De Tautira à Papeete, Moïse livre ses œufs bio en scooter


Moïse livre ses œufs de Tautira jusqu'à Papeete en scooter.
Papeete, le 9 décembre 2018 - Alors qu'il était sans travail, Moïse Vetea a décidé en avril dernier de se lancer dans l'élevage de poules pondeuses dans la vallée de Tautira. Depuis, le jeune homme ramasse quotidiennement entre 180 à 200 œufs bio, qu'il va ensuite livrer avec son scooter, un petit 50 cm3, cartons coincés entre les genoux, jusqu'à Papeete.


Depuis huit mois, Moïse Vetea vit au rythme de ses 260 poules et de leurs pontes. Elevées dans l'air pur de la vallée de Tautira, le jeune homme s'occupe d'elles avec attention. Il les nourrit, ramasse leurs œufs bio et frais avec délicatesse. Et si le travail est répétitif et difficile, n'autorisant jamais un jour de répit malgré la pluie, la chaleur ou la fatigue, Moïse est fier de son choix.
"Avant je galérais, je ne trouvais pas de boulot, il fallait vraiment que je fasse quelque chose de ma vie ! Un jour, je me suis dit que si je ne trouvais pas de travail, alors j'allais m'en créer un moi-même", explique avec humilité l'éleveur de 24 ans.
Sensibilisé dès son plus jeune âge à la terre par son père, agriculteur à Ahe dans les Tumaotu, Moïse a alors vu comme une évidence de travailler en lien avec la nature. "Je voulais faire un fa'a'apu comme mon père, mais pour cela il me fallait de la fiente, or le meilleur moyen d'en avoir, c'est avec les poules. C'est comme cela que l'idée m'est venue de créer un élevage de poules pondeuses sur un terrain de ma mère à Tautira", poursuit enthousiaste Moïse.

AU DÉBUT, MOÏSE S'EST FAIT VOLER DES POULES

Moïse a alors pris son destin en main. Il sait que pour réaliser son rêve, il faut être pragmatique et que le nerf de la guerre, c'est l'argent. Il lui en faut pour la construction de son poulailler et bien sûr pour acheter les poules. Conseillé par son père, le jeune homme est alors parti à la recherche de financements. "Le gouvernement, le Sefi et l'Adie m'ont aidé, cela m'a permis de démarrer mon activité, sinon je n'aurais pas pu", admet reconnaissant le jeune éleveur.
Motivé comme jamais, Moïse s'est attelé à la tâche, coupant quelques arbres de cette vallée humide et luxuriante de Tautira, libérant ainsi un peu d'espace pour bâtir l'enclos et le poulailler. Avec le bois récupéré, Moïse aménage l'intérieur du poulailler, fabrique des échelles pour permettre aux poules de pondre tranquillement dans des petites planques, etc. Une fois les travaux achevés, Moïse peut enfin accueillir Ses poules. "J'ai pu acheter 300 poules, quelques-unes sont mortes et puis je m'en suis fait voler une vingtaine au début", raconte avec une certaine rancœur le jeune éleveur.

180 A 200 ŒUFS PONDUS QUOTIDIENNEMENT

Moïse et son amie Mahealani.
Mais qu'importe, il lui en faut plus pour le faire renoncer à son rêve. Aidé par sa petite amie Mahealani, Moïse va alors prendre soin de son nouveau trésor, ses poules. Tous les jours, c'est le même rituel. "Je leur donne à boire quatre fois par jour et les nourris deux fois. Je leur donne à manger du bio, les sacs sont deux fois plus chers, mais je veux faire des œufs bons pour la santé", insiste le jeune éleveur, qui se souvient des bons conseils de son père. Et chaque jour, Moïse ramasse 180 à 200 œufs pondus par ses poules.

FAUTE DE VOITURE, MOÏSE LIVRE SES ŒUFS EN SCOOTER

Reste enfin au jeune homme à vendre la production de son poulailler. Là aussi, il lui en faut du courage, car faute de moyens pour s'acheter une voiture, Moïse circule en scooter, un petit 50 cm3. "J'ai démarché sur la Presqu'île, mais je n'ai pas réussi à trouver des acheteurs, alors je suis obligé d'aller jusqu'à Papeete en scooter pour vendre mes œufs", reconnaît-il.
C'est ainsi qu'au moins deux fois par semaine, le jeune éleveur part à Papeete avec ses deux cartons d'œufs coincés entre ses genoux, slalomant entre les nids de poule sur la route. Parfois, lorsqu'il ne peut transporter tout seul "leurs trésors", son amie Mahealani l'accompagne jusqu'à Papeete, parcourant tous les deux, les 80 kilomètres reliant Tautira à Papeete. "Quand il pleut, c'est dangereux, l'eau traverse le carton et dégouline sur les œufs. Il y a une vraie demande dans le bio, si j'avais une voiture, on pourrait se développer, avoir plus de poules pondeuses et vendre davantage d'œufs bio ", avoue-t-il, rêvant un jour de pouvoir s'acheter une voiture "même petite". Un nouveau rêve à concrétiser pour Moïse.

Infos pratiques :
Vous pouvez trouver les œufs de Moïse Vetea à "La ruche qui dit oui" ou au marché bio de Taunoa à Papeete.
Si vous n'êtes pas à Papeete, n'hésitez pas à joindre Moïse Vetea pour lui fixer rendez-vous le long de ses trajets Tautira-Papeete.
Tél : 89 580 580

Rédigé par Pauline Stasi le Dimanche 9 Décembre 2018 à 16:00 | Lu 24237 fois