Décès d'un militaire : « Ce n'est pas un cas suspect d'Ebola »


Ce militaire n'a « pas du tout fréquenté les pays affectés par Ebola », explique le docteur Henri-Pierre Mallet, responsable du bureau de veille sanitaire à la Direction de la santé, aux côtés de Xavier Malatre, chargé de mission auprès du directeur de la santé. « Il n'a donc pas pu contracter Ebola. »
PAPEETE, le 24 mars 2015. Une enquête a été ouverte pour déterminer les causes de la mort d'un militaire de 31 ans de retour d’Afrique, lundi à Papeete. « Ce n'est pas un cas suspect d'Ebola », insiste le docteur Henri-Pierre Mallet, responsable du bureau de veille sanitaire. Selon lui, « l'hypothèse numéro 1 est le paludisme ». Explications.


« Après une investigation rapide, on a pu confirmer que cette personne n'avait pas du tout fréquenté les pays affectés par Ebola. Ce n'est donc pas un cas suspect d'Ebola », a insisté mardi après-midi le docteur Henri-Pierre Mallet, responsable du bureau de veille sanitaire à la Direction de la santé, aux côtés de Xavier Malatre, chargé de mission auprès du directeur de la santé.

Sur les réseaux sociaux et dans Papeete, la rumeur d'un cas suspect d'Ebola avait enflé lundi soir après que des témoins avaient été impressionnés par le dispositif de précaution mis en place après le décès d'un jeune homme. Le personnel du service funéraire avait en effet dû enfiler masques, gants et blouses de protection.

Lundi vers midi, le corps d'un militaire,
âgé de 31 ans, est découvert par sa famille. Ce jeune homme était revenu à Tahiti le 7 mars, à l'occasion d'une permission, après un séjour de deux mois en opération extérieure avec l'armée française en République centrafricaine.

Un médecin libéral réalise le certificat de décès vers 12h30. La famille explique au médecin que le militaire a séjourné en Afrique. En concertation avec le Samu, le médecin libéral décide de ne pas délivré de certificat de non-contagiosité. Un obstacle médico-légal à l'inhumation est également fait avec demande d'autopsie.

Il a fallu néanmoins quelques heures avant que le corps puisse être évacué. Le corps ne peut être ni manipulé, ni emmené tant que le parcours du militaire en Afrique n'a pas été établi avec précision par le bureau de veille sanitaire. Le risque d'Ebola est en effet présent dans les têtes. En fin de journée, les médecins ont eu la confirmation par le Service de santé des armées en métropole que le militaire n'a pas séjourné dans un pays actuellement en épidémie d'Ebola (Guinée, Sierra Leone et Libéria). Il a séjourné « en Centrafrique. Il n'a donc absolument pas le risque d'avoir pu contracter Ebola », précise le docteur Mallet.


« Le paludisme peut tuer s'il n'est pas soigné à temps »

Selon les premières constations faites sur place, sa forte fièvre pourrait être due à une infection. Les médecins ont donc décidé de « traiter le corps comme potentiellement contagieux et une prise en charge à domicile en cercueil scellé ».
Pour le docteur Mallet « l'hypothèse numéro 1 » est que le paludisme soit en cause. « C'est la pathologie la plus commune en Afrique. On a eu l'expérience déjà d'un militaire polynésien qui était revenu avec un paludisme (lire ci-contre) », rappelle le docteur Mallet. « Le paludisme peut tuer s'il n'est pas soigné à temps. » Il ajoute : « Ce patient présentait des signes de maladie les jours précédents son décès. Ces signes évoquent une infection, avec un microbe ou un virus. Il y a un risque de maladie infectieuse qui peut être transmissible. »

Les autorités sanitaires ont donc pris des précautions en listant toutes les personnes qui ont été en contact avec le jeune militaire depuis son retour à Tahiti. Mais d’autres hypothèses de maladie ne sont pas exclues comme la leptospirose ou d'autres fièvres que le militaire aurait pu ramener d'Afrique. Le corps, qui a été emmené au service de la morgue du CHPF, doit être autopsié ce mercredi matin afin de déterminer avec précision les causes du décès de ce militaire.






Le paludisme ne peut pas être transmis en Polynésie

Le paludisme, causé par des parasites transmis par des moustiques, est un fléau mondial qui touche près de 200 millions de personnes chaque année et tue environ un demi-million d'individus, principalement des enfants en Afrique, selon les estimations de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
Le paludisme est principalement transmis d’homme à homme par le biais d’une piqûre d’un moustique, l’anophèle femelle. Ce type de moustique n'existe pas en Polynésie. Il n'y a donc aucun risque de transmission du paludisme.

Il n'existe pas de vaccin contre le paludisme. Mais des médicaments peuvent être pris pour se protéger par les personnes qui vont dans un pays où le paludisme est très présent.

« Tous les militaires suivent un traitement antipaludique »

Les causes du décès du militaire sont encore inconnues. Mais le docteur Henri-Pierre Mallet, responsable du bureau de veille sanitaire, estime que « l'hypothèse numéro 1 est le paludisme ». Si c'était le cas, ce ne serait pas le premier cas d'un militaire polynésien mort de cette maladie. Le 5 novembre dernier, le soldat tahitien, Moana Heiarii, 26 ans, originaire de Huahine, était décédé à Paris d'une forme grave de paludisme. Le caporal-chef Moana Heiari avait été rapatrié quelques heures plus tôt de Bangui (Centrafrique). « Tous les militaires suivent un traitement antipaludique obligatoire et quotidien lorsqu’ils se trouvent dans une zone concernée par la maladie », expliquait alors le Comsup. « Néanmoins, la forme contractée par le jeune homme étant rare et particulièrement active, les traitements actuels n’ont pas permis de le sauver. »

Question à Xavier Malatre, chargé de mission auprès du directeur de la santé

Quand quelqu'un est-il suspecté d'avoir contracté Ebola ?

« D’abord, il faut que la personne ait été exposée à un risque. Pour être exposé à un risque, il faut avoir été dans un des trois pays à risque (Guinée, Sierra Leone et Libéria). Il faut également avoir de la fièvre. Celle-ci doit intervenir dans les 21 jours maximum qui suivent le passage dans un de ces pays. C'est dans ce cas-là qu'on déclare un cas suspect.
Ensuite, on va interroger cette personne ou son environnement pour savoir si elle a eu un contact avec quelqu'un qui a eu la maladie. Si c'est le cas, à ce moment-là, elle devient un cas possible. Seul un examen biologique permettra enfin de dire si c'est un cas certain. »

Rédigé par Mélanie Thomas le Mardi 24 Mars 2015 à 17:16 | Lu 3089 fois