L'ancien Premier ministre Michel Rocard regarde une œuvre célébrant la poignée de main entre le député "caldoche" Jacques Lafleur et le leader indépendantiste kanak Jean-Marie Tjibaou en 1988, exposée au Centre Culturel Tjibaou à Nouméa le 26 ma
NOUMÉA, lundi 6 décembre 2010 (Flash d'Océanie) – Les hommages au plus haut niveau de l’État français se sont multipliés dimanche, depuis l’annonce du décès la veille de Jacques Lafleur, figure dominante de la vie politique de Nouvelle-Calédonie de ces trente dernières années.
M. Lafleur est décédé samedi en Australie dans sa résidence de l’État du Queensland (Nord-est) de suites d’une longue maladie cardio-vasculaire.
M. Lafleur, qui avait eu 78 ans le 20 novembre 2010, a ces dernières années été unanimement reconnu pour son rôle dans le rétablissement de la paix civile en Nouvelle-Calédonie, après les graves troubles du milieu des années 1980 qui ont frôlé la guerre civile.
Après les hommages immédiats de la classe politique locale, dimanche, les réactions ont aussi afflué de Paris.
Dans un communiqué de la Présidence de la république française, le chef de l’État Nicolas Sarkozy déclare notamment avoir « appris avec une profonde émotion le décès de Jacques Lafleur, député de la Nouvelle-Calédonie pendant près de 30 ans et Président de la Province Sud durant 15 années ».
M. Sarkozy a salué la mémoire de celui qui « aura incarné l'engagement pour le maintien de la Nouvelle-Calédonie dans la France » et de « celui qui fut l'artisan, aux côtés de Jean-Marie Tjibaou, des Accords de Matignon-Oudinot puis de Nouméa, qui mirent fin aux évènements tragiques du milieu des années 1980 et restaurèrent la paix civile en Nouvelle-Calédonie ».
« Homme politique habile et passionné, Jacques Lafleur a toujours su, lorsque l'essentiel était en jeu, tendre la main à ses adversaires pour éviter le retour des violences et la division de la Nouvelle-Calédonie. Il aura, à ce titre, incontestablement marqué de son empreinte l'histoire de notre pays », poursuit l’Élysée.
Au sein du gouvernement français, le Premier ministre François Fillon a pour sa part estimé par voie de communiqué que la poignée de main de M. Lafleur avec Jean-Marie Tjibaou « avait été le puissant symbole de la fin des affrontements en Nouvelle-Calédonie pour y construire un avenir partagé entre toutes les communautés », tout en saluant la mémoire d’un homme qui « a marqué de son empreinte les dernières décennies de l'histoire de la Nouvelle-Calédonie ».
Brice Hortefeux, Ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l’immigration, et Marie-Luce Penchard, Ministre chargée de l’Outre-mer, dans un communiqué conjoint, évoquent quant à eux dimanche la mémoire d’un homme qui, « par son engagement sans répit et par sa vision d’avenir », « a marqué de son empreinte l’histoire de la Nouvelle-Calédonie ».
« Homme de conviction, il a su privilégier les voies du dialogue entre les forces politiques calédoniennes pour que la paix s’installe durablement en Nouvelle-Calédonie. Il fut un artisan décisif des Accords de Matignon de juin 1988 puis de l’Accord de Nouméa de mai 1998. Sa poignée de main historique avec le leader kanak Jean-Marie Tjibaou, en conclusion des accords de Matignon le 26 juin 1988, demeure un geste fondateur pour la Nouvelle-Calédonie elle-même et pour ses rapports avec l’État. La Nouvelle-Calédonie perd un de ses grands hommes ; son parcours illustre au plus haut point ce qu’est la responsabilité politique, prendre des décisions justes, jusque pendant les périodes les plus confuses, et convaincre de la pertinence de ces positions », conclut le communiqué.
L’ancien Premier ministre socialiste Lionel Jospin, qui était aux affaires lors de la signature de l’Accord de Nouméa, en 1998, a pour sa part salué l’homme qui avait su nouer le dialogue (…) pour éviter ce qui allait se présenter comme un nouveau drame colonial pour la France ».
De passage actuellement en Nouvelle-Calédonie à la tète d’une délégation de parlementaires de tous bords, Bernard Accoyer, président de l'Assemblée nationale française, a aussi réagi en saluant un homme « de paix et de dialogue ».
« Le Vieux » et le monde Kanak
À l’annonce de la disparition de l’ancien homme fort de la Nouvelle-Calédonie, que même dans le camp Kanak on surnommait respectueusement « le Vieux », les réactions ont afflué.
Philippe Gomès, actuel Président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, a notamment estimé que la Nouvelle-Calédonie avait une « dette immense » envers M. Lafleur, à qui, a-t-il rappelé, elle doit d’être en paix aujourd’hui.
« C'est un géant de la politique calédonienne qui nous quitte (…) Il a marqué de manière indélébile l'histoire du pays », a estimé M. Gomès.
Ancien Président du gouvernement local et actuel Président du Congrès, Harold Martin, a estimé que la poignée de main Lafleur-Tjibaou et ce qui s’en est suivi resterait « une référence » et que ses effets avaient aussi « sauvé » la Nouvelle-Calédonie.
MM. Gomès et Martin font partie d’une génération entrée en politique, dans le camp parfois appelé loyaliste, sous l’aile de M. Lafleur.
Depuis 2004, le Rassemblent pour la Calédonie dans la République (RPCR), devenu Rassemblement-UMP, a vu naître d’autres partis, créés par des dissidents, dont l’Avenir Ensemble, qui lui-même s’est scindé pour donner naissance au Calédonie Ensemble de Philippe Gomès.
Chez les indépendantistes, les premiers témoignages expriment le respect pour « le Vieux », un « adversaire politique coriace », a estimé un membre du mouvement Union Calédonienne (composante du FLNKS, le Front de Libration Nationale Kanak socialiste), Gilbert Tyuienon.
« C’est quelqu’un qui a s dépasser ses convictions politiques pour faire en sorte que le pays soit engagé dans son destin actuel (…) et qui a su passer la main pour que le pays avance », a-t-il estimé.
Ancien Président du FLNKS, et signataire de l’Accord de Nouméa, Roch Wamytan a évoqué le « grand respect » que suscitait « le Vieux » au sein du monde Kanak.
Au plan régional, en Océanie, d’autres réactions sont venues de Polynésie française, autre collectivité française du Pacifique, où le député Bruno Sandras a évoqué ce week-end un homme qui « a marqué l'histoire des Outremers en dessinant un chemin vers la paix ».
« Je tiens à rendre un hommage solennel à celui qui, avec le regretté Jean-Marie Tjibaou, a été signataire et initiateur des Accords de Matignon, en 1988, puis de ceux de Nouméa 10 ans plus tard. Il a ainsi su concilier, en homme sage, la passion et la raison, avec son amour inconditionnel pour la République et son souci d'offrir à nos cousins calédoniens une perspective de paix entre les communautés. Je salue enfin le camarade de route gaulliste, qui s'était retiré de la vie politique après lui avoir tout donné, et j'adresse à sa famille, à ses proches ainsi qu'à tous les Calédoniens mes fraternelles pensées océaniennes », estime l’élu polynésien.
En Nouvelle-Calédonie, il a été décidé en début de semaine que tous les drapeaux sur les bâtiments publics seraient mis en berne jusqu’aux funérailles, envisagées pour la fin de la semaine.
Le corps du défunt devait être rapatrié d’Australie mardi, précis-t-on à Nouméa.
L’acte considéré comme le plus marquant de la carrière politique de M. Lafleur aura été, sous forme de symbole, la poignée de main entre lui-même, au nom du camp non-indépendantiste, et Jean-Marie Tjibaou, leader charismatiques du mouvement indépendantiste, en 1988, au terme d’âpres négociations sous les auspices, en mode bons offices, du Premier ministre socialiste de l’époque, Michel Rocard.
Cette poignée de main avait débouché sur la signature des accords dits de « Matignon-Oudinot » qui posèrent alors les prémices d’un retour progressif à la paix civile.
Un an plus tard, en 1989, Jean-Marie Tjibaou était assassiné par un élément radical de son propre mouvement.
Ces accords de « Matignon-Oudinot » furent suivis et approfondis dix ans plus tard, en 1998, par l’Accord de Nouméa, qui, tout en reconnaissant pour la première fois le peuple indigène Kanak dans son préambule, pose aussi les jalons d’un « destin commun », sous forme de feuille de route, d’un processus de décolonisation impliquant notamment la mise en place d’un gouvernement « collégial », un transfert progressif des compétences de la métropole aux instances locales, un « rééquilibrage » économique entre les provinces Nord (à majorité Kanak) et Sud (qui concentre une grande partie des richesses et de l’activité économique) ainsi qu’un référendum d’autodétermination à l’intérieur d’une fenêtre située entre 2014 et 2018.
Dans la seconde moitié des années 1970, Jacques Lafleur, alors membre du RPR (Rassemblement pour la république) de Jacques Chirac, fonde le Rassemblement pour la Calédonie dans la République (RPCR), qui deviendra Rassemblement-UMP au milieu des années 200 après la disparition du RPR pour laisser la place à l’Union pour un Mouvement Populaire (UMP) en France métropolitaine.
Élu député pour la première fois à l’Assemblée Nationale en 1978, il a ensuite enchaîné les mandats et, dans cet intervalle, s’est aussi imposé comme l’homme fort incontesté de la Nouvelle-Calédonie au cours d’une période de plus de vingt cinq années.
Le début du déclin se situe à partir de mai 2004 lorsqu’à l’occasion des élections locales, le parti de M. Lafleur connaît une cinglante défaite, au profit de nouveaux partis (dont l’Avenir ensemble) créés par plusieurs membres dissidents, qui lui reprochaient notamment son autoritarisme.
En avril 2010, M. Lafleur démissionnait de son dernier mandat électif, au congrès local.
L’une de ses dernières apparitions publiques, mi-novembre 2010, avait été à l’occasion de sa décoration d’une « Colombe de la Paix », qui lui a été décernée, à lui mais aussi à titre posthume à Jean-Marie Tjibaou, pour leur célèbre poignée de main.
Cette distinction placée sous la double égide de l’Allemagne et de l’UNESCO, a été créée dans la mouvance du soixantième anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.
Elle a notamment récompensé ces dernières années des personnalités telles que Mikhaïl Gorbatchev, Lech Walesa, le pape Jean-Paul II, le Dalaï-lama ou encore Aung San Suu Kyi.
Interviewé par la presse locale, M. Lafleur s’était alors déclaré « honoré », à l fois pour lui-même mais aussi pour Jean-Marie Tjibaou et la Nouvelle-Calédonie.
En guise de testament politique reprenant l’essentiel de ses mémoire (Ce que je Crois) publiées il y a quelques années, il alors rappelé son désir de voir la Nouvelle-Calédonie conforter une relation à long terme avec la France.
« Il se peut qu’un jour la Calédonie choisisse de s’émanciper. Mais je souhaite qu’elle s’imprègne le plus longtemps possible de la culture française, pour que naissent et s’épanouissent des hommes et des femmes de qualité, marqués par les valeurs de la France (…) Partout où elle a décolonisé, la France a laissé des marques bien plus fortes et bien plus humaines que les autres pays colonisateurs. Nous avons la chance d’être dans la France et notre intérêt est d’y rester encore longtemps », avait-il alors déclaré au quotidien Les Nouvelles Calédoniennes.
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M. Lafleur est décédé samedi en Australie dans sa résidence de l’État du Queensland (Nord-est) de suites d’une longue maladie cardio-vasculaire.
M. Lafleur, qui avait eu 78 ans le 20 novembre 2010, a ces dernières années été unanimement reconnu pour son rôle dans le rétablissement de la paix civile en Nouvelle-Calédonie, après les graves troubles du milieu des années 1980 qui ont frôlé la guerre civile.
Après les hommages immédiats de la classe politique locale, dimanche, les réactions ont aussi afflué de Paris.
Dans un communiqué de la Présidence de la république française, le chef de l’État Nicolas Sarkozy déclare notamment avoir « appris avec une profonde émotion le décès de Jacques Lafleur, député de la Nouvelle-Calédonie pendant près de 30 ans et Président de la Province Sud durant 15 années ».
M. Sarkozy a salué la mémoire de celui qui « aura incarné l'engagement pour le maintien de la Nouvelle-Calédonie dans la France » et de « celui qui fut l'artisan, aux côtés de Jean-Marie Tjibaou, des Accords de Matignon-Oudinot puis de Nouméa, qui mirent fin aux évènements tragiques du milieu des années 1980 et restaurèrent la paix civile en Nouvelle-Calédonie ».
« Homme politique habile et passionné, Jacques Lafleur a toujours su, lorsque l'essentiel était en jeu, tendre la main à ses adversaires pour éviter le retour des violences et la division de la Nouvelle-Calédonie. Il aura, à ce titre, incontestablement marqué de son empreinte l'histoire de notre pays », poursuit l’Élysée.
Au sein du gouvernement français, le Premier ministre François Fillon a pour sa part estimé par voie de communiqué que la poignée de main de M. Lafleur avec Jean-Marie Tjibaou « avait été le puissant symbole de la fin des affrontements en Nouvelle-Calédonie pour y construire un avenir partagé entre toutes les communautés », tout en saluant la mémoire d’un homme qui « a marqué de son empreinte les dernières décennies de l'histoire de la Nouvelle-Calédonie ».
Brice Hortefeux, Ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l’immigration, et Marie-Luce Penchard, Ministre chargée de l’Outre-mer, dans un communiqué conjoint, évoquent quant à eux dimanche la mémoire d’un homme qui, « par son engagement sans répit et par sa vision d’avenir », « a marqué de son empreinte l’histoire de la Nouvelle-Calédonie ».
« Homme de conviction, il a su privilégier les voies du dialogue entre les forces politiques calédoniennes pour que la paix s’installe durablement en Nouvelle-Calédonie. Il fut un artisan décisif des Accords de Matignon de juin 1988 puis de l’Accord de Nouméa de mai 1998. Sa poignée de main historique avec le leader kanak Jean-Marie Tjibaou, en conclusion des accords de Matignon le 26 juin 1988, demeure un geste fondateur pour la Nouvelle-Calédonie elle-même et pour ses rapports avec l’État. La Nouvelle-Calédonie perd un de ses grands hommes ; son parcours illustre au plus haut point ce qu’est la responsabilité politique, prendre des décisions justes, jusque pendant les périodes les plus confuses, et convaincre de la pertinence de ces positions », conclut le communiqué.
L’ancien Premier ministre socialiste Lionel Jospin, qui était aux affaires lors de la signature de l’Accord de Nouméa, en 1998, a pour sa part salué l’homme qui avait su nouer le dialogue (…) pour éviter ce qui allait se présenter comme un nouveau drame colonial pour la France ».
De passage actuellement en Nouvelle-Calédonie à la tète d’une délégation de parlementaires de tous bords, Bernard Accoyer, président de l'Assemblée nationale française, a aussi réagi en saluant un homme « de paix et de dialogue ».
« Le Vieux » et le monde Kanak
À l’annonce de la disparition de l’ancien homme fort de la Nouvelle-Calédonie, que même dans le camp Kanak on surnommait respectueusement « le Vieux », les réactions ont afflué.
Philippe Gomès, actuel Président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, a notamment estimé que la Nouvelle-Calédonie avait une « dette immense » envers M. Lafleur, à qui, a-t-il rappelé, elle doit d’être en paix aujourd’hui.
« C'est un géant de la politique calédonienne qui nous quitte (…) Il a marqué de manière indélébile l'histoire du pays », a estimé M. Gomès.
Ancien Président du gouvernement local et actuel Président du Congrès, Harold Martin, a estimé que la poignée de main Lafleur-Tjibaou et ce qui s’en est suivi resterait « une référence » et que ses effets avaient aussi « sauvé » la Nouvelle-Calédonie.
MM. Gomès et Martin font partie d’une génération entrée en politique, dans le camp parfois appelé loyaliste, sous l’aile de M. Lafleur.
Depuis 2004, le Rassemblent pour la Calédonie dans la République (RPCR), devenu Rassemblement-UMP, a vu naître d’autres partis, créés par des dissidents, dont l’Avenir Ensemble, qui lui-même s’est scindé pour donner naissance au Calédonie Ensemble de Philippe Gomès.
Chez les indépendantistes, les premiers témoignages expriment le respect pour « le Vieux », un « adversaire politique coriace », a estimé un membre du mouvement Union Calédonienne (composante du FLNKS, le Front de Libration Nationale Kanak socialiste), Gilbert Tyuienon.
« C’est quelqu’un qui a s dépasser ses convictions politiques pour faire en sorte que le pays soit engagé dans son destin actuel (…) et qui a su passer la main pour que le pays avance », a-t-il estimé.
Ancien Président du FLNKS, et signataire de l’Accord de Nouméa, Roch Wamytan a évoqué le « grand respect » que suscitait « le Vieux » au sein du monde Kanak.
Au plan régional, en Océanie, d’autres réactions sont venues de Polynésie française, autre collectivité française du Pacifique, où le député Bruno Sandras a évoqué ce week-end un homme qui « a marqué l'histoire des Outremers en dessinant un chemin vers la paix ».
« Je tiens à rendre un hommage solennel à celui qui, avec le regretté Jean-Marie Tjibaou, a été signataire et initiateur des Accords de Matignon, en 1988, puis de ceux de Nouméa 10 ans plus tard. Il a ainsi su concilier, en homme sage, la passion et la raison, avec son amour inconditionnel pour la République et son souci d'offrir à nos cousins calédoniens une perspective de paix entre les communautés. Je salue enfin le camarade de route gaulliste, qui s'était retiré de la vie politique après lui avoir tout donné, et j'adresse à sa famille, à ses proches ainsi qu'à tous les Calédoniens mes fraternelles pensées océaniennes », estime l’élu polynésien.
En Nouvelle-Calédonie, il a été décidé en début de semaine que tous les drapeaux sur les bâtiments publics seraient mis en berne jusqu’aux funérailles, envisagées pour la fin de la semaine.
Le corps du défunt devait être rapatrié d’Australie mardi, précis-t-on à Nouméa.
L’acte considéré comme le plus marquant de la carrière politique de M. Lafleur aura été, sous forme de symbole, la poignée de main entre lui-même, au nom du camp non-indépendantiste, et Jean-Marie Tjibaou, leader charismatiques du mouvement indépendantiste, en 1988, au terme d’âpres négociations sous les auspices, en mode bons offices, du Premier ministre socialiste de l’époque, Michel Rocard.
Cette poignée de main avait débouché sur la signature des accords dits de « Matignon-Oudinot » qui posèrent alors les prémices d’un retour progressif à la paix civile.
Un an plus tard, en 1989, Jean-Marie Tjibaou était assassiné par un élément radical de son propre mouvement.
Ces accords de « Matignon-Oudinot » furent suivis et approfondis dix ans plus tard, en 1998, par l’Accord de Nouméa, qui, tout en reconnaissant pour la première fois le peuple indigène Kanak dans son préambule, pose aussi les jalons d’un « destin commun », sous forme de feuille de route, d’un processus de décolonisation impliquant notamment la mise en place d’un gouvernement « collégial », un transfert progressif des compétences de la métropole aux instances locales, un « rééquilibrage » économique entre les provinces Nord (à majorité Kanak) et Sud (qui concentre une grande partie des richesses et de l’activité économique) ainsi qu’un référendum d’autodétermination à l’intérieur d’une fenêtre située entre 2014 et 2018.
Dans la seconde moitié des années 1970, Jacques Lafleur, alors membre du RPR (Rassemblement pour la république) de Jacques Chirac, fonde le Rassemblement pour la Calédonie dans la République (RPCR), qui deviendra Rassemblement-UMP au milieu des années 200 après la disparition du RPR pour laisser la place à l’Union pour un Mouvement Populaire (UMP) en France métropolitaine.
Élu député pour la première fois à l’Assemblée Nationale en 1978, il a ensuite enchaîné les mandats et, dans cet intervalle, s’est aussi imposé comme l’homme fort incontesté de la Nouvelle-Calédonie au cours d’une période de plus de vingt cinq années.
Le début du déclin se situe à partir de mai 2004 lorsqu’à l’occasion des élections locales, le parti de M. Lafleur connaît une cinglante défaite, au profit de nouveaux partis (dont l’Avenir ensemble) créés par plusieurs membres dissidents, qui lui reprochaient notamment son autoritarisme.
En avril 2010, M. Lafleur démissionnait de son dernier mandat électif, au congrès local.
L’une de ses dernières apparitions publiques, mi-novembre 2010, avait été à l’occasion de sa décoration d’une « Colombe de la Paix », qui lui a été décernée, à lui mais aussi à titre posthume à Jean-Marie Tjibaou, pour leur célèbre poignée de main.
Cette distinction placée sous la double égide de l’Allemagne et de l’UNESCO, a été créée dans la mouvance du soixantième anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.
Elle a notamment récompensé ces dernières années des personnalités telles que Mikhaïl Gorbatchev, Lech Walesa, le pape Jean-Paul II, le Dalaï-lama ou encore Aung San Suu Kyi.
Interviewé par la presse locale, M. Lafleur s’était alors déclaré « honoré », à l fois pour lui-même mais aussi pour Jean-Marie Tjibaou et la Nouvelle-Calédonie.
En guise de testament politique reprenant l’essentiel de ses mémoire (Ce que je Crois) publiées il y a quelques années, il alors rappelé son désir de voir la Nouvelle-Calédonie conforter une relation à long terme avec la France.
« Il se peut qu’un jour la Calédonie choisisse de s’émanciper. Mais je souhaite qu’elle s’imprègne le plus longtemps possible de la culture française, pour que naissent et s’épanouissent des hommes et des femmes de qualité, marqués par les valeurs de la France (…) Partout où elle a décolonisé, la France a laissé des marques bien plus fortes et bien plus humaines que les autres pays colonisateurs. Nous avons la chance d’être dans la France et notre intérêt est d’y rester encore longtemps », avait-il alors déclaré au quotidien Les Nouvelles Calédoniennes.
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