calanque de Cortiou, un bateau-grue immerge avec précaution un bloc de béton, "hôtel à poissons" d'une dizaine de tonnes.
L'opération, baptisée Rexcor, vise à construire quatre "villages" sous-marins de béton : 300 tonnes de récifs artificiels, comme on en installe dans de nombreux sites côtiers à travers la planète, mais spécialement calibrés pour étudier le retour de la vie en eaux troubles, selon les promoteurs de ce projet.
"Ces récifs doivent résister à des houles allant jusqu'à neuf mètres de haut, et tenir au moins trente ans", souligne depuis le pont du bateau Alexandre Musnier, chef de projet pour la start-up montpelliéraine Seaboost.
A vingt mètres sous la surface, un rideau de sédiments en suspension cache le soleil blanc de la Méditerranée. Le fond est désolé et boueux, a constaté un photographe de l'AFP. Un nuage de particules se soulève lorsque le bloc de béton est déposé.
La qualité des eaux s'est pourtant améliorée au cours des trente dernières années, et malgré le nom fleuri que donnent les riverains au conduit d'évacuation, les rejets respectent désormais les normes, soulignent les promoteurs du projet, chapeauté par le Parc national et l’État, via l'Agence de l'eau.
Dans les années 1980, "la construction de la station d'épuration de la ville a permis +d'abattre+ les taux de bactéries", explique l'AFP Anthony Caro, chargé du sujet à la mairie de Marseille. "On peut envisager maintenant de recoloniser".
Pas de quoi donner envie de piquer une tête cependant : le traitement ne filtre pas certains métaux, déchets de médicaments ou micro-plastiques, et l'eau est souillée en cas d'orages violents, fréquents en Méditerranée.
Malgré tout, "on va essayer de recréer de petits écosystèmes pour donner un coup de pouce à la nature", explique le biologiste du projet, Matthieu Lapinski. Il s'agit "de savoir si on peut restaurer certaines fonctions écologiques qui ont totalement disparu".
Une hérésie, selon l'association Union Calanques Littoral, qui craint des contaminations et s'oppose à ce qu'elle qualifie de "HLM sous la mer". "Les poissons invités à coloniser ces structures artificielles, dans ce milieu insalubre, vont avoir la chance d’y trouver à la fois le gîte et le couvert", ironise-t-elle, citant les PCB, nickel, plomb, et autres résidus d'anti-inflammatoires...
"On est loin au niveau sanitaire d'une situation qui permette une restauration biologique. Le préalable aurait dû être de stopper les nuisances ou de les réduire bien davantage", critique aussi Sandrine Ruitton, scientifique à l'Institut méditerranéen d'océanologie.
Le budget du projet, un million d'euros, "aurait pu être utilisé pour quelque chose de plus efficace, tester par exemple la résistance d'espèces aux conditions environnementales actuelles", ajoute cette membre du conseil scientifique du Parc des Calanques, réservée sur les perspectives de recolonisation.
Rudimentaires (pneus, dalles de béton) ou plus perfectionnés, les projets de récifs artificiels sont légion sur les côtes françaises depuis les années 1960. En 2012, un rapport de l'Etat déplorait le manque de retour d'expérience suffisant pour "tirer des enseignements définitifs" sur leur intérêt.
A Cortiou, des plongées de comptage des poissons sont prévues pendant trois ans, même si leur retour pourrait prendre encore plus de temps. Les récifs sont amovibles, au cas où l'expérience tournerait court.
Les biologistes espèrent le retour rapide d'algues, de quoi attirer de petits poissons, puis leurs prédateurs... Et ainsi de suite : "le but ultime, c'est d'avoir les maillons hauts de la chaîne alimentaire", détaille M. Lapinski.
Sars, dorades et loups pourraient trouver dans les blocs de bétons, percés de tunnels et de recoins, "un abri, mais aussi de quoi se reposer, s'abriter ou s'alimenter", espère-t-il. Le graal ? Le retour d'espèces "protégées et très rares", comme le mérou ou le corb.
Dans un paysage de carte postale, au pied des falaises de la calanque de Cortiou, un bateau-grue immerge avec précaution un bloc de béton, "hôtel à poissons" d'une dizaine de tonnes.
L'opération, baptisée Rexcor, vise à construire quatre "villages" sous-marins de béton : 300 tonnes de récifs artificiels, comme on en installe dans de nombreux sites côtiers à travers la planète, mais spécialement calibrés pour étudier le retour de la vie en eaux troubles, selon les promoteurs de ce projet.
"Ces récifs doivent résister à des houles allant jusqu'à neuf mètres de haut, et tenir au moins trente ans", souligne depuis le pont du bateau Alexandre Musnier, chef de projet pour la start-up montpelliéraine Seaboost.
A vingt mètres sous la surface, un rideau de sédiments en suspension cache le soleil blanc de la Méditerranée. Le fond est désolé et boueux, a constaté un photographe de l'AFP. Un nuage de particules se soulève lorsque le bloc de béton est déposé.
La qualité des eaux s'est pourtant améliorée au cours des trente dernières années, et malgré le nom fleuri que donnent les riverains au conduit d'évacuation, les rejets respectent désormais les normes, soulignent les promoteurs du projet, chapeauté par le Parc national et l’État, via l'Agence de l'eau.
Dans les années 1980, "la construction de la station d'épuration de la ville a permis +d'abattre+ les taux de bactéries", explique l'AFP Anthony Caro, chargé du sujet à la mairie de Marseille. "On peut envisager maintenant de recoloniser".
Pas de quoi donner envie de piquer une tête cependant : le traitement ne filtre pas certains métaux, déchets de médicaments ou micro-plastiques, et l'eau est souillée en cas d'orages violents, fréquents en Méditerranée.
Malgré tout, "on va essayer de recréer de petits écosystèmes pour donner un coup de pouce à la nature", explique le biologiste du projet, Matthieu Lapinski. Il s'agit "de savoir si on peut restaurer certaines fonctions écologiques qui ont totalement disparu".
- Hérésie-
Une hérésie, selon l'association Union Calanques Littoral, qui craint des contaminations et s'oppose à ce qu'elle qualifie de "HLM sous la mer". "Les poissons invités à coloniser ces structures artificielles, dans ce milieu insalubre, vont avoir la chance d’y trouver à la fois le gîte et le couvert", ironise-t-elle, citant les PCB, nickel, plomb, et autres résidus d'anti-inflammatoires...
"On est loin au niveau sanitaire d'une situation qui permette une restauration biologique. Le préalable aurait dû être de stopper les nuisances ou de les réduire bien davantage", critique aussi Sandrine Ruitton, scientifique à l'Institut méditerranéen d'océanologie.
Le budget du projet, un million d'euros, "aurait pu être utilisé pour quelque chose de plus efficace, tester par exemple la résistance d'espèces aux conditions environnementales actuelles", ajoute cette membre du conseil scientifique du Parc des Calanques, réservée sur les perspectives de recolonisation.
Rudimentaires (pneus, dalles de béton) ou plus perfectionnés, les projets de récifs artificiels sont légion sur les côtes françaises depuis les années 1960. En 2012, un rapport de l'Etat déplorait le manque de retour d'expérience suffisant pour "tirer des enseignements définitifs" sur leur intérêt.
A Cortiou, des plongées de comptage des poissons sont prévues pendant trois ans, même si leur retour pourrait prendre encore plus de temps. Les récifs sont amovibles, au cas où l'expérience tournerait court.
Les biologistes espèrent le retour rapide d'algues, de quoi attirer de petits poissons, puis leurs prédateurs... Et ainsi de suite : "le but ultime, c'est d'avoir les maillons hauts de la chaîne alimentaire", détaille M. Lapinski.
Sars, dorades et loups pourraient trouver dans les blocs de bétons, percés de tunnels et de recoins, "un abri, mais aussi de quoi se reposer, s'abriter ou s'alimenter", espère-t-il. Le graal ? Le retour d'espèces "protégées et très rares", comme le mérou ou le corb.